Mercredi
1er mars 2006. En quête de sucre. Dur à lever, ce matin. Grand soleil, pourtant. Faut dire que la télé m'a entraîné à pas d'heure, cette nuit. J'allais l'éteindre quand a commencé un film de René Clément de 1961 avec Alain Delon, Quelle joie de vivre ! (Che Gioia vivere — cherchez l'intrulien...), qu'au bout d'un quart d'heure, je ne pouvais plus décrocher. Très étonnante comédie d'une famille anarchiste dans un état fasciste. Et ce soir, ça remet ça, j'attends Des Mots de minuit, sur la 2, pour voir Échenoz... Ce qui me laisse le temps de consigner des bribes de la journée. Bibliothèque des sciences, à la fac, ce matin. Quelques pages de bibliographie de mazarinades à réviser pour T. et à lui renvoyer (faut d'ailleurs que j'aille à la Médiathèque, un de ces jours...). Puis le courrier perso, des messages pour Litor avant de préparer la mise en ligne du JLR d'hier. J'arrive à transférer les photos, comme d'habitude, mais rien à faire pour le fichier son du séminaire d'hier : les 26 Mo ne passent pas dans le tuyau. On verra ça un autre jour, parce que ça mérite d'être écouté, tout de même. Je laisse mon collègue aller déjeuner et je sors quand il revient. Je vais jusqu'à la station L'Indien, manger un sandwich en découvrant le quartier. Retour en ville vers 15h30. D'abord à la librairie Les Temps modernes pour les trois livres commandés la semaine dernière (Berlottier, Vasset et Laferrière — y'a plus qu'à les lire !). Ensuite, je tourne dans les rues une bonne demi-heure à la recherche d'un coiffeur. Il y a des giboulées de neige de temps en temps. J'en croise plusieurs, des salons de coiffure, déserts ou peu engageants. J'allais jeter mon dévolu sur Franck Provost, rue de la Cerche, où il y a de l'animation, des clients, quand je ressens — étrange, à cette heure-ci — un début d'hypoglycémie, la fébrilité physique et le malaise à l'idée de demander quelque chose... Renoncer ? Revenir demain ? J'hésite. Je n'aime pas abandonner. Et là, rue de la République, la boutique Jeff de Bruges où je m'engouffre en quête de sucre. Chocolats et pâtes de fruit en vrac, j'en avale deux ou trois dès que sorti dans la rue. Pourtant, ça prenait du temps, pour payer. Et la caissière de m'expliquer aimablement que c'est en effet compliqué parce que les chocolats ont une TVA à 5,5 % alors que les pâtes de fruits sont à 19,6 %... Sur le fond, je me demande bien pourquoi le chocolat serait un produit de première nécessité et les pâtes de fruits des produits de luxe. D'ailleurs, pour ce qui est de l'hypoglycémie, la pâte de fruits est plus efficace que le chocolat... En quatre minutes, glucose dissous, je sens l'aisance remplacer la fébrilité. Allez, du courage, le coiffeur. Le pire, c'est de faire la conversation. Dans les miroirs, de temps en temps, je vois passer des étudiantes japonaises, ça me distrait. Quarante minutes et vingt-quatre euros plus tard, je suis rajeuni et plein de cheveux dans le cou (ce qui n'arrive jamais à Tokyo...). Au CDN, Carré Saint-Vincent, je voulais une place pour ce soir, mais c'est complet. Je verrai Les Marchands de Joël Pommerat vendredi soir. Repos au studio, soupe de poisson, radis roses et salade d'endives. En fait, je m'en rends bien compte, ma journée s'est faite dans l'ombre de celle d'hier. J'appelle Cécile pour le lui dire. Et puis je vais lire en attendant Échenoz... Commentaires1. Le jeudi 2 mars 2006 à 10:18, par alain : Je n'avais pas vu la citation d'Echenoz d'hier. Merci 2. Le jeudi 2 mars 2006 à 13:12, par k : idem for me, alain, hier, 3h10 juste un peu de retard 3. Le vendredi 3 mars 2006 à 00:35, par dabichan : Salut collègue, 4. Le samedi 4 mars 2006 à 01:23, par Berlol : Suis de passage à la Médiathèque d'Orléans. Tout va très bien, vous verrez. Pas de nouveaux billets avant lundi prochain... Bon week-end ! 5. Le samedi 4 mars 2006 à 17:46, par k : koukou alain t'ai la il est 2h45 peut être tu dors encore........... 6. Le dimanche 5 mars 2006 à 00:48, par alain : Non, ce matin, 5 heures et quelques. |
Jeudi
2 mars 2006. Pincement de retard. De nouveau installé à la bibliothèque, j'e-vaque à mes affaires en écoutant les Reconnaissances à Jules Laforgue de Mathieu Bénézet. Passionnant ! Puis Bernard Noël avec Alain Veinstein cette nuit-même. Au courrier, Isabelle me signale, dans le magazine du CIAC de Montréal, la mise en ligne d'un compte rendu de l'ILF à Cerisy (en français et en anglais). Xavier Malbreil m'avait envoyé son texte, que j'avais trouvé juste et étonnamment détaillé, mais je n'en avais pas encore vu la mise en page. C'est du bel ouvrage, dans un site qui nous honore. Pincement, cependant, car cela me rappelle que j'ai du retard dans le recueil des textes pour les Actes du colloque. Et que je n'y ai pas l'esprit... Prolongement de ce que disait Assia Djebar le mois dernier : « Abdelaziz Bouteflika avait prévenu dès avril dernier : « Toute institution privée qui n'accorde pas une priorité absolue à la langue arabe est appelée à disparaître.» Dimanche, et sans attendre la fin de l'année scolaire, quarante-deux écoles privées francophones, la plupart situées à Alger et en Kabylie, ont été fermées, souvent avec l'aide de la police. Ces établissements avaient « ignoré la loi » qui exige d'enseigner « obligatoirement en langue arabe dans toutes les disciplines et à tous les niveaux ».» (à suivre dans Libération du jour) |
Vendredi
3 mars 2006. Ne serait-ce que la liste des rois de France. 9h00, temps pluvieux. En autocar, celui-là-même qui nous a amenés de Roissy il y a 13 jours, avec tous nos étudiants pour aller — Ô châteaux ! — visiter Chambord, déjeuner à Cour-Cheverny et visiter Cheverny. Il a plu pendant les déplacements et presque fait soleil quand nous étions en visite. Trente adolescents japonais lâchés dans l'immense château avec presque autant d'appareils-photo numériques, une forme de visite très ludique que je n'avais pas encore connue, moi qui suis passé au moins dix fois chez François 1er — la dernière, c'était avec T. il y a quatre ou cinq ans... J'ai du mal à me figurer quel degré de réalité historique ces lieux peuvent acquérir dans l'esprit de nos apprenants. Ils sont attentifs, impressionnés, souvent curieux, même. Cependant, leur connaissance de la culture française est tellement lacunaire (pour ne pas dire inexistante) que je ne vois pas à quoi peuvent venir s'accrocher toutes les informations qui leur tombent dessus en une seule journée, fût-elle préparée spécialement la veille en cours. Cours auquel j'aurais peut-être bien fait d'assister car, en y réfléchissant un peu, je suis bien incapable de réciter ne serait-ce que la liste des rois de France... En attendant de faire un jour la visite avec audio-guide, je me suis offert un Petit guide Aedis Les Rois de France, dépliant 8 pages cartonné avec des médaillons dessinés où ne manque qu'un visage, celui de Jean 1er le Posthume, né pour cinq jours en 1316 et dont on écrit un peu partout sans réfléchir qu'il aurait régné... Autres petits souvenirs destinés à nostre maisonnée : une housse de coussin brodée à motif de coq (à Chambord) et une grande cuillère en étain modèle Louis XIV (à Cheverny). Quand on le dit comme ça, ça paraît cul-cul, mais après quelques mois ou quelques années d'usage quotidien d'un objet délicatement choisi, la remémoration de son origine et de l'instant précis de son choix est un plaisir délicat. J'attends d'ailleurs l'occasion de retourner à la Genevraye, cet atelier de poterie du côté de Fontainebleau... Pic d'émotion quand même atteint d'une façon imprévue, lors d'une partie de la visite de Cheverny que je ne connaissais pas : le repas des chiens. Un quart d'heure d'attente dans l'odeur pas très agréable du chenil. Des carcasses de poulets et un cocktail de croquettes étalés dans la cour grillée, il y en a bien une trentaine de kilos (croquettes en majorité, contrairement à ce qu'on voit sur la photo de Wikipédia). Et puis la grille s'ouvre sur une ruée de 120 chiens de chasse... Les carcasses sont sans doute là pour entretenir leur instinct carnassier — et ça marche. Très impressionnant. Une de nos étudiantes en semble quelque peu traumatisée. Marier Brecht et Duras. Les Marchands de Joël Pommerat (CDN d'Orléans). Ça commençait désagréablement. Des éblouissements, du béton, le dénuement de la scène, des acteurs sans parole. Et puis on avait à nous dire des choses pas plaisantes. Qu'une femme allait mal. Qu'une autre qui était son amie n'allait pas très bien non plus. L'une parce qu'elle avait un travail qui abîmait son corps. L'autre parce qu'elle n'avait pas de travail, ce qui dérangeait son corps et son esprit. C'était des tableaux qui se suivaient. Fondus au noir et éblouissements à des degrés variables. Le mur du fond pouvait être un mur de lumières très blessantes, on ne pouvait presque pas regarder, surtout au début des scènes (on pourrait envisager d'y retourner avec des lunettes de soleil). C'est-à-dire qu'il fallait que ce soit dur à regarder, je crois. Pour qu'on s'habitue à ce que regarder cela soit dur. Et ces femmes, et des hommes aussi, de leur entourage, ne parlaient pas directement. Ils mimaient mais sans jamais exagérer, exactement comme vous et moi, ou comme à la télé, parfois en ombres chinoises, parfois en ombres portées sur les murs latéraux, parfois avec des bribes de paroles. Ils mimaient des saynètes familiales, sociales ou de voisinage, qui étaient narrées, explicitées par une voix off, comme postérieure, mais proférées en fait par l'une des actrices alors sur la scène. Comme si elle revivait, témoignait d'une épopée sociale qu'elle avait vécue — et que sa parole ranimait, recréait. Une épopée qui avait été vécue par des personnes d'une grande banalité, des gens comme les autres, pas des héros. Comment ça se passait entre ceux qui avaient du travail, ceux qui n'en avaient pas, ceux qui avaient des dettes, ou des enfants, ou la télé, et ce qui s'était passé au moment d'un drame terrible qui affectait toute une région, tout un bassin d'emploi — on pense à AZF à Toulouse. Des clichés au sens propre, directement imprimés dans l'esprit des spectateurs par le mur de lumière variablement réglé. Le disparate d'éléments sociétaux et individuels se nouait autour et après la catastrophe, se mêlait à de l'irrationnel, du passionnel, qu'une mère veuille tuer son enfant, qu'un retournement médiatique puisse tenir à ça. Des désagréables impressions rétiniennes du début, qui m'étaient extérieures, à moi, un spectateur, j'avais basculé dans une profonde adhésion, une sensation d'évidences que les distanciations de la mise en scène privaient de leur cynique stéréotypie, malgré la justesse des paroles et des dialogues rapportés. Le drame humain et social m'était rendu dans son épique quotidienneté. Au temps de la mondialisation du chômage, Pommerat mariait Brecht et Duras. A la fin, on était dépité, on avait du mal à applaudir, à revenir dans la lumière normale de la salle. On n'arrivait plus à croire que ça avait seulement été un spectacle, qu'il fallait applaudir au moins parce que c'était fini — parce qu'on savait bien que ce n'était pas fini, justement, que c'était comme ça, dehors. Et cependant, bien sûr, il fallait applaudir parce que ça avait été formidablement joué, joué au point d'en être étymologiquement formidable. D'une vérité qui fait peur. Commentaires1. Le mardi 7 mars 2006 à 00:25, par Manu : La photo du chien, j'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'une femme en robe de mariée qui avait du mal à tenir en équilibre, avec un voile, une couronne blanche et de longues tresses noires ! 2. Le mardi 7 mars 2006 à 03:13, par Berlol : Manu, t'as fumé quoi ? 3. Le mardi 7 mars 2006 à 04:37, par Manu : T'en veeuux??? 4. Le mardi 7 mars 2006 à 05:16, par Berlol : Ben, p'têt pas aujourd'hui... Je me remets à peine de la gastro et puis j'ai un dîner, ce soir. Ceci dit, je reconnais que la photo est déroutante, j'ai moi-même été étonné qu'un des chiens vienne sur le rebord du muret avec son bout de poulet et j'ai appuyé sur le déclencheur sans trop bien savoir ce que je faisais... |
Samedi
4 mars 2006. Neige ou pas, faut sortir. Audition attentive avant de lancer la matinée. « [...] la vanité. Je trouve qu'on est arrivé à un point aujourd'hui, où une sorte d'individualisme forcené fait que même dans un univers dit poétique, ceux qui pourraient se poser comme des gens peut-être plus purs ou ayant encore des rêves, notamment les rêves qu'on a pu connaître dans les années 70, justement, avec des idéaux, avec une envie, j'sais pas..., de partager des choses, de repenser... en fait en sont le plus éloignés. C'est-à-dire que le milieu poétique aujourd'hui, c'est une espèce d'entreprise comme une autre où chacun a une petite idée et puis qu'il reproduit comme ça à l'infini — enfin, un certain nombre de fois — et il a une vingtaine d'amis qui font semblant de trouver ça intéressant et qui en fait sont jaloux de celui qui a pris un tout petit peu la parole plus que les autres et attendent leur tour, et cette chose que je trouve triste, parce que finalement on y est tous plus ou moins amenés, on peut reconstituer des cellules de cette sorte, il suffit d'écrire, voilà, quelques textes en propre et... je trouve que c'est peut-être ça le vrai sujet, c'est-à-dire le vrai sujet de la poésie, ce serait ce double sens de la vanité [...] » (Éric Meunié, dans Du jour au lendemain du 21 février 2006) Peut-être pas tout à fait faux... Mais ça sert à quoi, ce qu'il dit là ? La vanité, oui, mais il y a peut-être pire que les poètes, dans ce domaine. Non ? En tout cas, il ne va pas se faire que des amis, avec de tels propos ! Et puis ce n'est pas très clair. Il faut tirer ou rentrer son arme, pas jouer comme ça avec le barillet... C'est pas tout ça mais, neige ou pas, faut sortir. D'abord à la Médiathèque d'Orléans où je vais rencontrer la responsable du fonds des documents anciens contenant les Mazarinades conservées à Orléans. En service commandé pour sa majesse T. : voir comment c'est structuré, catalogué, accessible, etc. Le contact avec la responsable est très sympathique — une personne agréablement surprise de voir que quelqu'un s'intéresse à des documents qu'elle recote à temps perdu depuis le passage d'Hubert Carrier, il y a plusieurs années, dernière personne à s'être intéressée à ces pièces. On le voit, l'ignorance des mazarinades est loin de n'être que nippone. D'où je suis, second étage, il est possible de se connecter en wifi, service dont je profite une petite heure pour voir le courrier et répondre à quelques messages, constater qu'il y a peu de commentaires au JLR, en laisser un, rien de plus. Rendez-vous familial place du Martroi. Comme il neige toujours, on passe en voiture au marché des bords de Loire (betterave, concombre, pâté de foie, fromage de chêvre et poulet rôti), puis voir un peu plus loin sur la rive, à Saint-Jean de Braye, où se trouve le restaurant Les Toqués qui m'a été recommandé (mais qui n'est pas ouvert) avant d'aller déjeuner au Viking, rue de Bourgogne, mon premier restaurant à proprement parler gastronomique depuis mon arrivée. Les chateaubriants au foie gras sont d'une tendreté et d'un goût remarquables, mon entrée d'effilés de saint-jacques crus en sauce à l'huître exquisement proche des sashimis — en revanche les praires farcies de ma mère manquent d'ail et de sel, mais pas de sable ! Ce sera la seule note négative du repas, les crêpes flambées aux agrumes étant pour finir excellentes, même si mon beau-père trouve cela trop sucré (je m'inquiète un peu pour son diabète...). Sieste et lecture. Bribes de Victoires de la musique, entre des coups de téléphone et la rédaction de plusieurs jours de JLR — mort de rire de la déprogrammation du nullissime Royaume de TF1 dont j'avais vu, dépité, un bout en arrivant il y a deux semaines. Un peu plus tard, c'est bien la première fois que je vois Hubert-Félix Thiéfaine à la télévision ! Mais la voix ne me paraît plus être celle qui attendait les Alligator 427 en tripotant la fille du coupeur de joints... Commentaires1. Le lundi 6 mars 2006 à 21:34, par Dabichan : Ah H-F Thiéfaine... Que des bons souvenirs de quand
j'étais étudiant, ça ! |
Dimanche
5 mars 2006. Mousse de flétan pas fraîche. Train sans histoire, sauf que j'y récupère le Canard enchaîné du 1er mars. Déjeuner à la brasserie le Luxembourg avec mon père (j'écris ça le lendemain alors que j'ai passé une nuit atroce à cause d'une mousse de flétan pas fraîche). En l'attendant, lecture d'un article de Jean-Paul Grousset sur les Mémoires d'une Geisha, où le rôle principal est tenu par une Chinoise, ce qui lui inspire que : « Comme dirait notre Comtesse, qui connaît ses classiques, voilà bien l'influence des Nippons sur la Chine.» Ceci dit, pour éviter tout nationalisme mal placé. Rendez-vous avec Alain, près de chez Corti ! Indicible petite heure dans un café, un grand pas pour l'humanité. Retour avec 5 étudiantes rencontrées à Austerlitz, chargées de leurs courses de grandes marques effectuées hier. Leurs raisons de venir en France étaient multiples... Dîner avec mon collègue dans une des familles d'accueil. R. A. S. sauf qu'il fait froid dehors et qu'il n'y a de tram que toutes les 30 minutes, le dimanche soir. Une fois rentré, l'estomac commence à protester. Mais contre quoi ? La malédiction des dimanches, dirait JCB. Mais que devient-il, celui-là ? Allez, je vais l'appeler demain. Commentaires1. Le lundi 6 mars 2006 à 11:18, par jcb : Merci d'avoir eu une pensée pour moi. Si tu vas sur
mon journal regarde les 3 dernières pages. Tu verras que je ne deviens
rien, mais que je continue à me débattre dans mes caisses.
Toujours en connexion bas débit...attends l'adsl avec impatience...
Ne désespère pas si tu n'arrives pas à me joindre...aux
collèges le portable doit être coupé et à Thiron
Gardais la réception dépend surtout de la vitesse du vent, des
points que perd Villepin, et du nombre d'entrées aux bronzés...
aléatoire c'est ça ? 2. Le lundi 6 mars 2006 à 11:20, par jcb : J'ai oublié de te dire que demain est un jour valable pour essayer de me joindre, car je fais grève pour protester contre le CPE. |
Lundi
6 mars 2006. Récupération d'une case mémoire. L'indigestion de la nuit s'est hélas prolongée toute la journée, avec toute l'horreur imaginable. Dieu que je vais haïr le Luxembourg ! Moi qui appréciait comme un rythme magique, dans mes retours à Paris, de venir m'asseoir le long de la baie vitrée, regarder les passants qui toujours traversent le boulevard Saint-Michel... Ce plaisir sera taché à jamais par ce que je viens de vivre et que je n'ose décrire. Incapable d'avaler quoi que ce soit au petit-déjeuner, je suis tout de même parti avec mon collègue pour aller travailler à la bibliothèque des Sciences de l'université d'Orléans. J'avais d'importantes informations à communiquer à T. (notamment sur les normes bibliographiques), quelques courriers et la mise en ligne de quatre jours du JLR. Ce strict minimum effectué et toujours dans l'impossibilité d'aller déjeuner, j'ai attendu que mon collègue revienne de son déjeuner et suis rentré, lentement mais directement, au studio... Où je n'ai évidemment pas pu dormir, ce qui aurait été le plus rapide moyen d'en sortir. Tourné en rond, ouvrant refermant journaux et livres, zappant les chaînes sans y fixer mon attention, branché sur l'évolution du malaise qui provoqua aussi une forte douleur des reins, puis des maux de tête. Et le regret de ces heures perdues... Ce soir, j'ai finalement pu manger un yaourt nature, une petite salade de concombres. Et je tente actuellement de fixer mon attention sur le film Good Bye Lenin ! (2003) qui passe sur Arte (décevant, finalement, son petit côté larmoyant...). Cette amélioration progressive sera-t-elle suffisante demain pour le programme prévu ? Peu enclin aux cérémonies, j'ai tout de même été content pour Philip Seymour Hoffman, de voir qu'il venait de recevoir l'Oscar du meilleur acteur. J'ai vu le film dans l'avion qui nous amenait en France et, alors que je ne connaissais absolument pas cet acteur (aucun souvenir de son rôle dans The Big Lebowsky !), je suis resté scotché devant cette interprétation alors que le film est long et lent à la fois (ce qui est souvent dissuasif). Ne connaissant pas non plus la véritable personnalité de Truman Capote, je ne jugerai pas de ce film en terme de vérité historique, mais en simple amateur de composition d'acteur. Toujours dans l'avion, j'avais vu avant et presqu'à regret L'Équipier (Lioret, 2004) et pu me délecter de ce qui pourrait passer pour une sorte de contraire de Capote (B. Miller, 2005), un sirupeux film de Bollywood : Maine Pyaar Kyum Kiya (D. Dhawan, 2005). Voilà, c'était — pour que mes lecteurs ne perdent pas espoir — mon quart d'heure d'activité neuronale et de récupération d'une case mémoire... Commentaires1. Le mardi 7 mars 2006 à 09:35, par grapheus tis : Flétan avarié ? Non ! 2. Le mercredi 8 mars 2006 à 00:10, par Manu : Tu dors pas dans l'avion toi ? 3. Le mercredi 8 mars 2006 à 01:19, par arte : Tu as vomis ? 4. Le mercredi 8 mars 2006 à 03:08, par Berlol : Cher Grapheus, merci de vos encouragement. J'ai bien remonté
le mât ! 5. Le jeudi 9 mars 2006 à 00:48, par Manu : Moi j'ai le problème inverse. Je n'arrive pas à
combattre le sommeil et m'endors même quand je ne le souhaite pas (émission
tardive à la télé par exemple... je n'essaye même
plus !). 6. Le samedi 11 mars 2006 à 05:47, par Berlol : Oui, ça, moi aussi, ça m'arrive quand c'est pas souhaitable. Comme quoi, on ne maîtrise pas bien ne serait-ce que notre propre corps... |
Mardi
7 mars 2006. Freine sur les madeleines. Sommeil entrecoupé de levers d'urgence. Plus de douleur, plus d'appétit, plus d'intérêt à rien. Au petit déjeuner avec mon collègue pour lui dire que je viendrai à l'université plus tard, que je ne vais pas à Paris. Pas nécessaire que je m'étende plus sur cette passionnante journée, hein ! Vers 13h30, j'ai bu un demi-litre d'eau citronnée et mangé six petites madeleines, achetés à une machine du hall de Polytech'Orléans. Bien mâché. Histoire de retrouver quelque chose, du goût ou du souvenir. Et combattre la déshydratation. Cela me rappelle qu'il y a trois ans environ, mon père avait eu un problème de la glande thyroïde, un dérèglement dû à un traitement d'autre chose, hypothyroïdie, sans doute. Sans que ses symptômes aillent jusqu'à la démence, il nous avait bien fait peur. Pendant des mois, il ne voulait rien, se forçait à manger, même la viande ou la charcuterie, même la salade verte ou les endives, choses que nous avons toujours aimées (sauf que moi, je n'aime pas trop la salade verte...). Il perdait du poids de façon spectaculaire et se voûtait. Le rouge de la viande et du vin, tout particulièrement, lui faisaient horreur. Cela dura au moins un an en tout, avant qu'il ne retrouve son allant et un peu de poids. Passé 70 ans, c'est en effet le délai de rétablissement normal. Je trouvais révoltant qu'une simple petite glande nous invalidât à ce point. Je dis nous parce qu'il semble qu'il puisse en aller de même pour chacun. Je ne suis pas certain de l'aliment qui m'a intoxiqué. Cependant, quand je me remémore une par une les choses avalées, que j'avalais avec plaisir sur le moment, il n'y en a qu'une dont l'image soulève nauséeusement ma mémoire, c'est cette mousse de flétan, formée avec deux grandes cuillères, j'imagine, et posée à côté du saumon fumé et des autres composants de l'assiette nordique. En même temps, je me dis que c'est peut-être l'excès de sel ingéré qui a aggravé la réaction... Je me rappelle aussi qu'au Mexique, en voyage avec mon ex, en 1990, notre premier voyage intercontinental, avant le Japon, j'avais un jour violemment rejeté un poisson sauce aigre-douce. C'était à Palenque, je crois, l'endroit le plus chaud et le plus humide que j'aie jamais connu. Les ventilateurs m'avaient aussi donné une sorte de rhume qui me faisait moucher des litres. Et éternuer en permanence. C'en était comique, je devais contourner les zones de circulation d'air. Et nous avions encore plus chaud, bien sûr. Pour le coup du poisson, j'étais sorti du restaurant en catastrophe pour rendre au caniveau ce que l'assiette m'avait apporté. Et tout s'était calmé. L'image que je revois serait plutôt l'une des rues pentues et peut-être pavées de San Cristobal de las Casas. Je vais reprendre quelques madeleines... Des neurones circulent donc encore. En fin d'après-midi, la santé s'étant tout de même beaucoup améliorée, ayant travaillé quatre grandes heures à la bibliothèque et étant revenu faire une sieste vers cinq heures, je me suis préparé pour le dîner, sans être tout à fait officiel, avec quelques responsables universitaires. C'est sous la pluie que nous avons gagné la place du Martroi, avec mon collègue, pour dîner au restaurant du même nom. J'avale des œufs pochés sauce au vin d'Orléans avec satisfaction, chipote du caviar d'aubergine et laisse presqu'intact un pavé de thon (décidément, le poisson, ça coince). Sympathique conversation de circonstance, relevée de souvenirs nippons puisque l'un des convives, professeur de japonais à l'université d'Orléans, a passé pas mal de temps à Kanazawa et à Tokyo. Patrick De Vos, de l'université de Tokyo, est le premier de ceux que nous connaissons tous les deux — et cela me fait souvenir que, n'étant pas allé à Paris, j'ai posé un lapin (Oh non, pas de lapin !) à François Bon avec qui j'avais prévu de déjeuner. Va falloir que je m'en excuse platement. Oui, parce que c'est grâce à Patrick De Vos que j'ai rencontré François Bon, il y a cinq ans environ. Va aussi falloir que je freine sur les madeleines parce que là, ça déborde, les souvenirs... Commentaires1. Le mercredi 8 mars 2006 à 22:24, par caroline : Ce n'est pas la peine de mettre tout ça sur la mousse de flétan. J'ai moi-même connu des problèmes similaires. il semblerait que ce soit un virus type grippe qui se déchaîne d'abord sur les intestins et ensuite finit sa course dans la sphère ORL, le tout pendant unepériode d'au moins trois semaines. Courage ! On croit qu'un jour ça va mieux mais le lendemain, ça revient. un peu désespérant. 2. Le samedi 11 mars 2006 à 05:36, par Berlol : Ne me faites pas peur, Caroline ! Pour l'instant, c'est bel et bien fini, et sans extension aux voies aériennes... En tout cas, je croise les doigts et je souffle ! |
Mercredi
8 mars 2006. Tout ce que j'ai manqué hier. Ce matin, dernières mises au point avec nos étudiants avant le départ de demain matin, 5h50, pour excursion de deux jours au Mont Saint-Michel et à Saint-Malo. J'y suis et traite quelques menues questions, cerveau et corps assez valides quoiqu'instestins grouillants. Puis bibliothèque des sciences pour connexion. Tout ce que j'ai manqué hier me revient par courriel : le déjeuner chez Ernest avec François Bon, la manif avec Cécile... Dire aussi qu'il n'y aura donc pas de mise à jour avant samedi, si je vais à la Médiathèque d'Orléans, ce qui est fort possible, ou lundi prochain dans le cas contraire. Si des lecteurs assidus veulent poser des congés, c'est le moment. Dans l'autocar, j'emporterai Échenoz pour le finir et Volodine pour le commencer. (à suivre, avec des liens...) Commentaires1. Le mercredi 8 mars 2006 à 07:39, par Ping Pong Club Combourg : je propose un concours d'écriture : le voyage de Berlol
à Saint-Malo, raconté sur son blog en temps réel, en
son absence 2. Le mercredi 8 mars 2006 à 09:34, par Maxime : peut-on pratiquer l'élision sur quoique suivi d'un substantif à l'université d'Orléans ? (c'est une question, pas un reproche) 3. Le mercredi 8 mars 2006 à 22:50, par Bernard : Pour ma part, je suis aussi assidu que discret. 4. Le jeudi 9 mars 2006 à 22:58, par Manu : Je crois que tu as déjà ce qu'il te faut en
matière d'enregistrement audio en direct de la toile, mais au cas
où, jette un oeil sur ça: 5. Le samedi 11 mars 2006 à 05:43, par Berlol : Pour Saint-Malo, bonne idée... Justement, là,
venant de poster le Mont-Saint-Michel qui m'a pris plus de deux heures (plateforme
pas pratique, photos, etc.), je me dis que je posterai le vendredi à
Saint-Malo lundi. Donc... |
Jeudi
9 mars 2006. D'une coche de dérision. Lever à 5 heures pour un départ vers 5h30. L'autocar Crosnier passe nous prendre avant d'aller au point de rendez-vous où les familles amènent les étudiants. En route pour la Merveille ! On compte sur l'éclaircie annoncée dans le poste, en scrutant des nuages qui ne semblent pas tous d'accord. Une fois l'autoroute atteinte, après deux bonnes heures de nationales et départementales encamionnées, la pause technique de 30 minutes nous permet de nous restaurer en découvrant l'espace Carrefour — et que ça existait sur les autoroutes, d'ailleurs plutôt mieux fait que les boutiques traditionnelles. Arrivée dans la grisaille, quelques gouttes de pluie, à peine cinq cars sur le parking. Autant dire que le Mont-Saint-Michel est à nous ! On a distribué des plans et des hokarons à celles et ceux qui n'en avaient pas, donné les consignes pour la période libre, promenade, déjeuner et shopping, avant le rendez-vous de 14h30 pour la visite de l'abbaye. Il y avait eu le premier saisissement des étudiants, très audible, à la vue encore lointaine de ce qui commençait à paraître bien plus énorme que sur les photographies toujours déjà vues. Comme un choc, un coup reçu, qui fait presque reculer. Il y a ensuite, passée la porte étroite, l'excitation de parcourir en tous sens venelles, chemins de ronde et boutiques, de se photographier partout en petits groupes, les doigts toujours en V — chaque Japonais(e) griffant son propre visage d'une coche de dérision, comme une façon de s'excuser phatiquement d'un exhibitionnisme que l'on se dépêche de rendre réciproque. Mais ni la candeur de nos étudiants ni la beauté du site ne m'ôtent cette amère enclume de tristesse et d'angoisse pour T. que je ne peux assister, là-bas, où le soleil se couche déjà, prise maintenant dans le tourbillon de ses imprimantes. Elle en a fait venir une autre, m'a-t-elle dit, branchée sur un autre ordinateur, pour tirer et contrôler plus de mille pages — mais que mange-t-elle et quand dort-elle ? J'en perds aussi l'appétit et le sommeil... Avec, au fond, qui tourne et ravage, la boule de rage de ne pas être où il faut. Déjeuner moyen aux Terrasses de la Mère Poulard (la soupe de poisson est bonne mais le gigot d'agneau n'a pas de goût !). On regarde au loin sur les grèves entre les laisses aléatoires la trajectoire pédestre de notre chauffeur de car. Visite de l'Abbaye, sans commentaire (mon admiration pour le travail humain ne fait pas taire mon anticléricalisme — seul le souvenir d'un des textes d'Abbés de Pierre Michon imprègne le lieu d'autres forces...). Fort vent sur la terrasse, je m'y reprends à plusieurs fois pour faire ces photos, ce qui contraste avec le calme précisément monastique du cloître aux fines colonnades, prouesse architecturale plantée d'herbes aromatiques... Notre caravansérail prend ses quartiers à l'Hôtel Vert dont l'installation et le service sont irréprochables. Dîner de fête, propos de table, soirée télé et Ravel. Dans les couloirs, ambiance colonie de vacances, ça circule et ça papote jusqu'à pas d'heure — laisser faire, c'est leur seule nuit de ce type... D'une brochure sur Avranches, j'apprends qu'il faudra bientôt aller visiter (ouverture en juin) le Scriptorial d'Avranches, nouveau musée des manuscrits du Mont-Saint-Michel... « À Los Angeles il donne un concert dans la salle de bal du Biltmore Hotel d'où il envoie à son frère Édouard une carte postale représentant ce gratte-ciel et percée d'une épingle : si le recto montre l'hôtel, Ravel précise au verso que le trou indique sa chambre. C'est beaucoup mieux que Chicago, Los Angeles, l'été y règne en plein hiver, c'est une grande ville inondée de fleurs qui chez nous poussent en serre mais qui bordent ici les avenues sous une centaine de degrés Fahrenheit, les grands palmiers y sont chez eux. Et tant qu'on y est, ce n'est qu'à moins d'une heure de route en Stutz Bearcat non moins décapotable, mais cette fois carrossée grenat-lavande avec pneus à flancs blancs, Ravel va faire un tour à Hollywood où il rencontre quelques stars, Douglas Fairbanks qui parle français mais Charlie Chaplin pas. Tout cela le divertit bien qui ne se départ jamais d'une bonne humeur étonnamment constante, quoique le triomphe fatigue et qu'on mange toujours aussi mal. C'est à bord d'un train de la Southern Pacific que, venant de Perth, il se dirige vers Seattle en passant par Portland et Vancouver, puis dans un convoi du Union Pacific System qu'il quitte Denver — mines d'or et d'argent, soleil, air pur, altitude — pour Minneapolis via Kansas City. Mais comme on dirait que ça se couvre, il craint de retrouver la semaine prochaine l'air glacé de New York.» (Jean Échenoz, Ravel, p. 56-57) Je me demande bien comment on peut venir de ce Perth-là !... Ou alors lequel ? J'ai comme l'impression qu'on nous enroule dans un parcours dingue. Littérairement, ça jubile. Faudrait reprendre tout cela à tête reposée sur une carte. Sans parler de certaines tournures... admirables. |
Vendredi
10 mars 2006. De grandes plaines de retour. Entre des arbres nus, quand le jour se lève, le Mont-Saint-Michel se laisse deviner, à trois ou quatre kilomètres (l'été, quand l'hôtel est plus cher, le feuillage doit empêcher de le voir, c'est dommage...). Après un petit-déjeuner roboratif, la croisière repart, droit au Mont... pour d'ultimes photos. Les contrastes sans brume le rendent en effet plus pittoresque que jamais — à l'instar des étudiantes dont le maquillage est tout frais. Route de la côte à vitesse d'escargot ; tout est à voir jusqu'à Saint-Malo. Au Vivier-sur-Mer, on traverse des parkings avec des bateaux à roues. Les mytiliculteurs éberlués, transformés en mollusques sur pattes, nous regardent passer comme les vaches des trains. Un peu trop tôt pour une dégustation, heureusement. La moule ouvre tard. Dix heures, Saint-Malo, Porte Saint-Vincent. Distribution de plans et énoncé des consignes : quartier libre Intra Muros jusqu'à 13h30, avec un questionnaire à remplir et à rendre au retour dans l'autocar. Nous itou — sauf le questionnaire. Direction, la cathédrale reconstruite, les tombes de Jacques Cartier et de Robert Surcouf, puis les remparts, vent debout, soleil aussi. Fort de sa passion pour l'Histoire, mon collègue brave les éléments pour monter au Grand Bé, en pélerinage. Il en rapportera l'épitaphe de Chateaubriand, vœu de et exhortation au silence — que tout homme congelé respecte sans difficulté. Sur cette photo prise au Nikon (et pas au Canon...), on le voit, mon collègue, pas Chateaubriand, minuscule point beige à mi-pente... Le texte originel de Roger Vercel était un peu différent de celui qui a été gravé, va savoir pourquoi... Un grand écrivain français a demandé
cette tombe. Quand sonne l'heure, je traînasse encore un peu, seul, mèches au vent, place Chateaubriand, devant le château de la duchesse Anne. On recompte les étudiants, et en route ! Le malouin de plus loin... Pendant que la Sorbonne s'occupe, nous traversons de grandes plaines de retour, faisons une pause à Chateaudun, essuyons un dernier grain de neige fondante. J'écoute la radio, par le baladeur mp3 dont le tuner n'est pas très puissant : je n'ai souvent le choix qu'entre RTL et France Info. Assez pour apprendre, Césaire !, et ne pas aimer. Quand je ne capte plus rien, j'en reviens à Bégaudeau, que je citerai bientôt, ou je relis quelques pages de Ravel... « Pendant les répétitions, il fait vive impression sur les instrumentistes en assortissant différemment, du jour au lendemain, les couleurs de sa chemise et de ses bretelles : une fois roses, une fois bleues. Tout marche encore très bien, du moins c'est ce qu'il lui semble, bien qu'il ne se demande pas si l'accueil qui lui est fait reflète exactement le sentiment de triomphe qui l'envahit depuis quatre mois. Sentiment tel qu'il en devient un peu nonchalant, de plus en plus désinvolte dans sa façon déjà fragile de toucher le piano. Il pense que cela ne se voit pas, d'ailleurs il n'y pense pas. Or cela s'est vu. Il ne le sait pas. Le saurait-il d'ailleurs qu'il s'en foutrait.» (Jean Échenoz, Ravel, p. 59) |
Samedi
11 mars 2006. Le vil contredit le de... À la Médiathèque d'Orléans, de 10h30 à 15 heures sans bouger de ma chaise : courrier, distribution Litor, rédaction, recherche des liens et mise en ligne du JLR d'avant-hier. Une petite photo reçue du téléphone portable de T. et me donnant l'état des tulipes du balcon tokyoïte, voilà qui en dit long sur sa bonne forme... et me fait grand bien. Dès midi, la salle de lecture du second étage est pleine, principalement d'étudiants et de lycéens. Malgré cela, la consigne de silence est à peu près respectée. Une belle discipline qui me fait repenser avec ce que j'écoutais de Bégaudeau hier. Je me demande si les établissements scolaires et universitaires d'Orléans ont des (ou suffisamment de) bibliothèques ouvertes le samedi... Je sens comme une carence, dans ce domaine. Il y a dans l'ensemble une vraie demande de lieux d'étude, silencieuse, puissante, d'une jeunesse qui veut travailler et réussir sa vie, prendre sa place, son tour (si on les lui laisse, si leurs cinglés de parents veulent bien leur faire de la place, une place digne d'eux...). Et ça, c'est moins sexy pour les médias que les débordements constatés ici ou là (et qu'il faut continuer de traiter, bien évidemment) et moins vendeur que les crispations des aigris chez qui 68 sont des chiffres restés en travers. Et à cette demande formidable et silencieuse, et admirable, des réponses comme le CPE ne sont assurément pas à la hauteur. On a d'un côté une demande et un désir d'intelligence et de l'autre une réponse de gestionnaire de bestiaux qui se prend pour Napoléon. De quel côté est la grandeur d'esprit ? (D'ailleurs dans de Villepin, le vil contredit le de...) « [...] Un critère de classification a été de retenir les moments où ça ne marche pas. Les moments où ça dysfonctionne [à l'école]. Mais les moments de dysfonctionnement structurel et non pas de dysfonctionnement exceptionnel. C'est-à-dire que ce roman... de toute façon, j'en aurais été bien incapable, puisque je n'ai pas vécu ce genre de moment, mais quand bien même j'aurais été poignardé, je ne suis pas sûr que je l'aurais raconté, pour ne pas prêter le flanc à un certain nombre de discours, que je peux appeler réactionnaires, quand je suis de mauvaise humeur, et surtout parce que je voulais montrer le dysfonctionnement structurel, celui devant lequel on sera toujours pris, y compris le jour où il n'y aura plus de coups de couteaux. Voilà, le jour où il n'y aura plus de faits divers, plus d'insultes, plus de tutoiements, il y aura un dysfonctionnement de base qui est : un prof essaie de parler à ses élèves et ils ne se comprennent qu'à moitié. [...] Oui, cette langue-là, cette langue qu'on appelle de banlieue, et qui elle-même souffrirait de nombreuses divisions internes, certains disent que c'est une langue à peine articulée qui ne mérite même pas le nom de langue et encore moins le nom de français, ça, je les laisse à leur jugement péremptoire, ce qui me frappe absolument dans cette langue, c'est à quel point elle est riche, elle est dense, et qu'elle mérite d'être prélevée en littérature, oui... [...] Me frappe toujours beaucoup... Mais ça, des philosophes l'ont dit avant moi : on s'étonne souvent que les gens se révoltent, on s'étonne beaucoup moins que si peu de gens se révoltent. Et me frappe... à l'heure où justement on a tendance à dire à diagnostiquer concernant la société française qu'elle est extrêmement chaotique, qu'elle se cherche, que les repères ont tous sauté... Moi, me frappe absolument à quel point, et notamment à l'école, à quel point ça continue à bien fonctionner — ça ne fonctionne pas dans le sens de l'ascenseur social, c'est vrai que l'école ne fait pas ce travail-là, on connaît les statistiques, je n'y reviens pas, mais en terme de simple exécution de la règle, c'est vrai que la transgression reste l'exception, et que globalement tous les élèves de France arrivent le matin à peu près à l'heure, s'assoient sur les chaises, y restent pendant 55 minutes, et quand ça sonne ils s'en vont, et puis ils rejoignent une autre classe, ils s'assoient et c'est reparti. Globalement, ça marche, quoi. Et je ne suis pas sûr qu'on doive s'en réjouir, d'une certaine manière. Si on est un peu anarchiste, par exemple. On devrait même s'inquiéter de ce qui reste, peut-être, de la grégarité. Voilà, je pose la question... » (François Bégaudeau dans Du jour au lendemain le 16 février dernier. Frappant, non ?) Aux Galeries Lafayette pour acheter deux chemises. En effet, il est plus simple d'en acquérir de nouvelles pour la dernière semaine que de trouver une teinturerie, y amener et y reprendre les miennes, avec l'emploi du temps chargé des derniers jours. Sans compter que je pourrais ne pas être satisfait du travail. Par ailleurs, les chemises sales, pliées un peu n'importe comment, prendront moins de place dans la valise que des chemises propres et emballées... Elles peuvent même servir de tampon ou de bouche-trou. Moment rare à la télévision : une pièce de Roland Topor. L'Hiver sous la table, c'est tout un univers de tendresse et de précarité, de sous-location à la vodka et de foncière humanité — 100 % pur jus de Topor. Après ça, je dors comme un bébé... Commentaires1. Le lundi 13 mars 2006 à 09:22, par dm : Dommage que Bégaudeau ait ailleurs affirmé
que l'enseignement du passé simple ne servait strictement à
rien. Sinon à lire Balzac. |
Dimanche
12 mars 2006. Tous les noms des marbres. Fwahhh ! Quelle journée ! Pas à refaire de longtemps ! Neuf longues heures de transports et d'attentes pour trois heures de visite ! Et tout ça, le jour le plus froid depuis trois semaines ! Mais, prévue de longue date, cette sortie à Versailles avec trois étudiantes, on ne pouvait pas la remettre. Et puis nous allons repartir au Japon vendredi. Donc, pas d'autre occasion. Il faisait zéro degré, à 8 heures, devant la gare d'Orléans... Près de la gare de Versailles Rive gauche, les flaques d'eau étaient encore gelées vers 11 heures. Devant l'entrée A du château, nous avons fait la queue plus d'une demi-heure dans l'ombre et le courant d'air glacial... parce qu'il faut passer un par un au détecteur de je-ne-sais-quoi pour refaire la queue dans le hall et acheter ses billets. Merci pour la considération des visiteurs — des manants, devrais-je dire. Ce que confirme l'état des toilettes, malgré les cinquante centimes qu'il faut y laisser. On se demande si l'odeur est d'époque. C'est fou comme le monde entier se presse pour admirer ces vestiges de nantis et de despotes ! — mais plus personne ne connaît tous les noms des marbres ni la noblesse conquérante du Dévonien, quand la fougère... Moi, j'en ai la nausée de ce lit où l'on se gargarise à dire que tant d'enfants royaux sont nés. Je ne rejette pas l'Histoire, mais j'exècre l'admiration béate des badauds pour ce qu'ils croient être l'Histoire. Sortis des Grands Appartements et de la (demie) Galerie des Glaces, nous allons directement à la Brasserie du Musée, place Gambetta, le restaurant le plus proche (qui permet d'éviter la restauration rapide proposée au château dans le sous-sol en face des toilettes), et ce n'est pas un mauvais choix, loin de là : service poli et diligent, l'entrecôte et les frites sont bonnes. Ensuite, encapuchonnés pour que les oreilles ne partent pas en morceaux, nous descendons au Parterre d'eau, au Bassin de Latone, en travers du Bosquet de la Girandole, près du Bosquet de la Colonnade sans mollir du jarret pour débouler au Bassin d'Apollon, lui aussi privé de jets d'eau, comme partout en temps de gel... On se réchauffe quelques minutes à la boutique des Jardins. Enfin, il n'y a pas de vent, près du Grand Canal, il y fait donc moins froid. Sans doute est-ce pour cela que s'y pressent les promeneurs, les amateurs de barque et les cyclistes de location. J'explique aux étudiantes que tous ces gens ne sont pas des touristes, que beaucoup d'entre eux habitent la ville ou les environs et viennent très régulièrement passer un bout de dimanche ici, avec les enfants, les chiens, les grands-parents, les ballons... Elles semblent dire qu'ils ont beaucoup de chance, tous ces gens. Elles aussi voudraient habiter en France, soupirent-elles... Je ne leur parlerai pas aujourd'hui des nouvelles lois, non, je n'en ai pas le courage. Puis c'est l'heure d'enclencher la marche arrière pour revenir à Orléans. Mission accomplie vers 19h15. |
Lundi
13 mars 2006. L'incrémentation spiralée de
l'itérable, sa fatalité. Ce matin, je me disais que c'était bien d'avoir devant soi une journée simple, banale, de n'avoir qu'à reproduire des gestes connus, sans m'en écarter. Aller à la bibliothèque des sciences de la fac d'Orléans avec mon collègue, m'occuper du courrier et des pages du JLR en retard, aller déjeuner au resto U avec une partie de nos étudiants, refaire un tour de bibliothèque jusqu'à trois heures pour ensuite revenir au studio. La seule petite note de fantaisie serait d'aller ensuite au centre commercial de la gare d'Orléans faire quelques courses, en l'occurence des produits pharmaceutiques pour un ami au Japon, une crème de Clarins et du Synthol pour T., une réserve d'Habit Rouge pour moi. Enfin, prévu de longue date, un dîner dans une des familles d'accueil de nos étudiants, dans une très belle maison de Saint-Jean-Le-Blanc. Et tout s'est passé comme prévu, jusqu'au coup de téléphone tokyoïte qui m'apporte d'excellentes nouvelles de la Fronde. La prévision, la répétition, la prévision de la répétition, la conscience de la prévisibilité du répétitif... Et quelques autres étages de réflexivité, comme l'incrémentation spiralée de l'itérable, sa fatalité. C'est ce qui donne l'assise d'une vie. Voire de l'art, son rythme. Parfois trop, parfois pas assez. Beaucoup de vies ratées dans une mauvaise gestion de ce qui recommence et de ce qui varie dans chaque recommencement. C'est plus profond que la famille, le travail ou l'argent. C'est dans des engrenages d'ADN, des plis d'enfance, des hérissements fondateurs et irréversibles. Pour le reste, je ne sais plus... Il y a tellement de choses que je n'ai pas le temps de faire... « Voilà : il est en train de composer quelque chose qui relève du travail à la chaîne. [...] Après qu'il a fini, un jour qu'il passe avec son frère près de la fabrique du Vésinet : Tu vois, lui dit Ravel, c'est là, l'usine du Boléro.» (Jean Échenoz, Ravel, p. 78 & 79) |
Mardi
14 mars 2006. On dit que le pouvoir a ce pouvoir... Dernière virée parisienne. Beau fixe. Vêtements chauds, quand même. Mis en forme, encore, par Ravel dans le train, la mécanique vide du Boléro... En chemin vers la librairie Compagnie, rue des Écoles, je repère que la rue Louis-le-Grand est fermée tout le long de la Sorbonne par des cars de CRS et de nombreuses barrières. Pour les livres, il faut faire un choix entre ceux dont j'ai l'impression d'avoir besoin, au point de les porter dans mes bagages, vendredi, et ceux qui peuvent attendre une commande qui arrivera directement au bureau, le mois prochain, comme la Pléiade de Claude Simon ou le dernier Bégaudeau. Finalement, je prends un Laferrière, Comment faire l'amour avec un nègre sans se fatiguer (1985), Antoine Volodine, Le Port intérieur (1995), pour compléter la préparation du GRAAL, et un François Bon que je n'avais pas encore : Calvaire des chiens (1990). Puis je vais déjeuner avec lui chez Ernest, rue de Seine. Poulet au curry (je m'attendais à mieux, comme goût). Dédicace de son livre. Conversation sur le tumulte des vies et des écritures. Quelqu'un vient lui livrer un crâne, accessoire de futures performances. Après, c'est comme un reportage, je l'accompagne aux Beaux-Arts pour assister au début de son cours sur Kafka, y fais des photos, un petit film, même, et l'enregistreur mp3 posé sur le bureau... Je ne sais pas s'il l'a vu. Ce qu'il livre à (ce dont il se délivre avec) deux dizaines d'étudiants attentifs, c'est sa façon personnelle et corporelle d'appréhender la littérature. Tendu et plissant les yeux pour bien choisir ses mots, sans notes et attrapant les livres comme des preuves vivantes de ce qu'il avance, François Bon propose un enveloppement historico-culturel de l'auteur et de certains de ses textes, une projection quasi holographique de Kafka vivant et écrivant. Au point que j'ai l'impression de déranger, avec mon appareil-photo et mes trucs électroniques... Je m'éclipse discrètement (alors que c'est la pleine lune, non ?). Rendez-vous à Saint-Germain-des-Prés avec Cécile, devant l'église, qui est à l'heure d'été. Je passe prendre des macarons chez Gérard Mulot, puis on va se faire bronzer une petite heure au Luxembourg, sur un banc (pas un fauteuil de libre !). Au fond, au loin, rue Auguste Comte, derrière les grilles, on voit apparaître les manifestants, les banderoles. Puis ils disparaissent de là, reprennent sans doute le boulevard Saint-Michel (en provenance de la place d'Italie, où j'avais entendu à la radio qu'ils devaient assembler le cortège). Lorsque nous sortons, place Edmond Rostand, le défilé s'écoule tranquillement, festivement, les CRS à bonne distance, rue de Médicis, laissant le service d'ordre étudiant officier (rien à voir avec les images que l'on verra le soir, images nocturnes, d'ailleurs, d'affrontements avec des provocateurs... ni avec ce que Cécile m'écrira avoir vu après que nous nous serons quittés, vers 17h30). Cécile et moi les regardons passer quelques instants puis allons prendre un thé pour continuer à parler d'Alain et d'Arte, de Duras et d'Angot. Nous sommes contre le CPE, évidemment, parce qu'il banalise la précarité en faisant croire à un bon petit arrangement avec le monde d'aujourd'hui, toujours cette démagogie du pragmatisme — il n'est même pas compréhensible qu'un type intelligent et cultivé comme de Villepin puisse croire à son truc, il doit être drogué ou quelque chose comme ça, on dit que le pouvoir a ce pouvoir... À Censier, pour une raison que je ne m'explique pas, le seul cours qui soit autorisé par le piquet de grève à l'entrée du bâtiment, c'est le séminaire d'Hubert, le seul pour lequel on laisse entrer les phalésiens qui ont le mot de passe. Aujourd'hui, l'invité est le fondateur du site d'édition ou de mise en ligne de textes In Libro Veritas. Ne sortant pas du sérail de l'édition, ni même du monde de l'université ou de la recherche, c'est avec la parole et l'esprit dégagés que Mathieu Pasquini présente l'esprit démocratique de son site. Coups de balai et de pied dans les pratiques éditoriales qui pourraient bien être la meilleure nouvelle de l'année dans ce domaine. Mise en ligne gratuite de textes nouveaux ou du domaine public, impression à l'unité ou en nombre, prix au détail et sans forfait, composition libre des contenus à imprimer à partir du catalogue, disponibilité des licences les plus novatrices, possibilité de gratuité ou non des pdf, verrouillés ou non, forum de commentaires, suggestion de corrections des fautes (ça me rappelle la fin de mon intervention de Cerisy...), etc., allez-y voir vous-même... Amusante répétition historique : la liberté qu'offre Mathieu Pasquini et ses collaborateurs ressemble à s'y méprendre à celle qu'offrait à Rome autrefois la statue de Pasquin, qui donne son nom au pasquin, pamphlet satirique, ainsi qu'à la pasquinade, ancêtre de la mazarinade. Tout se tient. CQFD. Merci à lui et bon vent littéréticulaire au site, que nous allons suivre de près ! (Là, tout de suite, faut que je file sur Orléans...) Commentaires1. Le mercredi 15 mars 2006 à 05:50, par Manu : Le Jamendo de la littérature ? 2. Le mercredi 15 mars 2006 à 17:36, par Dabichan : Salut Berlol, 3. Le jeudi 16 mars 2006 à 05:42, par arte : Cécile, Patrick, avec tous mes regrets... 4. Le jeudi 16 mars 2006 à 06:35, par Berlol : Dabichan, total désaccord, tu t'en doutes ! On reprendra
cette conversation bientôt... De là à te traiter de "sale
bourgeois réac", tout de même... Cependant, ce que tu dis de
Besancenot à Neuilly pourrait bien s'appliquer à toi... Ceci
dit, en toute amitié. |
Mercredi
15 mars 2006. Pas aussi dandy que Ravel. Dès mon arrivée à la bibliothèque, j'engrange l'émission Du jour au lendemain avec Sereine Berlottier. Puis celle de la semaine dernière avec Échenoz. Au moins, j'aurai quelque chose à écouter dans l'avion, après-demain... De retour au Japon, il va falloir que je repasse un mois de France Culture au peigne fin, je crains d'avoir raté pas mal de choses... C'est paradoxal (et cela rejoint une des remarques de François Bon, hier) : il n'y a que loin d'ici que je réussis à être à jour, c'est-à-dire parcourir l'ensemble des programmes pour y piocher ce que je veux... Mes dernières petites courses en ville. Librairie Privat, place de la République, pour un Atlas de la France (pour T.) et un autre de l'Union Européenne, pour moi, pour les cours à venir. Il fallait aussi que ces livres soient compacts et pas lourds, mission accomplie. Ensuite, aux Galeries Lafayette, pour deux autres chemises en promotion... pas chères, pratiques à porter et d'un genre qu'on ne trouve pas facilement au Japon. Je ne suis pas aussi dandy que Ravel... Dîner dans une des familles d'accueil, le dernier. C'est d'abord l'incompressible suite de questions convenues sur tel choix de vivre au Japon, telle situation professionnelle, etc. Ce qui est tout à fait normal, au demeurant, surtout pour qui n'a jamais lu le JLR... En attente toujours de l'enfin originale conversation, je ne suis pas déçu, ce soir. Que l'origine hispanique de mon nom soit devinée, c'est déjà bon signe. Or, c'est parce que l'hôtesse est elle-même Argentine et qu'un jour, toute jeunette, se promenant avec une copine sur un quai de Buenos Aires, elle souhaita visiter la Jeanne-d'Arc, bateau qui croisait par là, s'adressant à un jeune marin... qui, de fil en aiguille, si je puis dire, voulut l'épouser. La cuisine est à l'avenant, peu bourgeoise et bien relevée. Pas de quoi s'ennuyer, donc. Pour finir, mes macarons d'hier font merveille. Allez, je vais commencer ma valise... Commentaires1. Le jeudi 16 mars 2006 à 20:17, par Manu : C'est normal que tu aies du mal à suivre. Tu n'es pas chez toi, avec ton organisation de vie habituelle. Avec Internet, peu importante la distance entre le lieu de "production" et le lieu de "consommation", là n'est pas la question. 2. Le jeudi 16 mars 2006 à 21:11, par Dabichan : Je l'ai reconnue cette famille d'accueil. La tarte tatin était-elle au rendez-vous ? Elle est excellente. Caramélisée à point ! 3. Le mardi 21 mars 2006 à 03:54, par Berlol : T'inquiète pas, Dabichan, tu la reverras l'an prochain, ta tarte Tatin — et celle qui la concoctera ! Z'ont de la chance d'habiter si près du théâtre. Mais en profitent-ils ? |
Jeudi
16 mars 2006. Ce qui peut arrêter la tache. Dernière séance de travail à la bibli de l'U. d'O. Sans doute un grand nombre de cours annulés parce que presque personne au resto U. Doit y avoir une manif en ville, aussi. Distribution de petits papiers Stop aux blocages, avec appel à une AG demain... On y refuse toute couleur politique pour mieux s'y cacher et tuer le mouvement (que le temps passe et le CPE avec... toujours la démagogie du pragmatisme, cette fois c'est Nos diplômes d'abord, sauf que vos diplômes, pour ce qu'ils servent... Il n'est plus question de savoir comment un employeur peut faire confiance à un jeune diplômé mais bien de savoir comment un jeune diplôme pourrait faire confiance à un employeur !). Pragmatisme, pragmatisme. J'espère que nos étudiantes ne vont pas se faire piéger par un éventuel arrêt du Tram. En effet, plusieurs d'entre elles sont parties faire des courses vers 11 heures, après un test final qui semble les avoir toutes épuisées. C'est qu'elles doivent revenir à l'université pour 16h15, heure des préparatifs de la soirée de remise des certificats de fin de stage... (Vais-je pour autant accepter le CPE ?...) Il fait beau et froid. Il aura fait froid jusqu'au bout, durant ce mois. Cela m'a beaucoup déçu, surtout la seconde moitié. J'imaginais finir mes jours ici sur une douceur orléane, similaire à telle angevine. Mais bon... En tout cas demain, départ : je reprends l'air marin. Aérien, même. Pas de connexion. Ni samedi, peut-être, si trop fatigué pour... On verra. Et partir juste quand le Salon du livre va commencer, c'est pas dommage, ça... Allez, pour cette année, c'est plié. Faut s'y faire. D'ailleurs, l'indigence de son blog, hein ! C'est quelque chose : « Tant les journées que l'on vous promet sont prometteuses...» Mmouiii... Ça promet ! Moi, j'aurais bien voulu voir de la francophonie qui ne passe pas de travers, qui ne fasse pas combat communautaire, etc. Mais ce n'est pas facile... « Une séance de signatures dans une librairie n'est pas toujours un moment intense. Pour créer une véritable animation, il faudrait un Balzac revenant dédicacer ses oeuvres complètes. Ce soir, l'affiche paraît plus modeste : dans une échoppe proche de la rue Mouffetard, face à une douzaine de curieux, Jean-Noël Schifano est venu présenter quelques auteurs de sa collection « Continents noirs ». Laquelle, chez Gallimard, se consacre aux « écritures africaines, principalement d'expression française », au total une quarantaine de titres parus depuis 2000 dont aucun n'a dépassé les 5 000 exemplaires. Schifano parle, traçant dans l'éther les contours d'un continent de légende. On se croirait au bord du fleuve Niger un jour de crue. Jusqu'à ce qu'un impoli l'interpelle : dites donc, votre collection pour écrivains d'Afrique noire, ça ne tomberait pas un peu dans le travers du communautarisme ? Et la typo des bouquins, pourquoi est-elle si moche (du Futura Book, un caractère bâton effectivement pas terrible) ? Suit un bref silence. Puis le flot Schifano repart, plus vif : mais non vous n'y êtes pas du tout, regardez, « Continents noirs » c'est au pluriel, la preuve que nous ne sommes pas dans la géographie mais dans l'écriture, dans quelque chose qu'on pourrait appeler le « baroque existentiel », de toute façon il y en a marre de ce procès permanent du ghetto. Fin de l'incident ? Non, début. Boniface Mongo-Mboussa, auteur de Désir d'Afrique, s'en prend à l'importun : votre inculture est sidérante car des collections africaines, il s'en est déjà créé plusieurs, voyez « Les Afriques » (Karthala), « Monde noir » (Hatier), alors pourquoi s'en prendre à celle-ci ? Parce que Schifano est un italianiste plus qu'un spécialiste de l'Afrique ? Un autre auteur de « Continents noirs » monte au front : ce débat, c'est une diversion permanente, lassante, ça empêche de parler du fond des bouquins. Et quand bien même la géographie s'en mêlerait, lance un troisième, il y a des précédents très honorables : la collection « Croix du Sud » de Roger Caillois, chez Gallimard aussi, fer de lance des littératures sud-américaines, n'a-t-elle pas révélé Borgès ? Le ton monte, Boniface Mongo-Mboussa part en claquant la porte. Dans un coin, Antoine Gallimard écoute sans mot dire. Schifano tente de calmer le jeu : chez Gallimard il n'y a pas de frontières, plaide-t-il, « vous pouvez très bien être dans "Continents noirs" et puis rentrer dans la "Blanche" ». Là, quelques gloussements nerveux au fond de la salle. Est-ce au rayon Freud qu'il faut chercher les raisons de ce psychodrame ? La maison d'édition qui a pour figure de proue la collection « Blanche » de la NRF pouvait-elle délimiter en son sein un « espace noir » sans ouvrir la boîte à lapsus ? Là-dessus, on se mit à parler bouquins et ce fut nettement moins drôle.» (Édouard Launet dans Libération du jour) Pendant ce temps, la bêtise gouvernementale s'élargit. Un peu à la façon de l'huile, on ne voit pas bien ce qui peut arrêter la tache... Commentaires1. Le jeudi 16 mars 2006 à 20:52, par Manu : Au fait, bonne fête ! 2. Le vendredi 17 mars 2006 à 01:05, par cécile : Eh oui. Tout manqué, Arte. Alain, tout. 3. Le vendredi 17 mars 2006 à 23:25, par Berlol : A'y est ! bien arrivé ! bloguerai ce soir !... |
Vendredi
17 mars 2006. Compacter dans moins d'un mètre-cube ce
qui se trouve étalé sur 25 mètres-carrés. Arrêter la tache d'huile... disais-je. Il vaut peut-être mieux carrément changer la nappe, voire la table. Je m'étais arrêté là-dessus pour aller à la soirée de fin de stage, à la Présidence de l'université. Saynètes et chansons, préparées pendant des semaines et offertes ce soir au parterre des familles d'accueil. Belle interprétation du Blues du dentiste (écrit par Henri Salvador). Tout une excitation, la joie de l'instant, bien sûr, mais déjà qui masque la tristesse et les pleurs de demain... De retour au studio, il s'agit plus de vider le frigo que de dîner au sens propre. Soupe de poisson achetée à Saint-Malo. Un pot de foie gras du marché des bords de Loire, dur à finir seul. Des poivrons à l'huile des Halles Châtelet. Une salade de chou rouge. Du fromage de chèvre. Une bonne partie de la nuit à compacter dans moins d'un mètre-cube ce qui se trouve étalé sur 25 mètres-carrés... 11h30. L'autocar nous attend, mon collègue et moi, à l'angle du Centre de conférences. Midi et quart, devant la Présidence de l'université. Fin de l'embarquement des bagages, on dirait qu'il y en a trop... L'instant terrible du départ. La plupart des étudiantes pleurent, quelques membres des familles d'accueil aussi — moi, mon cœur est ailleurs, mais ça me fait quelque chose quand même... J'ai bien apprécié l'ensemble des personnes rencontrées, leur bonne volonté, leur implication. L'autocar démarre et ça mouche pendant un bon quart d'heure. Et puis ça sèche. Petit à petit la page Orléans se tourne. À Roissy, épique enregistrement des bagages JAL & Air France. Les valises font plutôt 30 kilos que 20... On est en tort, c'est évident, on n'a pas assez prévenu les familles... Deux des cinq employés qui s'occupent de notre groupe veulent faire payer tout ça (avec un petit air de penser que Japonais = porte-monnaie). Individuellement, ça serait trop long... Alors on nous propose de passer toutes les valises, de faire un total des kilos en trop et de diviser... Pas cool pour qui a justement fait attention à ses 20 kilos. Ça ne tient pas trois minutes. Un des tapis d'enregistrement ne tourne plus, ça va encore ralentir. On demande à quelques étudiantes d'aller retirer cinq ou six kilos de leur valise pour les prendre en cabine. Je proteste — de mauvaise foi — que tout cela vole de toute façon dans un même avion, puis de bonne foi comme quoi tout cela est très discrétionnaire (je reste près des guichets et je vois bien que des valises passent avec 26 ou 28 kilos dès que les deux emm...deurs ont le dos tourné), que la prochaine fois on prendra un vol ANA qui autorise jusqu'à 40 kilos (je ne sais pas si c'est vrai, mais ça en fait bien taire un !) et que... — surtout — le retard qu'on fait prendre (il y a un autre groupe derrière) se paiera beaucoup plus cher en parking de l'avion (ça aussi, ça fait mouche...). Une douzaine d'étudiantes ont de la détaxe. Le guichet douanier est à au moins cent cinquante mètres du guichet d'enregistrement ! Ensuite, mettre un des duplicatas remis dans l'enveloppe fournie pour l'envoyer par la poste... dont la boîte est dans un autre coin du terminal. C'est comme un jeu ! Pour faire perdre du temps ! Mais qui a conçu ça ? Puis c'est le contrôle des passeports et des bagages à main, où l'on fait maintenant enlever ceinture et chaussures, palper le corps entier, passer divers détecteurs... À quand la mise à poil systématique ? Quand on arrive enfin à la porte indiquée sur nos cartes d'embarquement, on découvre qu'il y a eu une ERREUR d'impression (F49 pour F44), nous devons revenir en arrière de cinq portes, avec tout le groupe, et l'embarquement est déjà presque fini ! Pas le temps pour le shopping ! On nous fait prendre un couloir amovible qui ne mène pas à un avion mais à... un escalier, très pratique avec les bagages à main... pour descendre prendre un bus d'accès à l'avion, à trois kilomètres de là. Et un dernier escalier pour entrer dans l'avion, bien sûr. Finalement, je suis plutôt content de quitter cet aéroport high-tech à la mentalité de pays sous-développé. (Liens et suite, demain.) Commentaires1. Le mardi 21 mars 2006 à 19:59, par dabichan : "aéroport high-tech à la mentalité de
pays sous-développé", quelle superbe formule ! |
Samedi 18 mars 2006. Au regard des effusions
orléanaises. Onze kilomètres au-dessus de la Sibérie, quand minuit français a passé, j'ai mis ma montre à huit heures du matin. J'ai lu Libération du 17, ramassé en entrant dans l'avion. Article très instructif de François Wenz-Dumas (ci-dessous). Puis j'ai vu trois films sans grand intérêt (distrayant First Wives Club, 1996, avec Diane Keaton, Bette Midler et Goldie Hawn, émouvant Flashdance mais qui date tellement, nullissime Harry Potter et le gobelet de feu, franchement, ça fait pitié). Du coup, j'ai dormi ! Le CPE, pur produit de la technocratie.Arrivés à Nagoya la pluvieuse, dernière formation du groupe avec bagages pour passer plus facilement les contrôles (et ça marche...), puis (enfin) restitution informelle des étudiants à leur véritable famille. Retenue polie toute japonaise, entre eux comme avec nous, mais qui, au regard des effusions orléanaises, passerait facilement pour de la froideur... Ne pas s'y fier. Retour en taxi avec mon collègue et notre chef, qui est venue nous accueillir. Repos et rangement. Jusque tard, à cause du décalage horaire. J'ai 24 heures pour me faire beau... |
Dimanche 19 mars 2006. Sa Pénélope
tout de go. Car on ne retrouve pas sa Pénélope tout de go en descendant d'un avion. Il y a un apprêt de soi, corps et esprit, il y a une distance intérieure pour recoller à soi-même qui ne se gèrent pas dans l'arrivée directe, l'immédiateté d'un retour. Un lavage des pieds, la mémoire d'un chien, la mesure et l'élimination des adversaires : exemples paraboliques d'obstacles médiateurs entre soi et l'être aimé, c'est-à-dire ajustement entre deux estimes d'image, celle de soi laissée au départ et celle à se forger dans le retour pour que le passage de l'une à l'autre soit comme invisible — regarde, malgré le temps passé-perdu à ne pas être ensemble et la mémoire incommune des choses faites séparément, c'est bien le moi que tu connais qui reviens... Le tri et le rangement des affaires du voyage, la bonne odeur d'une lessive qui sèche dans le vent, la première séance au centre de sport — seul lieu où achever décemment Ravel — m'occupent jusqu'à l'heure de prendre le train de Tokyo et retrouver T. « Procédant à mains nues, on lui scie la boîte crânienne pour en isoler le volet frontal droit qu'on retire, puis on ouvre transversalement la dure-mère afin d'examiner comment ça se passe à l'intérieur. On tombe sur un cerveau légèrement affaissé à gauche mais plutôt normal, sans aspect de ramollissement particulier même si les circonvolutions, pas trop atrophiées non plus, sont séparées par de l'œdème. Ne découvrant aucune tumeur, on ponctionne la corne ventriculaire pour en faire sortir un peu de liquide, celui-ci n'apparaissant que si l'on presse la zone considérée. On y injecte un peu d'eau plusieurs fois dans l'espoir d'une dilatation : le cerveau se gonfle mais se dégonfle aussitôt, l'atrophie cérébrale paraît irréversible, bref on n'est pas très avancé.» (Jean Échenoz, Ravel, p. 122-123) Tout le monde a lu ou entendu de ces journalistes altiers (tel Claude Imbert dans Le Point), munis d'une balance étalon qu'ils croient parfaite même par gros temps, qui fustigent et dénigrent le pouvoir de la rue — opposé à celui des urnes, censément plus démocratique. Ils reprochent aux manifestants d'être victimes d'instincts grégaires ou de pulsions festives ou destructices, toujours stupides, déballant à démontrer cela leur psychologie à trois francs. Pour ma part, je crois que les populations qui s'activent actuellement contre une méthode de gouvernement à la hussarde (on connaît les propos écrits d'un de Villepin comparant la France à une fille à prendre par surprise et rapidement) sont intelligentes — et résignées à faire ce qu'elles font. Car il y a déjà eu deux élections et un référendum dont les résultats ont été anticonstitutionnellement zappés par ces gouvernants, fort peu démocrates pour donner des leçons... Z'avez vu ? J'étais pas trop branché, depuis un mois... Et quand même, j'avais bon, pour le Prix du livre France Culture / Télérama. Bégaudeau a été un des seuls que j'ai commenté pendant tout ce temps ! Je viens d'enregistrer l'émission des Matins de FC du 16 avec lui. Et déjà mes yeux se ferment (décalage horaire). Alors, pour ne pas avoir un cerveau comme celui de Ravel qui dormait si peu et si mal... |
Lundi 20 mars 2006. Traquer les coquilles. Être enfin où je devais, où T. court contre la montre à traquer les coquilles, que ce soit pour faire tourner l'imprimante, mitonner une ratatouille ou faire la vaisselle... Je ne sors que pour acheter les légumes. Repos des voyages, aussi. En même temps, rattrapage de programmes de France Culture : Mardis littéraires du 7 mars avec Pierre Bergounioux (pour Carnet de notes), puis Vive le père Jarry ! selon Patrick Besnier, Des mots et des mythes (Tire ta langue, respectivement des 16 février et 2 mars), le dernier Vendredi de la philosophie consacré aux Lettres persanes de Montesquieu. Un peu de France Info, ça oscille péniblement entre ultimatum et pourrissement... Laissons mijoter. Un peu de courrier, mais il y en a tellement à classer que je remets à demain. Et inclure janvier dans l'index des noms propres du JLR. « Quel Paradis, interrogea Kotter. Vous, dit Breughel. Ceux qui vous envoient. Ah, dit Kotter. C'est comme ça que. Oui, dit Breughel. L'appellation a été inventée par Machado. Nous ne parlions jamais ouvertement de vous, même à voix basse. Vous savez bien qu'il y a toujours une oreille non bienveillante qui traîne derrière les murs. Une intelligence hostile. Exact, approuva Kotter. Il faut crypter. Nous disions aussi le Parti, continua Breughel. Après tout, nous étions une espèce de cellule dissidente. Cela donnait une fausse dimension politique à notre histoire. Des harmoniques gauchistes vibraient autour de nous comme un halo. Une cellule dissidente, des anges, maugréa Kotter. Oh, des anges mineurs, dit Breughel. Qui redoutaient de se faire exécuter au rasoir ou au plomb avant d'avoir pu goûter à ce qui.» (Antoine Volodine, Le Port intérieur, Paris : Éditions de Minuit, 1995, p. 11-12) Ça commence très fort. Plutôt, ça commençait très fort... Dans la perspective de lire Bardo or not Bardo et Nos Animaux préférés, il vaut mieux articuler l'historicité d'une écriture, surtout quand l'auteur revendique cette historicité aux niveaux narratif (« anges mineurs » deviendra un de ses titres) et sous-jacent (récurrence d'auteurs fictifs). Le ton, comme ça, tout de suite, on pense à Koltès et Échenoz. Non pour lui enlever son ton propre, son originalité, mais parce qu'un lecteur n'est jamais vierge de mémoire. Et qu'aucun auteur, fût-il génial et cela lui déplût-il, n'arrive littérairement de nulle part... Vite, j'y retourne. Commentaires1. Le mardi 21 mars 2006 à 01:08, par Plume salée : Ce soir, Delphine la fée mon éditrice doit me passer Ravel, une merveille d'après elle et d'après vous. Vous verrez qu'en bonne compagnie de Comment faire l'amour avec un nègre…… vous allez rire… sans vous fatiguer. Bonne lecture et merci de votre visite à Plume salée et au Grand Bé. 2. Le mardi 21 mars 2006 à 03:02, par Berlol : Oh oui, bon Ravel, Karine ! |
Mardi 21 mars 2006. Pipole d'une nouvelle niche. Printemps (au) chaud... Grâce à JFM qui m'alerte par courriel (alors même que je venais de lire avec intérêt ses remarques truffaldo-godardiennes), je rejoins la (Radio) Suisse pour deux émissions consacrées à Claude Simon, l'une du 1er mars avec Alastair Duncan pour l'édition Pléiade, l'autre du 25 février faite d'une sélection d'entretiens. Dans cette même série, l'Horloge de sable, l'émission du 11 mars est consacrée à Michel Butor. Côté web, puisque je reste à la maison (ne sors brièvement comme hier que pour quelques comestibles et le soir, sur le balcon, pour arroser les plantes), je reprends mes abonnements Bloglines, délaissés près d'un mois, puis me laisse glisser sur des chemins exploratoires. Ils me mènent notamment chez Plume salée qui blogue pour (chez ?) Arte (TV, cette fois). Je découvre par la suite qu'en silence on commence à (essayer de) vendre des programmes télévisés par téléchargement. Sur France 2, France 3, Arte... Où encore ? Resterait à essayer... À la fois pour voir fonctionner le système, tester la qualité du service et du produit livré, me demander comment je stockerais ce que j'achèterais (par exemple Atlantic City, film de Louis Malle, 1980, 104 min., 1,12 Go), si c'était possible. Pas sur Arte, en tout cas : l'accès n'est que pour 48 heures et rien ne permet le stockage. Et puis c'est tellement compliqué ! Ça sent fort l'usine à gaz... Pas sur France 2 ou 3 non plus puisque — vous, je ne sais pas, si vous êtes en France, mais moi — quand je clique, je reçois une page qui me dit que : « En fonction des accords négociés avec nos partenaires, ce service est exclusivement ouvert aux résidents de la France Métropolitaine et des DOM TOM.» Je sens que ça va être bien, l'avenir... Une belle recension de graphismes japonais chez Étienne Mineur. Et pas que du contemporain... En revanche (c'est moi qui fais un rapport design et actu entre les deux), j'ai bien épluché le Netizen de papier acheté en France, le numéro 1, et je ne pense vraiment pas nécessaire de m'y abonner. C'est de la presse pipole d'une nouvelle niche. À part peut-être pour des trucs techniques (que je pourrais sans doute trouver ailleurs), je ne pense pas en avoir besoin. De plus, dès le n°3, on annonce parler moins des blogs pour aller voir du côté... de la télé. Comme c'est original ! Allez savoir pourquoi... Et ce n'est pas la permanente et grise autopromo du blog de Netizen qui me fera changer d'avis. Ou : quand les blogs (soi-disant) pro contreproduisent... Change de ton ! « Le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie n'avait pas tenu compte de l'émotivité de Slobodan Milosevic.» — Je me suis étranglé de rire, avec cette brève du numéro 1 du Tigre. Ah !, si quelqu'un pouvait me l'aller quérir, celui-là !... comme je lui en saurais gré ! Commentaires1. Le mercredi 22 mars 2006 à 00:14, par Manu : J'ai eu le même problème quand j'ai voulu regarder
Roland Garros en 2005 (ou était-ce déjà le cas en 2004
?): offre réservée à la France. Le filtrage se faisant
sans doute sur l'IP, un moyen de contournement serait de se connecter au
serveur avec une adresse française... |
Mercredi 22 mars 2006. De la custode comme du guépin. Après la journée de l'eau j'ai pris un bain plutôt qu'une douche pour aller au supermarché il fallait un parapluie ce soir Kagurazaka scintillait ailleurs je ne sais pas Déjà 23 heures. J'ai l'impression que je viens de me lever, pourtant c'était à 7h30. Sans doute est-ce l'effet de la familiarité des lieux et des choses. Et du contraste avec avant. Pendant un mois hors de mes pénates (adoptives, forcément) à découvrir et réfléchir sans arrêt au sujet de tout, lieux, objets, personnes, tant la province française m'est inconnue, avec aussi des responsabilités, rien de tout cela ne m'étant familier, le temps paraissait long chaque jour. Et courtes les nuits. Même si dans mes dernières heures orléanaises j'avais déjà l'impression, par accumulation rétrospective, que tout cela s'était déroulé au pas de charge — alors que j'avais quand même passé trois jours malade comme un cochon (c'est malade, un cochon ? D'où ça vient, cette expression ?). Pourrait-on en déduire qu'un temps qui passe lentement dans un sens repasse beaucoup plus vite dans l'autre ?... Pour sûr, le vécu et sa mémoire ne sont pas de même essence. Et ce n'est pas tout de l'avoir lu chez Proust : tant qu'on ne l'a pas vécu, on n'en sait rien. Bref, to make a long story short, comme on dit Outre-Manche (alors que bref est bien plus bref...), le temps, c'est n'importe quoi. Non content de n'être mathématiquement pas linéaire, ni circulaire comme sur ma montre, sa perception par les humains est une des choses les plus ahurissantes qui soient. Pire que l'espace, je crois. Par exemple, cet après-midi, écoutant TéléramaRadio, je vérifiai avec T. la numérotation des notices de son très long catalogue de Mazarinades de la collection de l'université de Tokyo dont on venait d'achever sur deux imprimantes les tirages d'un millier de pages en cinq exemplaires pour pouvoir enfin en tasser les piles avant reliure. Éh bien, j'avais entre les mains des références dont on avait parlé ensemble il y a 8 ou 9 ans, puis plus jamais depuis, et je m'en souviens très bien — de la custode comme du guépin (tiens, j'ai oublié de demander ça, aux orléanais...). Alors que je serais tout à fait incapable de dire où nous parlions de cela, si nous étions à Tokyo ou à Paris, si c'était un jour d'hiver ou d'été... « Par exemple, quand j'étais étendu près des bouteilles de gaz, dévoré de piqûres, et que j'examinais les blattes gigantesques qui trottinaient en direction du restaurant, enviant l'insouciance et l'opacité intellectuelle des blattes, une femme du bidonville approchait, qui possédait une physionomie hâlée de déesse, splendidement ovale et lisse, éclairée par des yeux très noirs, des yeux au dessin mongol, à peine relevés vers les tempes. Elle longeait l'appentis, elle foulait les herbes qui délimitaient mon périmètre vital, puis elle s'engageait sur la planche qui conduisait à la maison voisine et, sans se soucier de moi, face aux ténèbres, elle rotait.» (Antoine Volodine, Le Port intérieur, p. 42-43) Commentaires1. Le jeudi 23 mars 2006 à 00:54, par Manu : C'est bizarre que tu aies trouvé le temps long alors
que tu étais occupé ! Pour moi, c'est généralement
le contraire. C'est peut-être surtout parce que tu avais hâte
de retrouver T. et le Japon, non ? (comme tes commentateurs d'ailleurs, qui
ont quasiment déserté le JLR durant ton séjour en France...) 2. Le jeudi 23 mars 2006 à 01:37, par Berlol : Oui, ça peut paraître bizarre mais quand on
fait des choses inhabituelles dans des lieux nouveaux, cela donne énormément
de relief au temps. C'est mon impression. On ne le voit pas passer (donc,
ce n'est pas comme "trouver le temps long") mais il paraît plus volumineux
("long") au su de tout ce qu'on y a mis dedans... Tu vois ce que je veux
dire ? 3. Le jeudi 23 mars 2006 à 08:43, par grapheus tis : Berlol 4. Le jeudi 23 mars 2006 à 09:27, par Maxime : quelle drôle d'idée ce principe de symétrie
: et si on se répondait de blog à blog, et que ce qui était
aboli c'était la hiérarchie, nouveauté de pouvoir venir
se lire au jour le jour, choisir dans le bloglines les blogs en harmonie,
être à l'écoute, pas forcément laisser trace systématiquement
de son passage - donc faisons-nous signe de temps en temps, mais la singularité
du blogueur "général" (ainsi qu'il s'affiche en haut de mon
bloglines) c'est cela qu'on reçoit, à quoi on s'ouvre - je
trouve que l'exil fait partie de la tonalité de voix de berlol, ce
"parler à distance" et que l'expérience d'orléans était
curieuse en cela 5. Le jeudi 23 mars 2006 à 17:11, par Berlol : Merci, cher grapheus Tis, de nous rappeler ces vigoureuses paroles... Je savais qu'elles vous avaient marqué en leur temps. La réponse de blog à blog, cher Maxime (mais je ne vois pas l'adresse du vôtre...), est en effet une des réponses postérieure à cette interrogation de 2004, et je la trouve très bien, dans la mesure où on insère les liens physiques permettant aux lecteurs de passage, c'est le cas de le dire, de suivre les propos d'un blog à l'autre. Attention toutefois : l'idée de symétrie n'était pas pour une réponse automatique ou une équivalence volumétrique, c'était avant tout l'investissement intellectuel que l'on aurait voulu congru. En effet, comme pas mal d'autres blogueurs, j'estime investir le fruit de quelques neurones dans mes propos et j'aimerais trouver du répondant au même niveau de qualité (au moins), ce qui n'est pas toujours le cas... Depuis 2004, j'ai appris à faire confiance au silence, qu'il y a en effet un parler à distance, et je ne me formalise plus trop du peu de commentaires. Sauf certains jours, quand j'ai besoin de réconfort et que je n'ose pas le dire... 6. Le vendredi 24 mars 2006 à 00:19, par grapheus tis : Belle et sereine, la confiance au silence. |
Jeudi 23 mars 2006. Ce qui fait levier. Encore une matinée courrier et lecture de pages. Ça chauffe dans le Monolecte d'Agnès Maillard : deux nouvelles versions de La Cigale et la Fourmi. Moi, j'ai fait mon choix... Et si c'était vrai que la télé-réalité est condamnée à terme par l'assimilation des contrats des candidats à des contrats de travail... Ça pourrait nous faire des vacances sur les écrans ! Extrait d'un article d'Isabelle Roberts dans Libération d'hier. Elle interroge un avocat, Jérémie Assous : Pour changer du bureau devant lequel je risque tout de même fort de me transformer en ectoplasme, me voilà parti au centre de sport, à Shibuya. Quelle aventure ! Je pourrais aller à celui d'Iidabashi, tout près de chez moi, mais je ne me résouds pas à me passer des luxueux avantages de celui de Shibuya (pour le même prix, 620 yens) : la qualité et la diversité des machines de musculation, l'espace des bains et, bien sûr, le mist sauna... La séance de vélo est en abyme puisque je relis (pour la combientième fois ?) des pages de Molloy dont le cours à l'Institut franco-japonais commence dans deux semaines. Je n'ai pas encore arrêté la liste des passages qui seront commentés. Il y en a tellement. Il y a tellement à dire. C'est tellement difficile de délimiter. Même simplement couper pour dire on lira d'ici jusque là, c'est un crève-cœur. Je cherche des unités naturelles dans ce que Beckett a voulu dense et continu... Je vais en revenir à l'esprit zen. Le couteau du boucher qui suit la voie du Tao n'est pas couvert de sang. « Et pendant l'hiver je m'enveloppais, sous mon manteau, de bandelettes de papier journal, et je ne m'en dépouillais qu'au réveil de la terre, le vrai, en avril. Le Supplément littéraire du Times était excellent à cet effet, d'une solidité et non-porosité à toute épreuve. Les pets ne le déchiraient pas. Que voulez-vous, le gaz me sort du fondement à propos de tout et de rien, je suis donc obligé d'y faire allusion de temps en temps, malgré la répugnance que cela m'inspire. Un jour je les comptai. Trois cent quinze pets en dix-neuf heures, soit une moyenne de plus de seize pets l'heure. Après tout ce n'est pas énorme. Quatre pets tous les quarts d'heure. Ce n'est rien. Pas même un pet toutes les quatre minutes. Ce n'est pas croyable. Allons, allons, je ne suis qu'un tout petit péteur, j'ai eu tort d'en parler.» (Samuel Beckett, Molloy, Éd. Minuit, coll. Double, p. 39) Tiens, j'entends que ça bouge du côté du CPE. De Villepin digère ou régurgite ? Je me suis demandé tout à l'heure, dans le sauna, si l'on pouvait être contre le CPE & contre les blocages des facs. Après tout, pourquoi pas... Ce sont deux choses distinctes. On manifesterait dans les rues. Et on irait en cours. N'y aurait qu'à aménager les emplois du temps... La question, c'est de savoir qu'est-ce qui fait levier. Qu'est-ce qui fait qu'un gouvernement, qu'une population s'inquiète des conséquences d'un mouvement ? Quelle force ou quelle menace peut en imposer au pouvoir qui s'arroge les pleins pouvoirs ? En l'occurrence, sauf les débordements, les casseurs, les risques de décès de manifestant, ce que personne ne souhaite, sauf tout cela, donc, les manifestations, ça ne fait pas vraiment levier. Ça fait folklo. Folklo à la française. Du dérangement gazeux dans la digestion routière des villes. Des fumées, des couleurs, des chants et des bons mots. N'y manquent que les pétards (et quand ça pète, c'est trop tard). Le folklore que voient les étrangers quand ils viennent en France, quand ils voient les infos françaises depuis leur pays. Sacrés Français !... Mais les facs fermées, les semaines de cours annulées, les journées entières à détourner l'institution de sa fonction, la solidarité des enseignants qui, pour certains, ont de l'expérience dans ce domaine, la représentativité en haut lieu des présidents des universités, la dévalorisation des diplômes français : il est bien là, le levier, et pas ailleurs. Les manifestations servent à faire entendre que l'on mène une action — et il faut bien qu'il y ait cette action, sinon c'est défiler comme aller siffler sur la colline. Alors tous ceux qui voudraient les manifs sans les blocages, ils se croient dans un jeu vidéo, ils ne raisonnent pas, ils ne voient que l'invalidation possible de leur année de cours, le bout de leur nez, ils voudraient faire la grève pour du beurre et que le gouvernement ait peur pour de vrai — ce sont encore des enfants qui croient au Père Noël, que le CPE ne passera pas par eux. Et je ne parle même pas des pro-CPE... Je vais couper France Info dans quelques minutes, pour aller me coucher. Au ton, il y a deux épopées en parallèle, comme tressées par les heures, l'une en fanfare, la manifestation qui a commencé à Paris, énorme, avec des étudiants venus de nombreuses villes de province, bien organisée, dit-on, et ces groupes de casseurs qui bourdonnent autour en attendant leur heure, l'autre en sourdine, la perplexité de ceux qui ont reçu le pet, non... le pli du Premier Ministre qui veut devenir Empereur, un pli pas plus franc qu'un billet de jésuite, et qui se demandent ce que ça veut dire, dans quel sens tourne le vent... Commentaires1. Le jeudi 23 mars 2006 à 12:53, par arte : 2. Le jeudi 23 mars 2006 à 17:45, par Berlol : Bonne adresse ! Merci. |
Vendredi 24 mars 2006. Ficelage rapide. Pour tout savoir sur le Japon technologiquement coincé entre recyclage et sécurité. Devant finir aujourd'hui de rattraper mon retard en actu française, je vais me remettre bientôt à l'actu japonaise... dans le temps que me laissent mes préparations de cours. Il ne fait pas spécialement beau ; ceci dit, T. et moi n'en avons cure, concentrés que nous sommes sur nos travaux et écrans. Seillière est un boulet. « BRUXELLES (AP) — "Je vais parler en anglais, la langue de l'entreprise", a déclaré le Français, invité à s'exprimer devant le conseil européen en tant que président de l'Union des industries de la communauté européenne (Unice). Ancien président du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), Ernest-Antoine Seillière dirige depuis l'an dernier le patronat européen. A ces mots, le président français s'est levé et a quitté la salle en compagnie des ministres Thierry Breton (Economie) et Philippe Douste-Blazy (Affaires étrangères). AP » « Le forcené de Matignon » : excellente une de Libération de mercredi ! Je me la répète plusieurs fois par jour, tellement elle est bonne. Désolé... L'émission Mots croisés du 20 février, animée par Yves Calvi, m'a paru plus intéressante que l'édition d'À vous de juger du 16 mars. Cela tenait autant à la façon de construire le plateau qu'à la personnalité des invités. Les meilleurs moments furent les prises de parole de Maïté Lassalle (de 27:38 à 31:12) et de Louis Chauvel (de 47:28 à 54:38), surtout quand ce dernier donne des chiffres sur trente ou quarante ans en finissant par dire que « les jeunes sont jeunes de plus en plus vieux et qu'en même temps les vieux sont vieux de plus en plus jeunes » (vers 53:50). Superbe formule qui n'est pas une boutade, qui signifie que les jeunes sont précarisés jusqu'à un âge avancé et ne peuvent concrètement pas se construire une vie d'adulte (ou ce que cela veut dire pour une majorité de la population : maison, enfants, crédits) tandis que les seniors sont de plus en plus tôt remerciés pour leurs supposées moindres productivité et flexibilité, et surtout du fait de la cherté de leur ancienneté dans l'entreprise... Le même animateur, avec la même finesse (choix des interlocuteurs, menée du débat), reprenait le même sujet le 20 mars dans C dans l'air (France 5). Les interventions de Roland Cayrol y étaient spécialement décapantes. Et puisqu'il est rare que je fasse un lien chez Assouline (qui est aussi, à sa façon, un boulet), autant que j'en fasse tout de suite un second. Dans les Salons littéraires sont dans l'internet (PUF, 2002 — le site des PUF est en rade, on dirait...), j'affirmai ma conviction que, linguistiquement parlant, la France devait faire partie de la Francophonie (ce qui n'est le cas que d'un strict point de vue institutionnel) et notamment que la littérature dite francophone devait inclure, contenir par principe la littérature dite française, dans un grand ensemble de littérature de langue française. C'est ce point de vue que défend Pierre Assouline, excédé de voir les ghettos éditoriaux et salonniers où l'on accote auteurs dits des Caraïbes, d'Afrique, voire du Québec, de Suisse ou de Belgique (etc.) sans que jamais ou presque des auteurs dits de France ne soient présents, ces derniers étant (restant) entre eux ailleurs. Bien sûr, il faut que les origines géographiques ou culturelles soient mises en valeur pour les auteurs qui le souhaitent, ou au cas par cas. Mais l'actuelle dichotomie entre Hexagone et Reste du monde francophone amalgamé sent très fort le résidu colonial, d'autant plus pernicieuse qu'elle est banalisée, voire montée en crème pour une discrimination positive assurément catastrophique. C'est aussi parce qu'aucun artiste ou auteur français n'était jamais invité au même titre que les autres (d'Afrique, d'Amérique, etc.) que je me suis désolidarisé clairement et depuis longtemps des programmes dits de promotion de la Francophonie organisés au Japon. Voilà, c'est dit. Étonnement. Je n'avais pas parlé de francophonie, comme ça, avec quelqu'un depuis des mois et, étant allé en fin d'après-midi à la médiathèque de l'Institut franco-japonais, où je lisais l'interview de Julia Kristeva dans Art Press (mmm...), je tombe sur Luis Solo Martinel qui entame avec moi une discussion sur... la francophonie. Et nous sommes du même avis. Puis autour d'un café, au rez-de-chaussée, nous nous apitoyons sur nos piètres progrès en japonais... Encore une fois, ces propos quotidiens ne sont qu'un ficelage rapide de ce que je veux garder comme aide-mémoire des jours qui (me) passent, plus spécialement, mais pas exclusivement, dans mon rapport à la littérature, donné à lire dans un réticule de plus en plus monstrueux au sein duquel se trouvent assurément des oreilles et des yeux connivents, qu'ils soient ou ne soient pas d'accord avec tel ou tel point. Ces cinq notions de ficelage, aide-mémoire, littérature, réticule et connivence définissent ensemble mon projet continu de JLR — qui ne prétend pas être une œuvre littéraire. Je le précise puisqu'il y a de temps en temps de nouveaux lecteurs qui (s)(m)(')interrogent (sur) mes motivations — certains assidus ayant sans doute compris cela depuis longtemps. |
Samedi 25 mars 2006. L'EHESS aujourd'hui. Voilà ce qu'il en reste, de l'EHESS... Suis sans voix. En même temps, on voit sur ces photos qu'il n'y a pas eu de volonté de saccage systématique car en plusieurs jours d'occupation il y aurait largement le temps de réduire en confettis et en gravats tous les contenus de tous les bureaux. Or il n'en est rien, on voit sur les étagères que la plupart des classeurs et des dossiers sont en place, les meubles ne sont pas démembrés, ni les vitres brisées... Alors, une occupation festive, je-m'en-foutiste, répréhensible, oui, bien évidemment, mais pas barbare. Ça, c'était le matin. Par la suite, on peut lire ceci. Également à lire sur les violences, place des Invalides (et le kaléidoscope des commentaires). Pour le forcené de Matignon, j'ai consulté mon index et constaté qu'il ne m'a jamais illusionné. Un texte comme celui-ci, du 13 avril 2005, contient déjà toute la morgue et la raideur antidémocratique du type. Si on prend un peu de recul sur tout ça, on se dit : c'est pas possible, on n'est pas en 2006 dans un pays civilisé ! Réveillez-moi... Ici, c'est infiniment plus calme. Encore qu'il a fallu se bouger. Vers midi, T. et moi corrigions encore quelques ultimes coquilles d'une énième lecture de sa thèse, puis on a enfourné tout ça (thèse en japonais + catalogues raisonnés en mixte de français et japonais) dans une grande valise que j'ai pesée (30 kilos dont 6 de la valise elle-même). Un taxi nous a pris devant la maison à 13 heures et nous avons filé sur Komaba où il fallait déposer les volumes à la boutique de photocopies-reliures avant 14 heures. Mission accomplie. La suite mercredi prochain, quand il faudra déposer le tout officiellement à l'université de Tokyo (j'y serai à titre de manutentionnaire). Libérés, légers, marchant dans les rues vers Shibuya, nos yeux se sont enfin ouverts sur la nature environnante, bourgeonnante. Des effluves végétales nous parvenaient en même temps que nous constations, encore incrédules, la cause des sourires des passants : pruniers et cerisiers sont en fleur, les premiers plus avancés que les seconds. Après un rapide déjeuner au vietnamien de Sept Anges (Seibu), nous avons marché vers Harajuku, horriblement peuplé — nous nous découvrions également samedi — puis plus tranquillement vers Shinjuku, le long du parc d'où sortaient des flots de drogués hanamiques, enfin dans la direction d'Ichigaya par Akebonobashi... Ce qui faisait déjà 7 ou 8 kilomètres — et près d'une heure et demie de marche et de grand air — quand j'ai proposé à T. qui fatiguait (et dont c'était la première balade depuis... près de deux mois) de finir les deux derniers kilomètres en taxi. Commentaires1. Le vendredi 24 mars 2006 à 23:02, par caroline : On ne peux, à aucun moment, penser que ce sont les étudiants qui ont fait ça. Qui sont ces casseurs ? Ce qui est sûr, et plusieurs témoignages se recoupent, c'est que lorsque des casseurs s'en mêlent, la police n'intervient pas ou du moins, tarde à le faire. Comme si, le fait que ça dégénère, permettrait de clore le mouvement dans un pourrissement de la situation. Un moyen comme un autre de sortir de la crise. Bien triste constat. 2. Le samedi 25 mars 2006 à 02:03, par Berlol : Triste, certes. A mon avis, quelqu'un de l'intérieur a dû les rencarder... Ce n'est pas un endroit où l'on pense tout de suite à aller pour une réunion... 3. Le samedi 25 mars 2006 à 10:45, par janu : Se voulant subversive aussi, je crois, l'occupation : il y a des traces résiduelles de références ("La valeur d'usage de la marchandise est le soumission"). Pas sûr qu'ils soient tombés là tout à fait par hasard. 4. Le dimanche 26 mars 2006 à 06:17, par dabichan : À T. 5. Le dimanche 26 mars 2006 à 06:22, par Berlol : Merci pour elle et à demain ! Trackbacks1. Le dimanche 26 mars 2006 à 01:16, de Actualités de la recherche en histoire visuelle
2. Le samedi 1 avril 2006 à 02:35, de Actualités de la recherche en histoire visuelle
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Dimanche 26 mars 2006. Filles crades et fades. Les amateurs de rythme s'en réjouiront, c'est le retour des séances dominicales de ping-pong. D'entrée de jeu, je mets la reine Hisae en danger et lui prends une manche 11-4. Par la suite, je perdrai tout mais elle assurera tout de même mieux contre Katsunori que contre moi, alors que Katsunori me battra à chaque fois à plate couture. C'est dû aux styles de jeu, qui défient la simple logique des chiffres. Déjeunons au restaurant de hamburgers (frais) Kua Aina. Dans la mesure où l'avocat qui glisse entre la tomate et la viande nous en laisse le loisir, discussion sur Orléans — photos dans l'appareil à l'appui — puis sur la littérature japonaise... Ah oui, je sais pourquoi ! Une des étudiantes du stage d'Orléans ressemble (très vaguement) à T., ce qui m'avait fait penser à l'inquiétante étrangeté d'une similitude dans Chevaux échappés de Yukio Mishima : quand le héros principal, si je me souviens bien, rencontre un jeune homme qui ressemble à s'y méprendre à feu celui qu'il a connu vingt ans auparavant, jusqu'aux trois grains de beauté sous l'aisselle... Je parle aussi d'Abe Kobo, qu'Hisae ne connaît pas, mais Katsunori oui — il lui prêtera L'Homme-boîte, s'il n'oublie pas... Je retrouve OAM, récent citoyen de Tsukuba après deux ans d'exil belge. Traversons le carrefour de Shibuya et apercevons un présentateur télé qui se dirige, avec cameraman et perchiste, vers un groupe de ganguros gloussantes et dansantes (bonjour la mise en scène !...). Les badauds s'attroupent. J'en fais quelques photos à la va-vite, mais le sujet ne me passionne pas. Au fond, ces filles crades et fades qui font n'importe quoi pour des fringues et des sacs de grandes marques m'indiffèrent profondément, surtout après un mois de fréquentation quotidienne d'étudiantes studieuses. Le soir, T. me dira que ce présentateur d'émissions aussi tardives que salaces était autrefois metteur en scène de films pornos. Peut-être qu'un de ces soirs, au détour d'un zapping tardif, j'apercevrai ce dont retournait tout cela — et s'il les a emmenées à Dogenzaka... Je prends un café pendant qu'OAM déjeunant me livre ses nouvelles convictions par rapport au 11 Septembre, qui aurait été entièrement orchestré par le clan Bush ou la CIA, ou le lobby du pétrole (que l'on soupçonne déjà d'être à l'origine de l'assassinat de JFK). Ça me rappelle Capricorn One... Au Tower Records, achat de Monsieur Gainsbourg Revisited et du Monsters in Love de Dionysos. Histoire de me remettre un peu dans la pop... Commentaires1. Le dimanche 26 mars 2006 à 17:22, par Manu : En termes mathématiques, je crois que cela revient
à dire que l'ensemble des pongistes n'est pas ordonné... 2. Le dimanche 26 mars 2006 à 19:29, par Olivier : Petit rectificatif sur la conversation d'hier avec Berlol:
mes convictions ne sont pas "nouvelles", certaines choses m'ont troublé
dès le départ dans toute cette histoire! Mais, jusqu'à
présent je n'avais jamais pensé que Bush avait tout orchestré,
au pire laissé faire pour avoir un bon prétexte de partir en
Irak... Sur Yahoo.fr, ont été mis en ligne deux documentaires
(qui portent le même nom et sont réalisés par le même
jeune homme à partir de documents disponibles autour du 9/11) qui reprennent
des éléments étrangements laissés de côté
une fois que la thèse ultra-patriotique américaine s'est mise
en place!! D'ailleurs, beaucoup de documents télé ne nous sont
jamais parvenus en Europe, les journalistes "d'investigation" semblant ne
pas avoir beaucoup "investigué"... Je recommande à tous d'aller
voir ces vidéos (on ne sait jamais combien de temps elles vont pouvoir
rester en ligne!!). Les documentaires s'appellent "Loose change" et sont
réalisés par Dylan Avery! 3. Le dimanche 26 mars 2006 à 23:30, par Berlol : Olivier, merci des précisions. Les vidéos de Dylan Avery se trouvent ici ou là. Quant aux Scholars for 9/11 Truth, il y a plusieurs adresses donnant plus ou moins les mêmes pages. Enfin, pour Thierry Meyssan, voir ici. Tout cela est très troublant et a, hélas, de fortes probabilités d'être vrai. Je dis hélas parce qu'il est toujours plus simple que les terroristes soient de l'extérieur... Pour tous, il est aussi plus facile de CROIRE à la version officielle, non ? Un peu comme une religion dont on aurait produit la révélation, quelle que soit la vérité... 4. Le lundi 27 mars 2006 à 03:11, par cécile : "La croisade des camelots. Ou les aventures financières
et bien peu recommandables de Georges Bush et de ses compagnons", Christophe
Grauwin, Fayard, 2004. 5. Le lundi 27 mars 2006 à 05:33, par Manu : La vérité, c'est bien la question... A qui
faire confiance ? Ces gens ne sont peut-être pas complètement
objectifs non plus... 6. Le mardi 28 mars 2006 à 00:57, par Dom : ! 7. Le mardi 28 mars 2006 à 01:14, par Berlol : Qu'est-ce qui t'étonne, Dom ? Les disques que j'ai achetés ? 8. Le mardi 28 mars 2006 à 02:26, par Dom : L'accès aigu de complotite. !. 9. Le mardi 28 mars 2006 à 03:22, par Berlol : Je m'en doutais... T'as vu la vidéo ? Ça fait réfléchir, dis. |
Lundi 27 mars 2006. Une autre planète (surtout
si on n'y était pas). Allez, au charbon ! Je viens de passer deux heures délicieuses à lire... Je dirai quoi. Du coup, je suis en retard et je mords sur ma nuit. Ce matin, dans le shinkansen, quelques pages de Molloy annotées. Ça avance, les notes. Encore une fois, je suis saisi par l'extraordinaire modernité du ton, des enchaînements. Un texte écrit à la fin des années 40, on a du mal à y croire, alors que se publiaient des romans conventionnels et surannés comme ceux d'Hervé Bazin (Vipère au poing date de 1948), Jacques Laurent (Caroline chérie démarre en 1947), Montherlant, Guy des Cars... Notons cependant que Beckett n'est pas seul sur de nouveaux chemins : Blanchot publie L'Arrêt de mort, Leiris commence La Règle du jeu (1948), Duras prépare un Barrage contre le Pacifique (1950)... Et puis entre les deux tendances, beaucoup d'auteurs tout à fait lisibles même si relativement classiques (Giono, Gracq, Mandiargues, Cendrars...), pour ne parler que de romans. En fait, je crois qu'il en va de même aujourd'hui où des inconnus inventent ce qui fera demain l'identité littéraire d'aujourd'hui alors que des Ruffin ou Delerm ne meurent pas de honte à publier leurs caduqueries. Puis déjeuner au Downey avec David, retrouvailles pour évoquer nos expériences de stage à Orléans, un an après l'autre, et ce qui s'était passé ici pendant que j'étais là-bas (presque rien), devant un hambourgeois au moins aussi frais et bon que celui d'hier. Puis dans son bureau pour parler un peu de TICE en FLE, de ce que nous pourrions faire ici, en dégustant la nouvelle Häagen Dazs à la myrtille. Après, classement de courrier papier et électronique jusqu'à l'heure de la petite cérémonie qui m'a fait quitter T. ce matin, le dîner en l'honneur d'un de nos collègues qui va partir à la retraite, dans un restaurant de fugu, juste en bas de chez moi (pratique pour rentrer). Là aussi, ambiance bon enfant largement alimentée d'anecdotes orléanaises. C'est en rentrant que je trouverai des messages à modérer pour Litor, dont un du Centre Flaubert de l'Université de Rouen qui m'occupera passionnément deux heures de suite — et où je replongerai demain : la réception contemporaine de L'Éducation sentimentale, soit vingt-deux articles de 1869-1870 qui radiographient comment on lisait le nouveau livre de Flaubert. On y apprend d'autres choses aussi, par exemple ce sentiment je crois répandu alors que vingt ans avant paraissait déjà être du passé lointain. Nos radio, cinéma et télévision, ainsi que l'espérance de vie, ont radicalement modifié cette perception. Nous n'avons pas, je crois, le sentiment que 1986 soit très loin de nous. Pour 1946, là, c'est vrai : 60 ans en arrière, c'est très loin, une autre planète (surtout si on n'y était pas). Pourtant, nous avons toutes ces images sur la Seconde Guerre mondiale et après, fixes et animées, et tous les films, feuilletons, archives radio, etc. Pour les Japonais, c'est même l'ère d'Edo qui est devenue artificiellement familière grâce à la vulgarisation télévisuelle (feuilletons quasi journaliers depuis au moins 30 ans), au risque de renforcer artificiellement le nationalisme... Car il n'est pas sûr que tout cela nous rende tous meilleurs, plus cultivés, plus intelligents et à même de profiter des erreurs du passé. Agités (projetés) en permanence devant des esprits mal préparés, ces enregistrements et ces reconstitutions (justes ou faux, c'est un autre problème) pourraient aussi être causes d'anomalies identitaires — flottement, doute, multiplication, effets d'écho ou de contraste — et à grande échelle responsables d'un malaise de civilisation encore peu aperçu. Oups. Je me suis éloigné de Flaubert. Mais on en dit toujours trop ou trop peu. « Car tout se tient, par l'opération du saint-esprit, comme on dit. Et si je n'ai pas mentionné cette circonstance à sa place, c'est qu'on ne peut pas tout mentionner à sa place, mais il faut choisir, entre les choses qui ne valent pas la peine d'être mentionnées et celles qui le valent encore moins. Car si l'on voulait tout mentionner, on n'en finirait jamais, et tout est là, finir, en finir. Oh je le sais, même en ne mentionnant que quelques-unes des circonstances en présence, on n'en finit pas davantage, je le sais, je le sais. Mais on change de merde. Et si toutes les merdes se ressemblent, ce qui n'est pas vrai, ça ne fait rien, ça fait du bien de changer de merde, d'aller dans une merde un peu plus loin, de temps en temps, de papillonner quoi, comme si l'on était éphémère.» (Samuel Beckett, Molloy, p. 54) |
Mardi 28 mars 2006. De ces dédains catastrophiques. Grand ménage. Ça remplit d'un coup le réservoir de l'aspirateur ! On ne peut pas tout mentionner, soliloquait Molloy. Ou alors, attendre le moment propice... Revenu d'Orléans, la semaine dernière, j'avais été sidéré d'apercevoir qu'à la place d'un infâme restaurant de graillon, en face de celui de fugu d'hier soir, venait de s'installer une teinturerie — précisément ce qui manquait dans ce quartier depuis que celle qui était cent mètres plus bas avait fermé l'an dernier, me laissant le choix entre aller à Yagoto en vélo, selon intempéries et temps à perdre, et... emporter mes chemises à Tokyo, ce qui était finalement le plus pratique. Y suis donc allé ce matin, déposer cinq chemises. Première mise, juste pour voir. Mais nori nashi, parce que les teintureries ont tendance à y aller fort sur l'amidon... Après le déjeuner au resto des profs avec David — qui s'est enfilé des gyozas surtout farcis à l'huile (je m'inquiète un peu pour lui ce soir) — j'ai repris le tri des courriels de février-mars (gestion toujours délicate puisque selon l'endroit où je me trouve, je reçois le courrier sur plusieurs ordinateurs, centralise le tout au bureau en gardant des copies ailleurs...). J'en ai classé la moitié en écoutant BFM (un ton qui craint, quand même) puis Europe 1 (pubeux et sirupeux), radios dont je suis allé chercher les pages puisque les radios nationales suivent le mouvement de grève. En shinkansen, résonne profond, entre les sommes... « Car en moi il y a toujours eu deux pitres, entre autres, celui qui ne demande qu'à rester là où il se trouve et celui qui s'imagine qu'il serait un peu moins mal plus loin. De sorte que j'étais toujours servi, en quelque sorte, quoi que je fisse, dans ce domaine. Et je leur cédais à tour de rôle, à ces tristes compères, pour leur permettre de comprendre leur erreur. [...] Je réfléchissais presque sans arrêt, je n'osais pas m'arrêter. C'est peut-être à cela que je devais mon innocence. Elle était un peu défraîchie et comme mangée aux bords, mais j'étais content de l'avoir, oui, assez content.» (Samuel Beckett, Molloy, p. 64-65) En ce jour anniversaire de la proclamation de la Commune de Paris (1871), je pense très fort à tous les manifestants qui, par centaines de milliers, vont encore une fois essayer de faire ployer et céder le forcené de Matignon. Je pense au temps perdu pour tous dans le seul but d'en faire reculer un seul. Je pense à ces têtes qui, faute d'avoir été coupées en leur temps, ont continué à produire de ces dédains catastrophiques. Commentaires1. Le mardi 28 mars 2006 à 17:38, par Olivier : Désolé, ce message ne concerne pas cette journée,
mais est un complément autour du 9/11: pour plus d'informations (en
anglais sans sous-titres, désolé encore), allez voir du côté
du site Agoravox.fr, où ils ont mis en ligne tout un ensemble de vidéos
(et d'articles en français) reprises autour des déclarations
de l'acteur Martin Sheen, qui abonde dans le sens des documentaires indiqués
auparavant. 2. Le mardi 28 mars 2006 à 18:02, par dabichan : À Berlol, 3. Le mercredi 29 mars 2006 à 00:21, par Dom : Rien que le fait que David Griffin soit un théologien.
Bon. Pas besoin de lire la Bible pour savoir si on croit ou non en Dieu,
non ? 4. Le mercredi 29 mars 2006 à 03:03, par Olivier : Pardonnez-moi, mais qui est David Griffin? Je n'ai pas trouvé de référence à cette personne dans les articles que j'ai lus! 5. Le mercredi 29 mars 2006 à 03:52, par Berlol : Pour Griffin, voir ici. 6. Le mercredi 29 mars 2006 à 06:42, par Dom : Oui. Je trouve le thème de la série 2 de 24
Hours quand même plus crédible : quelqu'un quelque part sait
et laisse faire parce que l'attentat le sert. Mais là, on parle bien,
il me semble, d'une véritable organisation (explosifs à la
base des tours, avertissements à tel ou tel, etc.). Et ce "coup monté",
je ne comprends pas en quoi il n'aurait pas parfaitement fonctionné.
Les objectifs ont été atteints. 7. Le mercredi 29 mars 2006 à 06:55, par Dom : Quand deux conspirationnistes se rencontrent : 8. Le mercredi 29 mars 2006 à 07:03, par Berlol : Arigato ! Je verrai ça demain. Là, c'est l'heure du dodo... Aucun complot ne me la ferait manquer ! 9. Le mercredi 29 mars 2006 à 07:07, par arte : DOM dont l'analyse du pouvoir est convaincante, donne cependant
une clef : Il faudrait pour mener un tel "complot", "que cette intelligence
existe". 10. Le mercredi 29 mars 2006 à 07:36, par Dom : Je ne crois tout simplement pas que la somme de dissimulations,
manipulations, etc. nécessaires à l'opération envisagée
soit à la portée de l'Institution militaire. Vous le croyez
mais ne le démontrez pas. Al Qaeda a beaucoup moins de faits, choses,
personnes, etc. à dissimuler ou à manipuler pour atteindre
les mêmes objectifs. L'explication courante du 9/11 continue à
me paraître plus plausible. 11. Le mercredi 29 mars 2006 à 09:00, par arte : Dom j'entends ce que vous dites, mais je ne suis pas sur
le même registre de la "croyance" ou non, en telle ou telle version.
12. Le mercredi 29 mars 2006 à 09:56, par Dom : "pour construire sa propre pensée sur l'actualité", à condition de ne pas se passer complètement d'un certain ancrage, malgré tout. L'histoire est bien une narration, pas une fiction. Enfin, à partir de là, on pourrait continuer longtemps... C'est ce même ancrage qui permet précisément de ne pas accorder beaucoup de crédit à toutes les grandes déclarations de Powell et consorts, sur lesquelles nous sommes en parfait accord. 13. Le mercredi 29 mars 2006 à 11:00, par k : ah c'est ce soir qu'on sort!!???? 14. Le mercredi 29 mars 2006 à 11:02, par k : bah ça remarche, je sais que rien à voir, mais je sais plus quand j'ai vu une coupe de cerveau et je conseille juste une visite sur le site de la specola à florence, une merveille 15. Le mercredi 29 mars 2006 à 18:20, par Olivier : Questions pour Dom: 16. Le mercredi 29 mars 2006 à 22:36, par Dom : Je pense, pour conclure en ce qui me concerne (on ne va pas refaire tout le débat ici), qu'ils (Bush et consorts) cherchent probablement à cacher des événements et informations peu glorieux, qu'il est très possible, comme je l'ai dit, que les attentats aient été prévisibles, voire même connus (ce serait un conspirationnisme minimal, qui me paraît encore plausible sinon vraisemblable), et que les efforts faits à cette fin (qui peuvent passer par des vidéos bidonnées, etc.) sont pain bénit pour les conspirationnistes, qui délirent joyeusement à partir de là. Je m'en tiens là, qui au vu des éléments apportés par l'explication ordinaire, me paraît la position la plus raisonnable. 17. Le jeudi 30 mars 2006 à 18:27, par Manu : Ah, si Al Gore avait été élu... |
Mercredi 29 mars 2006. Où froisser les emballages
dérange. les cerisiers sont mûrs je répète les cerisiers sont mûrs à cœur joie jour à marquer graver tatouer teindre ou quoi d'une croix d'une pierre d'une fleur tout ce qu'on voudra Vers midi, T. et moi allons chercher les 5 exemplaires de sa thèse en 4 volumes à la boutique de photocopie-reliure, tout près de l'Université de Tokyo, campus de Komaba. Bien emballés par le patron, nous les empilons dans la grande valise, qui pèse ainsi 36 kilos (dont 6 de tare). Soit 6 kg la thèse. Je suis là pour rouler la valise, alors je la roule, même dans les allées inégales du campus. D'abord jusqu'au restaurant Lever son verre où nous déjeunons honorablement (saluant HC, un ami philosophe à qui nous jugeons bon de préciser que nous ne revenons pas de voyage...). Puis apposition du sceau du directeur de thèse, qui a son bureau, comme les autres du département, tout en haut d'un grand bâtiment dernier cri qui n'était pas construit la dernière fois que je suis venu sur ce campus. Puis on redescend pour dépôt officiel à l'administration des études — lieu solennel où froisser les emballages dérange, mais on s'en donne à cœur joie, comme à se délivrer d'un nouveau-né resté dix ans à engraisser... Légèreté ensuite. Mais ne pas en faire trop. On rentre à la maison. Zen (inné) avec un peu de musique. Et lectures tous webazimuts, dont Philippe De Jonckheere au Salon du livre, le 22, enfin en ligne — qui est plutôt à écouter (quand ça marche, Ô surprise !). Pour Cécile. Puisqu'il en a été question récemment entre nous et si elle ne l'a pas encore trouvé, ce très beau travail de Bartlebooth (que je salue au passage) sur Jean-Pierre Brisset. Pour David. Ai retrouvé l'adresse du nouveau forum plurilingue de l'Union Européenne, consacré en principe à l'avenir. Ouvert depuis lundi. Pour tous, à condition d'avoir du temps : les Archives audiovisuelles de la recherche en sciences humaines et sociales. Une caverne alibabesque d'où vous risquez de ne jamais ressortir (n'est-ce pas ce qu'il y a de mieux à (se) souhaiter, au fond ?). Pendant qu'il est encore aux frais du contribuable, le forcené de Matignon pourrait s'y instruire de la protection sociale et [des] politiques de l'emploi, par exemple. Ou des contre-performances surprenantes du CPE. Comme quoi, tout cela n'a vraiment pas été préparé sérieusement. Et Inner Bower, alors ? Depuis la victoire de Shizuka Arakawa en patinage artistique, le Japon bruisse de ces quelques sons on ne sait d'où sortis, répétés à l'envi par les commentateurs sportifs : イナバウアー. Même Hisae s'en amusait, dimanche. Et tout le monde de s'interroger sur sens et origine de cette expression. Nous, ignares étrangers au Japon, en bons habitués des transcriptions de l'anglais, fonçons sur la version Inner Bower, un truc quelconque (bower) intérieur (inner)... Mais des Japonais aussi, qui cherchent logiquement ce que serait l'outer bower... La solution est allemande puisqu'il s'agit du nom de la personne, Ina Bauer, qui a inventé cette figure, ou attitude en patins. La vérité, y'a qu'ça d'vrai ! Commentaires1. Le mercredi 29 mars 2006 à 16:44, par Manu : Dire que j'ai hésité entre 30 et 36 kilos pour
le poids du bébé (private joke) ; c'était donc la tare. 2. Le mercredi 29 mars 2006 à 20:26, par vinteix : Tadaima. Rien à voir avec "la choucroute du jour", mais cette histoire de kilos me fait penser à celle des pesées de bagages à Roissy évoquée quelques jours plus tôt... et c'est encore pire quand on arrive au "vieux Roissy" qui est l'aéroport le plus mal foutu que j'avais jamais vu : on ne comprend rien du tout à la signalétique, les ascenseurs entre les étages fonctionnent plus ou moins bien, les services (bars, internet, etc.) sont minables, les sols sont dégueulasses... oui, vraiment on se croirait dans un "pays sous-développé" ! Ah, la vieille France va mal en ce moment ! 3. Le samedi 1 avril 2006 à 00:47, par Philippe De Jonckheere : "Enfin à jour", "enfin à jour", tss on fait
ce qu'on peut. Et on peut peu. Parfois. N'empêche, c'est une drôle
d'impression de se savoir attendu à l'autre bout du vieux monde. |
Jeudi 30 mars 2006. Dénouer la situation. « Elle avait fait glisser le lance-roquettes le long de son bras, et elle s'activait à présent sur le tube, comme pour en rendre le mécanisme offensif. Sans être expert en lanceur sol-sol, Wong comprit que la petite femme cherchait à débloquer un cran de sécurité. Ses gestes manquaient de précision, elle donnait surtout l'impression de s'affoler au-dessus d'une arme dont elle ne savait pas se servir, mais Wong estima que, affolement ou pas, elle était sur le point de lui tirer dessus. Il s'ébranla pour contre-attaquer, parcourut vivement la dizaine de mètres qui les séparaient, et il la renversa d'une gifle terrible de la trompe. La petite femme vola dans les broussailles. Il ne mit même pas une seconde à la rejoindre. Il posa sa patte sur l'arme que maintenant elle avait ramassée contre sa poitrine, en travers, comme pour se protéger, mais qu'à tout instant elle pouvait décider de pointer sur lui une nouvelle fois. Il posa sa patte à la fois sur l'arme et sur sa cage thoracique. Puis, comme il fallait bien dénouer la situation, il appuya de tout son poids.» (Antoine Volodine, Nos Animaux préférés, Paris : Éditions du Seuil, 2006, p. 15) J'adore ! Légèreté (du ton), efficacité (narrative), humour du post-exotisme. Je l'avais remisé (par devers moi) pour un jour où je n'aurais pas le temps... de faire ma journée, sinon télégraphiquement : déjeuner avec Manu annulé ; j'accompagne T. au cimetière, nettoyage de concession familiale, nouvelles stelles de bois (卒塔婆, そとうば, du sanscrit stūpa) ; promenade entre cerisiers, tombes et pique-niqueurs. Frileux soleil, quand même. Pendant ce temps, nos ministres font du (mauvais) théâtre de boulevard. Piteuse engeance ! Commentaires1. Le vendredi 31 mars 2006 à 12:46, par janu : "il est temps de dénouer la situation", a ce soir dit l'empereur... |
Vendredi 31 mars 2006. Laisser des lignes où
du gros peut mordre. frisson de l'iris soleil blanchi au vent glacial cerisiers toutes fleurs dehors apogée suspendue Ô temps... Déjeuner avec Manu et balade à Akihabara pendant que T. va chez le coiffeur. Manu est en forme. Il prend le poisson, moi le poulet. Le Champ de soleil est limite monotone mais correct. On fait un peu le bilan de ses récentes recherches d'emploi... Mais au-delà de la question professionnelle (le même type d'emploi pouvant se retrouver dans tel ou tel pays), il s'agit avant tout pour lui d'une interrogation existentielle. Pour un Français travaillant dans le privé au Japon depuis quelques années, avec épouse japonaise et deux enfants, pas facile de décider s'il vaut mieux rester au Japon, quitte à ne jamais avoir les emplois correspondants à ses capacités réelles (notamment à cause de la langue) mais en bénéficiant des salaires d'ici, ou s'il est préférable d'accepter n'importe quoi (forcément plus) mal payé en France pour pouvoir donner aux enfants une éducation à la fois décente et peu onéreuse (équation difficile au Japon où une année scolaire coûte vite son million de yens — environ 7000 €). Sans compter que dans l'un ou l'autre pays, il y a toujours un des deux époux qui n'est pas chez soi... Considération qui, selon les personnes, peut ou pas avoir de l'importance. L'employeur n'allant plus par banc, il vaut mieux laisser des lignes où du gros peut mordre que de se prendre la tête sans fin sur les mouches à accrocher. On parle aussi brièvement du JLR, du 11-Septembre, d'Orléans, de l'accumulation du courrier électronique... Et de l'arrivée de Bikun que nous retrouverons au ping-pong dimanche. Dans la furie commerciale d'Akihabara, je repère un certain nombre de prix intéressants. Mais aucun signe de ralentissement ou de danger, comme si la loi qui entre en vigueur demain n'existait pas... Sauf peut-être qu'il y a beaucoup plus de duty free en rez-de-chaussée, voire sur la rue (auparavant, le rayon pour étrangers était plutôt au dernier étage et les marchands peu enclins à produire des notices en langues étrangères). Mais rien ne m'avait préparé au choc architectural. Au dernier passage, j'ai dû voir des chantiers de quelques étages, mais rien d'impressionnant. Là, je découvre — la tête très en arrière — le complexe nommé Crossfield, juste devant la gare... Visite rapide car tout n'est pas encore ouvert... et que les courants d'air y sont pénibles. Retour et photos, avec enfin une bonne lumière, d'un cerisier juste à côté de chez nous. |