Incipit d'un roman inédit de Christophe Chazelas.
Pour tout éditeur intéressé, m'écrire, je transmettrai.






Une aube orange allaitera de biais comme l'idée devenue saugrenue d'un souvenir.


(mignardise d'abord)
les vêpres d'un faune

Vois, aux abords d'un grand lac, clairsemés en des vallons fleuris, riants, certains faunes alanguis à la tombée du jour.
D'autres, groupés comme grappe de vigne sur un terre-plein, derrière le petit bosquet, un peu plus sur la gauche, autour de cette belle motte, oui, dévorent des documents anciens, menu hachés entre leurs dents câlines, mangent, scrupuleux, déchiquettent vorace, ou broutent plus sport, ou encore en prenant des pauses crânes, voyez: tiens, toi là-bas, sylvain bibliovore à la gueule peinturlurée, tu goûtes ce festin d'anthologie, hein?... ça, t'adores... ah oui! tu t'en tapes tu mords t'arraches ça gicle ça se déchire, ça fait scrouitch ça t'amuse et t'y vas de ton rictus, tu te régales, tu t'en étrangles tu t'en étouffes!... mais oui monsieur qu'elle est contente, elle jubile, c'est qu'elle aime ça, la connaissance, la bête..., tu hoquettes mais t'en reprends encore, tu te pourlèches, la petite griffe en l'air (celle que t'utilises par ailleurs comme cure-croc), allez..., et t'en descends, de la paperasse, croquis, commentaires, et t'en anéantis, du parchemin, serments, séquences, et tu tentes des acrobaties afin d'en aspirer tout le suc, vampire! et vas-y, sangsue, que t'en têtes le délicieux nectar! et les enluminures et les entêtes, ronde de parfums, sous le suçon hardi lèguent leurs encres fauves et t'impriment dans la gueule comme de petits cieux éclatants - en y regardant mieux, ce sont d'étranges saynètes contrastées, parfois rehaussées à la feuille d'or... fais voir, relève un peu cette babine, qu'on observe..., d'étranges saynètes composées de transferts mélangés, espèces de chimiscripts obtenus à partir de décors, personnages, motifs d'illustration, ornements ou morceaux de reproduction superposés, barbouillés, déteints, révélés, fixés sur le support des gencives, une humide surface accidentée passablement puante et poisseuse... mais fais voir bon sang! allez, montre à papa, fais risette, guiliguili, cheeeeese..., voilà c'est bien, garde la pause... les gencives, donc, biscornu support, surface gondolée par des racines de molaires déchaussées distordant le cortège ouvragé et fouillis des figures déformées, à la fois étirées et réduites telles d'erronées anamorphoses, comme un échafaudage d'étranges spectres hérissés très colorés, incomplets, emboîtés, torturés écartelés rabougris, exaspérés transpercés hallucinés hirsutes (tiens je reconnais les couleurs primaires d'un Ouioui compressé dans la masse, t'as bouffé Blyton, mais oui! c'est fou il s'est inséré dans une image des aventures du Docteur Festus de Rodolfe Töpffer, griffonnée noir et blanc et ici allongée comme du 16/9ème, c'est dingue, on l'y voit à dos de jument élastique, caracolant ventre à terre en direction de Mirlifis, accroché aux reins élargis de l'astronome Apogée, mon dieu, dans la continuité, voici qu'ils pénètrent à toute allure dans l'atelier pourtant déjà au grand complet de l'orientaliste des Batignolles selon Philippe Jullian!, dont le fouillis original semble t'avoir été appliqué au torchon, et en tournant bien, en guise de surenchère, on dirait même bien, mais c'est ça oui, bien sûr, que cet écheveau broussailleux s'enchevêtre un peu plus bas aux géographies emblématiques de la Carte du Tendre de Madame de Scudéry, et cette page de Clélie se confond encore au sud avec une autre planche, de bande dessinée fantastique, cette fois, si bien qu'en descendant le Fleuve Inclination, j'accède à une cité de la Nouvelle Amitié urbanisée par Schuiten et Peeters!), t'as toute une théorie irraisonnable d'ectoplasmes extasiés fragmentés éclatés éclaboussés sanglants entre les dents, tachistes, écorchés entremêlés criards semblant tous s'entrepénétrer en hurlant et ainsi singer quelqu'obscure exaction vue au Grand Guignol, cette gueule est une orgie de grotesques maculée de style rocaille fourmillant d'acteurs en équilibre gymnastique sur les tréteaux articulés des mâchoires qu'actionneraient d'invisibles machinistes au signal pressant d'un gastrique régisseur ou loyal monsieur... referme ça va comme ça... on en a assez vu... baisser de rideau, clapet, merci... et cesse aussi de grogner et puis regarde tu baves ça coule arrête ravale tu m'en fous partout c'est dégoûtant -, ensuite, tout bien léché, tu jettes, missels gutemberg, chrestomathies, poches, grimoires, épisodes à la chaîne, dits de chevalerie recopiés sur chevreau, morceaux apocryphes, partitions annotées, intégrales sur papier bible, codex calligraphiés, manuscrits refusés, inédits, s.a.s., sorties imprimante, carnets de bord, pavés, fac-similés, registres, etc., peu t'importent genre, époque, tirage, qualité et format, tu ignores cru comme millésime, tout t'est bon, curieux hédoniste glouton dédaigneux des primeurs et crudités (vraiment, que n'êtes-vous race à qui l'herbe est aliment succulent? qu'a-t-il fallut que vos naseaux fouisseurs allassent farfouiller au sein de ces hautes piles écroulées, de beaux livres qui, jadis bien ergonomiquement classés, formèrent quelque fond d'immémoriale et publique bibliothèque depuis longtemps abandonnée? c'est light, ça? frais? pas faisandé? le nom de votre nutritionniste! a-t-on déjà vu pareille facétie culinaire? ah, afin de vous sustenter, que ne préférâtes-vous de grands prés remplaçables, repoussés sitôt détruits, à ces fragiles vestiges sans retour, offerts sans espoir de secours à l'odieux saccage de votre insatiable appétit?), mais voilà on n'y peut rien, ce sont les vieilleries que vous aimez, c'est ainsi, alors adieu la diversité touchante des in-folio ici effeuillés en débris épars, sucés, tchao collections assidûment adulées (probablement acidulées) à présent chiffonnées, mordillées, agglomérées, des rangées entières d'œuvres hétéroclites homologuées par malaxure, broyées en hachis-parmentier et sa salade bouquiniste, mixées en potage au bouillon très nourrissant de littérature (certains, clairvoyants, avaient bien prémédité que tout cela n'était que de la soupe), puis recrachées en monstrueux chewing-gum tutti frutti informe jonchant le saphir des prés, observez cette boulette de déchets, voyez ce vieux papier mâché, mastiqué, ex massicoté retourné à sa pâte indistincte, toute substance absorbée, abandonné, vomi, biodégradé, il deviendra engrais, terreau, oublieux d'avoir été invite à l'éther haut, tremplin d'imaginaire, des idéaux l'aérodynamique vaisseau... (avoir si loin plané pour retomber sous le pied... et quand on pense qu'avant, ça tombait sous le sens!...) ah... écritures! matière le plus souvent boisée sur quoi se trouvait couchée une matière textuelle souvent encensée qui se voulait échappatoire insensé à la matière, à la matière vous retournez, ashes to ashes, dust to dust, et vous, les Ecritures, vous n'y échappez pas, tout pareillement êtes devenues Pourriture, toi comme tout autre, récit premier finalement rétréci, caillé, tourné, périmé, macéré, fermenté, germé, bientôt éclos, bye, Pentateuque, tables moussues de la loi, précis fondateur changé en humus fécondateur, des végétaux désormais le gluant berceau - ô feuillet, corps glorieux des bois, dire que tu promets des forêts prochaines - oh mais quand même enfin voyez ces nains de jardin! ces bêtes arrogantes au regard poupon, ces chérubins fleurant un musc presque écœurant qui paissent... rien ne les distrait de cette paisible hécatombe, leur appliqué festin au noble menu, au fumet grave d'autodafé, hélas, mythes, qu'avez-vous fait? sinon entamé Mithridate de Jean Racine (j'enrage..., race assassine!), et, ayant trouvé ça bon, croqué le reste et puis tout à la suite? (les Robâiyât d'Omar Khayyâm, Agudeza y Arte del Ingenio de Baltasar Gracián, David de Sassoun, tout le Bréviaire de Saint Orphée de Miklós Szentkuthy tel que laissé en chantier par l'auteur, l'art de l'haïkaï éphéméride pratiqué par Bashô, de Pound, l'ensemble des Cantos, chacune des veillées des Frères de Saint-Sérapion d'Hoffman, les monuments ne vous font pas peur, à vous, auditoire bien moins patient que le vizir de Sahriyár, à qui il aura suffit d'un début de soirée pour reconduire l'absolue Shéhérazade des Mille et Une Nuits de l'humanité et sitôt faire trancher son cou polyglotte) regardez-moi ça... qu'avez-vous fait sinon dévasté, dégusté, enfourné, de cette perplexité inconsciente qui vous sied, sinon consommé en toute quiétude tout cycle, tout essai, toute épopée et étude, tout sombré en l'hébétude de vos bouches obscures? - forges infernales, prognathe cloaque, glauque amphithéâtre sur les gradins duquel, bruyamment rassemblés, des nibelungen indisciplinés n'entendent que d'une oreille les scansions oratrices ici déchues, tirades ultimes d'héros moribonds mais inspirés, épiclèses ferventes et galants épithalames, des louanges épaisses, de bave empesées, des dithyrambes, ainsi que quelques homélies naufragées, tout ça qui glisse très succinctement sur la surface salivaire de l'agora buccale, au centre de cette sorte de visqueux forum où, exigeant coryphée, des thèses de doctorat, maintenant, entament une polyphonie valeureuse en laquelle chaque professorale voix semble croire qu'elle possédera tout le loisir d'exposer ici par la dialectique quelque découverte subtile et polémique mais, sa table des matières à peine annoncée, n'est déjà plus qu'écho sourd s'affalant chuinté dans le toboggan flasque de la trachée et se répercutant un peu sur les parois grasses des muqueuses (à la façon de ceux qui tombèrent inanimés dans la gadoue des tranchées de la Meuse, victimes vraies, et personnages de tristes mais édifiantes aventures présentement avidement avalées au sens propre, et dont les cris brefs aussi résonnèrent un temps) - oui, qu'avez vous fait sinon goulûment dégluti tout conte, toute nouvelle, tout roman et de beaux poèmes, ces chants minutieusement composés, bientôt physiologiquement décomposés, rongés par l'acidité de vos enzymes stomacaux? - ragoût d'élégie donne bile malade et douloureux transit, savez-vous?, ces âmes lyriques et tourmentées ayant jadis confié à la postérité bon nombre de leurs déceptions amoureuses ou métaphysiques mal digérées, ces délicatesses contrariées peuvent quant à elles tout pareillement et à leur tour mal se digérer, attention, sachez-le, ces antiques cœurs fougueux, en odes palpitantes épanchés à tout jamais, une fois virés en humeurs organiques, bouillonneront en vos intestins au rythme de la palpitation cardiaque puis vous remonteront aux joues en vapeurs passagères, symptôme de suralimentation accompagné de brûlures et ballonnement, je vous préviens, prenez garde, ouhlala toi t'as pris Du Bellay, c'est du joli, et toi tout Laforgue, c'est pas mieux... pauvres choux! -vrai, qu'avez-vous fait sinon ravagé, dissout, consumé comme feu de paille de longs discours achevés vaille que vaille, des aphorismes à dix sous patiemment grappillés à quelque vaniteux recueil, qu'un par un vous suçotez placidement comme cachou vanille sans vous soucier du temps précieux que vous y emploierez? (mais c'est vrai, plus rien ne presse) cieux, horizons de fiction, miraculeuses sources, où êtes-vous? que sont orages devenus?, éclaircies et vents fougueux des synopsis?, revenants, rixes de sioux, bêtes de village, loups-garous, nymphes de rivage, dérivant, Itxassou? où sont images?, plans tendres, flous? où sont paysages scrupuleusement décrits?, portraits, jeunes pages, fous délirants, vin, vierges et pastoureaux? où sont complexes psychologies, rondeaux priapiques, philosophiques joutes de salon bucolique, galants combats, délicieux gourmandements, sévices savoureuses, champêtres minauderies desquelles il ne vous souvient pas d'avoir été complices? il n'en reste rien, dévorés, et le petit village, oublié, voilà, tout passe... et puis voilà que vous nous crottez moult chiures composites, étrange amalgame polyphonique en quoi même Borges je crois n'oserait voir de la bibliothèque globale le saisissant raccourci, voici votre coprose poétique de Monsieur Jourdan cornu du jour... veuillez bien aller déféquer un peu plus loin par là-dessous si cela ne vous dérange pas trop... c'est cela, et puis encore, allégés, de nouveau alléchés, vous reboulotez, à la romaine allongés, vous, eh vous!, obsolète troupeau qui s'ignore légendaire, chromos surannées qui ne savez à quelle sorte de vengeance aveugle vous cédez-là, à quelle énorme métonymie (il est vrai que, de contenu, vous devenez contenant de votre mythologie une fois que vous l'avez ingurgitée), ho!!! archives!, équivoques inventions!, tristes trouvailles!, sempiternels acteurs de fables laçantes!, louches fantasmagories!, sale engeance des littéromanies!, sujets!, qui l'accord passé avec vos seigneurs parjurez!, cette façon que vous avez de remercier vos maîtres comme l'on remercie l'importun mendiant! on a du mal à croire qu'aujourd'hui vous vous retourniez ainsi aussi lâchement contre vos créateurs, vous, rejetons prodigues, parricides (vous auriez pu tirer enseignement des mésaventures d'Œdipe si n'aviez mutilé Sophocle comme Sénèque et Stace et Aristote et le Roman de Thèbes et Corneille et Dryden et Voltaire et Ducis et Chénier et le Sâr Péladan et Hugo von Hoffmannstahl et Freud et Gide et Cocteau comme Marie Delcourt comme Lévi-Strauss et même Stravinski, j'en oublie, et même les livres racine de Deleuze et Guattari, et perdu toute trace de la saga thébaine), vous qui décimez l'absolue semence qui daigna vous féconder, qui épuisez le doux miel de vos nids, raclez de ce qui vous fut langes premières la subtile essence, piétinez l'heureux décor de vos sevrages, et méprisez ce bon lait des œuvres sans quoi jamais n'auriez prospéré, n'auriez comme sus-décrit aujourd'hui tout opuscule à son tour tété, ni même à la scène aucunement été! ah... ciel! le traître qui ce mauvais coup assène! décevant bétail, scélérats, piètres quadrupèdes difficilement redressés, ci-devant vautrés par paires sur l'abstrait canapé des mécènes décédés, obscène et léthargique cheptel sans plus d'agriculteur, hungry cultes tueurs tels cheap sheeps continuellement grignotant, ah ventre t'as la dale vendale! épigrammes d'agneau, vous, types pas chics picorant sans tact de petites typochips en apéritif, satyres intacts appuyés aux aspérités des ifs, ex bouquetins personnifiés esquintant des bouquins sans arrêt, des sommets de syntaxe sans arrêtes vous dépecez et d'altières pages comme alpage pâturez, aréopage agile souffrant d'aérophagie, laids dilapidateurs, alphapage delete, ladies alphaphages! mais dites-moi, qu'est-il exactement en vous?, vous, qu'avez-vous fait de vos nounous?, poux, bêta gommeurs, faux épigones bêbêtes, gnomes mous, ah meute de biques bêtes à pis, gnous, impies sacrilèges bientôt obèses! épique faune s'élevant cent pour cent florilège (label Lettres), rebut de spicilège, tel flore et nature t'es qu'un truc moche de hippie immature camé en vert, teckel camembert basset musclé machin fermier et puis épouasse vache à fromage erreur de formatage cochon et puis aussi epsilon épuiseur, et puis encore... ,?, ... veau, na!, cancre las nabot couvée dans l'étang houh! grande opéra bouffe, mozarella di buffa du Buffon plein les dents, décimage, écrémage beurre leurre bouc avec d'un sérieux moine la mortifère pâleur boucleur de civilisation toi book destroyer catastrophe maker de l'Histoire littéraire le finisseur tarisseur de bac à annales banal serial patrimoine killer honteuse tondeuse bacchanale baphomet qui de bâfrer n'omet plante grasse kitsch fat broutator trois mauvaise kinder surprise liquidateur fiction kleener équarrisseur dangereux sot pas malin lubrique et frustre patriclan de bas étage lubrifiage non coup de torchon essuyage absorbage sopalin filouterie injuste marchandage braqueurs de bijouterie stylistique vétuste marchandise bric à brac caduques lustres excavés exquis-nécrophages oooh... grrrrr... ogres! gros pépères! bedaines jamais calées, calembredaine, alors... les mets...? impec!? hein? hé?! mecs à pets gars zoomorphes Pégases abattoir lâches ventripotents indignes récipiendaires (oh trivialité, orphique mort) blizzard tornade ouragan, nababs poilus en costume à veste droite ou raglan, qui semblez au Trivial alités jouer, mais les réponses, vous les sucrez! camembert! déjà dit, ah gent bizarre et pas sage! oubli balais effaçage! secrets agents peluches sacs à poussière, jeunots poux fiers au sang faux! déjà dit, gestapo! ho! vous! pas beaux! hue... obscurs buveurs de catéchèse avec de la cerise, ah abrasive catachrèse, tristes sires! faux, même, siroteurs de shake de phonèmes en ces verres, aaah... faunes, sauvages men, mais répondez! vous, achevage aphone et sévère! répandez-vous ailleurs qu'en ces contrées, par pitié! oh voyez le tabula rasage de cet atomique équipage versiphage! enfance sarcophage voyez... altération déperdition vous ô patine des âges au profil d'adolescence! voyez-vous? bousillage, scolaire ramassage moisson rafle élagage tonsure, noire épidémie sans faux, laborieux et inutile tableau préliminaire au ton peu sûr, et lassant, ou peu s'en faut, (calissons? zan?) ... bref, ça suffit, allez, fatigué, agissons, finissons-en... ah! vous! décharges! vide-greniers largage barges balourdage grossier, printanier grand nettoyage, bref, station de psychopompage et ettecétérage..., braf, profanation d'épitaphe ruine désolation quoi? il n'y en pas assez?, alors... et pis t'as pas fini? braf toi défabricage? tu veux qu'on t'aide? toi grande épirogénèse ouvrant béant le tombeau terminal de notre pauvre épistémé fatiguée, et le souvenir aussi, de Pompéi, sous tes cendres désormais enseveli, et toute éventualité d'émergence, de résurgence de l'Atlantide engloutie, à jamais disparue, tout enfui enfoui recouvert scellé, oh toi, saleté, contre l'angoisse de la page blanche idéale panacée, fauve enragé radical épitomé, massacrage, capitulation désespérée, bousillage, épilogue goguenard (épinard!), anéantissage saboté..., bah... sabotage!
- imbitable!
- what?
- c'est du stuc au jus d'calembour poids lourd, tes abords
- et alors so what? m'en fiche m'amuse et continue
Un de ceux-là, gorgé de signes, rassasié, musardant un peu à l'écart, près du grand lac, bientôt, lassé d'y observer l'entrelacs des cygnes, et accompagnant son geste d'un feule bâillement, s'étire puis s'étend de tout son long sur un tapis de mousse lui paressant propice, puis, paressant, le geste policé, étire exagérément des membres un rien fourchus, la main lente expérimente le moelleux de la flore, les doigts aux ongles durs, couleur de la nacre, surgissant des boucles de poil châtaigne, énervent les jeunes pousses, gratouillent la verte pelure, époussettent le green, pensant à autre chose ou bien ne pensant pas, vont voir ici et puis vont voir là. Soudain, ainsi tâtonnant, ils surprennent un exemplaire inespéré du plat convoité. Pensait-il se planquer là, l'ouvrage?, c'était raté. Pour un plat, c'est un épais rouleau de vélin, bien rebondi d'encre pleine aux allures de café fort, le galbe suffisamment développé, la thématique spiralée, un roulé de génoise chez le pâtissier pour pâques d'un nœud de ruban groseille lacé, un long message, une lettre par coureur à l'ailé talon jadis distribuée, un pli c'est mal dit pour cette imposante friandise, grosse bûche de langue française froissée, appétissante comme réglisse à dérouler.
Ce n'est pas qu'il ait faim, mais avec ces trucs-là, dès qu'on commence, on ne peut plus s'arrêter, alors le faune ravi tapote le sol comme il ferait d'un coussin, se pare d'une fleur de chardon qu'il se cale à l'oreille gauche, un peu pointue, il se saisi du volume, examine un instant encore le joli lacet de soie qui le scelle, hume un peu de la douceur vespérale, puis, avant d'y enfoncer les dents, de sa diction grailleuse et inaudible grommelle feu l'artifice!


(générique)

Creux narratif choisi par Eupenthe pour se glisser dans le passage en pente, étroit et prohibé, qui la sépare du butin.
Gare aux créatures rétrécies qui, on le lui a dit, montent habituellement la garde là. Rien. A moins que ces dernières ne soient encore plus réduites qu'on le raconte, voire microscopiques peut-être, d'infimes invisibles au service de Bourlastrude, quant à lui plutôt grosse bête.
Dire qu'elle se retrouve là, à risquer sa vie, ou ce qui y ressemble fort, pour un lot de bimbeloterie dont elle ignore tout, valeur, contenu, finalité, nature, propriétés. Mais allez Eupy, courage, bouge-toi.
La cuisse ferme moulée dans la combinaison anthracite qui la camoufle en ces nuits, l'œil aisément nyctalope, sans négliger quelques maniéristes et superflus miaulements, ça y est, elle y va.
5, 4, 3, 2, feu!, l'artifice, elle passe rapide au sein de mystères indévoilables et de miracles dont l'apparente banalité fait qu'elle ne les remarque pas, mais bon, l'enjeu n'est pas là, passer outre, poursuivre, elle file, s'aplatissant comme Suzette entre les parois un peu rêches du passage qui se rétrécit au fur et à mesure, là ça lui fait penser à lèche de chat alors ça va, ronronnements, elle sent que ça descend, que ça remonte, que ça tourne un peu, et puis ça redescend vertical, elle a le chausson adhérent alors pas de malaise, le rappel ne connaît pas, vrouitch elle se le dégringole tout droit et avec l'élégance, mais elle n'aperçoit toujours rien, rien au loin, rien tout proche mais si peut-être... ... mais oui Eupenthe bien-sûr, ça va de soi que tu peux t'arrêter un instant, là, vas-y, prends ton temps, acclimate-toi, c'est pas Fort Boyard.
...
Bon, alors...:
Obscurité: sont des convulsions arachnées humides au séchoir qui hurlent acharnées une symphonie d'apocalypse, troisième mouvement les dents plantées dans le tympan gauche de l'héroïne (le droit moins réceptif depuis une antérieure aventure mais il n'est pas ici place suffisante); Obscurité: lasse de discerner en ce néant des choses incertaines, d'écouter exagérément le trois fois rien qu'on ne voit... Obscurité n'a pas pour le moment d'autre intérêt; poursuivre. Hop le sol à nouveau droit; bien. Stabilité parfait. Top concentration. On aspire fort cinq sur cinq. Vas. Perche triple saut lancé 1000 mètres haies par dessus les pièges et les gouffres décathlon qu'elle repère instantanément; un sans faute, Eupenthe. Qu'a-t-elle? Elle stoppe net et scrute à sa gauche (bonne oreille). Rien pourtant. Ha?... Elle s'ébroue pas mouillée, chasse l'air plutôt de ses deux mains agitées, se retourne, avance précipitamment puis recule... Un vent fort et soudain la saisit au visage, elle chancelle, se restabilise, la bourrasque passe, Eupenthe la poursuit, lui court après, y met la main, la perd, la rattrape, elle s'y agrippe et le truc l'emporte, elle se laisse porter, le fœhn s'énerve, veut se débarrasser d'elle, tente de l'éjecter mais semble en même temps vouloir profiter un peu de la situation, faire durer (dilemme de tempête, aspirations contraires, mouvements saccadés, antiphonaire), finalement il la dépose gentiment avant de sembler prendre corps - il y a des organes étonnants qui surgissent progressivement du zéphyr comme cristallisation éolienne (de souffle constituée), hauts, crénelés, difformes (c'est-à-dire de diverses formes, incohérentes), une brouillonne carnation en strates de métastases successivement agglomérées, comme de fer, un alliage, un allié? aliéné!! lui hurle Eupenthe après que le machin eut susurré à son oreille quelque chose pour nous d'inaudible quoique de nettement métallique bien que rauque et étouffé à l'aide d'une trompe cornaline éclose à cet effet puis aussitôt rétractée dont les reflets nacrés internes du meilleur effet impriment si bien la mémoire qu'on croit encore les voir quand ils ont disparu. La scène semble s'éterniser; ce qui ne plaît trop à l'aventurière pour qui le rythme, c'est sacré. Elle reste plantée là, le cou tordu en l'air, soupire, tandis que sur elle fond (arme ou poème?), voltigeant depuis les sommets de la chose en question, une lente pluie rouillée pourtant rafraîchissante, un bouquet de pétales métalliques lie de vin en averse, irisés de soudaines lueurs garancées lorsqu'ils se rapprochent de la dame; une brise délicate les maintient un moment à son niveau, lui tournoient élégamment autour; les particules s'éclaircissent progressivement jusqu'à tirer sur le nacarat, visent les belles mains de l'héroïne, lui filent minutieusement entre les doigts tout en aiguisant encore leur clarté, incendiant leur éclat afin de dessiner longuement, sur certaines de ses phalanges, de fines pierreries carmines burinées comme autant de bagues en suspens tout un temps..., ..., puis finalement ces monades ferrugineuses comme cuites s'élèvent, voltigent, effectuent une tarentelle pourpre qui les embrase, une chorégraphie vermillon qui paraît coq de roche à son zénith, puis retombe en volutes qui s'éteignent, crépusculaires, une danse qui, d'un tracé de sang zinzolin, inscrit comme un titre en l'air neutre


Violin


FEU L'ARTIFICE


roman



et enfin, tout retombe, violet au sol, en éclats d'améthyste.
Eupenthe a évidemment tout oublié de sa mission. On la comprend. Elle dira ne se souvenir que d'une doucereuse impression de chute ouatée.
Le spectacle donné par le fœhn n'aura donc pas eu beaucoup d'effet.


Le vélin déroulé parlophone par le faune découvre tout d'abord un sous-titre, puis une citation en exergue.


(à terre en l'air ailleurs comme ici-bas)



aux hommes nef-emportés

Pindare, Première Pythique, traduite par Jean-Paul Savignac



- et c'est tout euh..., Violin? ça va? ça te suffira?


(préambule ou prétexte)

Voici donc le rouleau, d'un certain Violin.
Une simple cordelette de soie rose vif, pratique à délier, le maintient en l'état. Voilà, c'est défait. A présent bon ben ça se déroule évidemment, les mots filent, ça coule, hémophile, c'est aisé, parfois un peu dur. Ca se lit comme on tombe, à la verticale (c'est ça l'histoire, c'est ce dont on veut parler, tomber). Mais plus on lit plus on s'épuise à lire plus on s'évertue à écrire, plus ça lève aussi (brioche) plus on se lève plus on se relève, étrange; plus on se charge d'écrire plus on se charge de lecture du poids des lectures (les cartons de livre quand on déménage), plus on se décharge aussi (bagage haine conscience) plus on approche de quelque chose qui aurait à voir avec la légèreté (pas simplicité, on se fera grâce de cette commune élégance, l'élégance est un souci pesant, on s'en lestera par quelque surcharge, on s'attachera au luxe au paradoxe aux fioritures au superflu, on s'efforcera de n'être léger qu'excessivement). Ici tomber équivaudra donc à lever léviter à s'envoler (soufflé - c'est ça l'histoire, c'est la façon dont on veut parler du tomber). C'est un sens (polysémie s.v.p.) à donner à la vie (on lit on écrit on se lit on se délie on défait ses liens, puis on songe à ceux de l'humanité aussi, il faudrait les délier (on veut soulager: l'humanité, on ne va pas chercher à la révéler (cette simplicité (fuir)) mais à la relever - ô pauvre corps immense que la station debout épuise et qui s'affaisse - vraiment, on voudrait tout délier, que ça décolle, et les entraves cherraient)). Tout ça n'est pas sûr, on n'en est pas certain mais on espère, on veut aller dans ce sens-là. C'est dur.
- et c'est toi qu'écrit ça?, tite terreur? mais l'humanité, pauvre chou, quoi?... un amas d'organes biodégradables!
- arrête, tu charries