Cours à l’IFJ de Tokyo, octobre-décembre 2015, le vendredi, de 13:30 à 15:20.
Calendrier des cours :
chaque séance traitera tout ou partie des passages suivants.
- 9 octobre : du début à la page 22.
- 16 octobre : de la page 23 à la page 46.
- 23 octobre : de la page 47 à la page 68.
- 30 octobre : de la page 69 à la page 92.
- 6 novembre : de la page 93 à la page 117.
- 13 novembre : de la page 118 à la page 145.
- 20 novembre : de la page 146 à la page 174.
- 27 novembre : de la page 175 à la page 198.
- 4 décembre : de la page 199 à la page 228.
- 11 décembre : de la page 229 à la fin.
Liens utiles :
- L’édition utilisée est la réédition dans la collection Points, n° P3120, 2013, 258 p.
- Informations de base et activités professionnelles (MEET).
- La littérature « minimaliste » aux éditions Minuit : Cordon bleu (1987), Longue-vue (1988), Le feu d’artifice (1992), La femme parfaite (1995), Ces deux-là (2000).
- L’exofiction aux éditions du Seuil : Pura vida (2004), La tentation des armes à feu (2006), Equatoria (2009), Kampuchéa (2011), Peste & Choléra (2012), Viva (2014). Autre : Vie et Mort sainte Tina l’exilée (Publie.net, 2011).
- Vidéo : Peste & Choléra, présenté pour la librairie Mollat (6:43).
- Vidéo : Vietnam le savant oublié (4/03/1994, archives de l’INA)
- Émissions de France Culture :
- Film documentaire sur Patrick Deville (bande-annonce), présenté le… 10 octobre à Saint-Nazaire !
- Sur la vie d’Alexandre Yersin, voir cet excellent document en pdf de J.-H. Penseyres pour le Musée Forel de Morges.
- La tombe d’Alexandre Yersin et autres lieux commémorés.
- Bibliographie d’Alexandre Yersin (site de l’Institut Pasteur + site au Vietnam, en bas du document).
Thèmes littéraires :
Structurellement, le livre est biographique et chronologique (vie et œuvre d’Alexandre Yersin, 1863-1943). À ce contenu de base, s’ajoutent en permanence des commentaires, des incises, des perspectives dans le temps et l’espace qui le valorisent et le mettent en contexte dans une histoire plus large des explorations, découvertes et inventions dont la dimension humaniste et contestataire constitue le discours auctorial.
Communautaristes ou phalanstériennes, toutes postérieures à 1860, quelques « bandes » fascinent Patrick Deville – ou DareDeville, justicier de la littérature française qui rétablit des injustices historiques… Parfois, les « petites bandes » se croisent, se rencontrent dans ses livres, toujours dans l’axe des explorations (géographiques) et des utopies (sociales) :
- les aventuriers-révolutionnaires (type William Walker, etc.) => Pura vida.
- la bande des sahariens (type Brazza, etc.) => Equatoria.
- la bande des parnassiens (type Rimbaud, etc.) => passim.
- la bande des pasteuriens (type Yersin, etc.) => Peste & Choléra.
Notes :
- Le titre. Il associe deux maladies redoutées & mortelles depuis des siècles (impact de la couverture / en anglais) ; importance de l’absence d’articles : le sens des mots est brut, non modalisé ni catégorisé. || Expressions : 1. « c’est la peste et le choléra » = le pire qui puisse arriver, ou pire encore… 2. « choisir entre la peste et le choléra » = dilemme entre deux mauvais choix, mais il faut choisir… || Ce sont deux maladies éradiquées grâce aux recherches d’Alexandre Yersin (1863-1943), le personnage-héros du roman / biographie / reportage (problème du genre).
- Page 9. « Dernier vol », titre du premier chapitre… Ironie, c’est que, déjà, il y aura une fin, qui met en perspective une vie entière. Reste à savoir en quoi elle est remarquable = suspense.
- Image de cinéma, gros plan sur la main (manipulation)
- par la fenêtre = cadrage / regard : square Boucicaut (le Lutetia 1910 (voir p. 181) et 1940-1945, le Bon Marché, lieu parisien, historique, littéraire…)
- le « pouce fendu » : juste un détail ? ou une prolepse ?
- le rideau de pongé : mot rare (mélange laine & soie), employé par Zola dans Au bonheur des dames, 1883…
- « Bouger » (ou « ne pas bouger »), voir page 15 et passim… Pour Deville, le thème du nomadisme, comme résultat à la fois de l’insatisfaction, du génie et de l’inadaptation au modes de vie sédentaires de la majorité = normalité. Un des éléments principaux de l’exo-fiction, dont il sera question le 2 novembre à l’IFJT. || Deville oppose clairement les bourgeois ou hommes d’affaires qui ne souhaitaient pas partir mais qui fuient avec ce qu’ils peuvent emporter de leur fortune (le 31 mai 1940) et Yersin qui ne fuit pas et avait réservé son vol Air France depuis des mois selon son habitude migratoire…
- Page 10. Yersin, un des « premiers aviateurs »… il va retrouver ses « petits chevaux annamites »… etc. Toutes ces informations nourrissent le suspense des chapitres à venir, c’est une forme d’accroche, ou de bande-annonce du livre ; on comprend mieux pourquoi Deville a commencé par ce chapitre-ci : le « dernier jour de mai quarante », de dernier vol d’Air France « avant plusieurs années », le dernier voyage du voyageur Yersin et, on l’espère, la dernière des « querelles » entre « les deux cultures, l’allemande et la française » ! En fait, ce dernier voyage, avec escales nombreuses, est le temps (l’instance narrative) à partir duquel le récit se déploie, d’où se projette la table des matières parfois plus kaléidoscopique que chronologique des aventures de Yersin.
- Page 11. Et déjà la peste, comme analogie ou métaphore : la « peste brune » = le nazisme, ou La peste d’Albert Camus, 1947 (voir p. 121).
- Fin du chapitre 1. « Yersinia pestis. », nom de la bactérie (Hong-Kong 1894) = le résultat (voir p. 121-124) / le « devenir légendaire » de l’épigraphe empruntée à Jules Laforgue. Mais Yersin n’a pas préparé le vaccin (c’est Fred Vargas qui le précisait en 2003 / merci à l’auteur du blog Diacritiques pour sa précieuse page).
- Qui écrit ? qui parle ? Un fantôme chercheur & narrateur… La projection intratextuelle de l’auteur (voir p. 240 par exemple).
- Pages 12-13. Origines, histoire des parents (comme un flash-back pendant la somnolence). La narration rapide ; on pense à Cendrars.
- Pages 13-14. L’enfance avec la mère et l’héritage paternel. Misogynie latente de Yersin.
- Pages 14-16. Les études jusqu’à 21 ans et le choix de l’Allemagne. Laennec et son héritage méthodologique.
- Page 17. Les « cerfs-volants » : introduit à la page 14, repris plusieurs fois (p. 29…) comme métaphore du caractère de Yersin, mélange de désir de liberté, de solitude et d’inventivité pratique.
- Dwem ! Voir p. 229, ce que Yersin deviendra « presque » à son tour.
- Page 17-18. Entrée en scène du « fantôme du futur », version devillienne du narrateur à la fois discret (enquêteur), modeste (carnet… en peau de taupe) et très documenté et très puissant (traverse les murailles… voit derrière…) ; ses apparitions montrent les distances temporelles et soulignent le point de vue présent et les paradoxes historiques à la limite de l’anachronisme. C’est ce qui différencie l’exo-roman du roman réaliste.
- Page 18-19. Julius Wilhelm [Albert] Wigand (1821-1886), botaniste, professeur de l’U. de Marb(o)urg, opposé aux thèses évolutionnistes de Darwin. Le narrateur montre l’antisémitisme de Wigand, ou tout au moins la nécessité de respecter la « loi universitaire », le « numérus clausus alloué aux juifs ».
- [Otto von] Bismarck (1815-1898) et
le « Congrès de Berlin » (1878)la Conférence de Berlin (15/11/1884-26/2/1885) : importante référence temporelle (à défaut de date écrite). Ici, Deville a confondu « congrès » et « conférence » : le premier, en 1878, est destiné à réviser les conditions de la paix entre l’Empire ottoman et la Russie (redécoupage des états balbaniques), tandis que la seconde accueille les nations qui vont « se partager l’Afrique ». - Page 20. Stanley, Livingstone, etc. (intertextualité devillienne) + détails de l’impérialisme français + passage d’Arthur Rimbaud (1854-1891, régulièrement en Orient à partir de 1876, trafiquant d’armes en septembre 1885, donc « cette année-là », en effet). || De plus, le fantôme a eu accès à la correspondance de Yersin avec sa mère (archives de l’Institut Pasteur). Donc, référence régulières à des courriers.
- Page 21. « On l’ignore encore. » Mais le texte l’annonce = prolepse implicite (on ne va pas l’ignorer toujours…)
- Carl Zeiss (1816-1888) / polissage des verres / réflexion & utopie / Baruch Spinoza… Vertige philosophico-temporel.
- Entre Yersin et Sternberg, « se glisse peut-être le mot peste » = liberté romanesque et anachronique, volonté d’imaginer, visionner les hommes de leur vivant…
- Page 22. Suite de propos libres qui apparaissent comme un discours indirect libre attribué à Yersin & Sternberg.
- Page 23. À Paris, l’antigermanisme, contraste avec la neutralité toute helvétique de Yersin, qui découvre aussi (le discours colonialiste à propos de) la Cochinchine (Vietnam sud), l’Annam (Vietnam centre) et le Tonkin (Vietnam nord).
- Page 24. Paris, moderne (absolument) : référence à Rimbaud, « Il faut être absolument moderne. » (« Adieu », Une saison en enfer, 1873), mais qui ne concernait pas du tout Paris ; le mot était alors à la mode.
- Louis Pasteur (1822-1895) réussit sa deuxième vaccination (la première en 1885, p. 22), le texte du chapitre va suivre leur rapprochement en 1886 : Yersin travaille pour Victor André Cornil (p. 25), rencontre Émile Roux puis intègre l’équipe des pasteuriens (p. 26) peu avant la fondation de l’Institut en 1887.
- Page 26. Extrait du discours de Pasteur, le 1er mars 1886 : « Il y a lieu de créer un établissement vaccinal. »
- Page 27. Souscription pour l’achat du terrain destiné à l’Institut Pasteur (Paris 15e).
- Page 28. Évolution (darwinisme) VS génération spontanée (créationnisme) ; débat encore ouvert…
- Croisement des pasteuriens et des parnassiens… décadence en partie due à l’absinthe.
- Page 29. Lectures et activités manuelles de Yersin…
- Page 30. Publication et thèse. Puis Pasteur envoie Yersin à Berlin pour espionner son « ennemi », Robert Koch (1846-1910). Yersin revient au moment de l’inauguration de l’Institut par le président de la République Sadi Carnot, le 14 novembre 1888.
3. le 23 octobre 2015, premier bilan d’étape…
- Page 30. « Trois ans après son arrivée à Paris… » : le narrateur-fantôme nous invite à réfléchir à la chronologie ; profitons-en !
- Né en 1863, Yersin arrive à Paris en 1886, après un an à Berlin. Il participe aux travaux des pasteuriens, publie des articles, assiste à l’inauguration de l’Institut Pasteur en novembre 1888, à quelques semaines du centenaire de la Révolution française.
- Dans cette période, il réfléchit à se marier (p. 34-35)…
- effectue une mission en Normandie (p. 36-37)…
- donne le cours de microbie à l’Institut (p. 39-40)…
- visite la Tour Eiffel qui vient d’être achevée (centenaire) et, sans doute, l’Exposition universelle (p. 40-44)…
- et décide de bouger, de prendre la mer comme médecin de bord pendant deux ans (p. 44-82)…
- puis de s’installer à Nha Trang en 1892. C’est donc une décennie depuis son départ de Marburg.
- Page 32. Nous sommes à nouveau en mai 1940 dans l’avion par lequel Yersin quitte la France… Si l’instance de narration est, dans les années 2000, ce narrateur-fantôme qui surplombe l’histoire (ou tout au moins y est postérieur), les retours à mai 40 nous offrent une seconde instance de narration, une instance de narration fictive, comme si Yersin lui-même, à l’occasion de ce voyage, se remémorait sa vie, ou comme si le fantôme imaginait et nous racontait que Yersin se remémorait sa vie (p. 9-12, p. 32-34, p. 47-48, p. 69-73, etc.), de sorte que le lecteur est sans cesse dans une alternance narrative, parfois fusionnelle : la narration (et les commentaires réels) du fantôme, la narration (et les commentaires fictifs) de Yersin. Le texte accueille successivement les styles, le vocabulaire, les expressions techniques ou vulgaires, ainsi que les citations proposés par les deux narrateurs, auxquels l’auteur s’ajoute : c’est la polyphonie textuelle, produite par les croisements sémantiques des intertextes. On attribuera :
- Au fantôme, les références littéraires (Yersin ne s’intéresse pas à la littérature) : mention (citation déguisée) de Rimbaud (p. 46 ; cf. Le bateau ivre, 1871) ou citation de Flaubert (p. 52 ; Cf. Correspondance, 17 nov. 1849, p. 293), mais aussi Hugo, Conrad, Lowry et al.
- À Yersin, ses propres citations (p. 41 et 43), en rappel du carnet qu’il a toujours avec lui, etc.
- À Deville, ou fusion ou indifférenciation :
- « s’y torcher gravement la gueule » (p. 19), sorte de discours indirect libre, prêté aux protagonistes eux-mêmes (les étudiants de Marburg) pour révéler leur vulgarité et différencier d’eux Yersin et Sternberg – vient du narrateur ou de Deville.
- « leur gorgeon… vidé, c’est encore un que les Boches n’auront pas » (p. 25) : Yersin est « comme tous les hommes d’alors » (p. 24), comme un « des prolétaires » (p. 25), pour illustrer par le discours indirect libre « l’antigermanisme » que Yersin découvre en arrivant à Paris (1886), suite à la perte de l’Alsace et de la Lorraine en 1871.
- « sous des allures de fumiste et avec l’air de celui qui n’en fout pas une rame » (p. 29) – langage familier ou argotique… qui ressemble bien à un commentaire ironique de Deville ou de son fantôme, par rapport à un monde contemporain où le travail est devenu une nécessité, au moins autant que le fait de devoir montrer que l’on travaille (même quand ce n’est pas le cas)… soit le contraire du dilettantisme que Deville relève chez la plupart de ses personnages et qui accompagne souvent leur courage, leur générosité, etc. (de William Walker à Yersin, en passant par Rimbaud et la plupart des explorateurs, révolutionnaires des livres précédents).
- « Ignorer l’Histoire et ses frichtis dégoûtants » (p. 32-33) – jugement du narrateur ou de Deville (après deux guerres mondiales…) ou de Yersin ; le mot « frichti » lui-même vient de l’allemand frühstück, « petit déjeuner », langue que connaît bien Yersin…
- Page 45. Yersin ne reste pas parmi les pasteuriens / devient médecin embarqué.
- Pages 48 à 57. Le voyage sur l’Oxus, en 1890, de Marseille à Saigon :
- reconstitution des voyages de l’époque (vie à bord, mode et dandysme POSH (p. 54)
- énumération des étapes / parallélisme avec les étapes de l’avion de 1940 : 50 ans séparent le premier et le dernier voyage de Yersin vers Nha Trang (arrivée p. 76-77 et p. 81)
- panorama historique (p. 48), des explorateurs (p. 49), explorateurs et écrivains (p. 52-53)
- sur l’Oxus (p. 56) : nom d’un fleuve d’Asie maintenant nommé Amou-Daria ; légende de Sémiramis, fondatrice de Babylone ; il y aura aussi une pièce de Voltaire.
- premier contact en terre coloniale (p. 57) et déjà les mauvais côtés (à comparer aux Civilisés de Claude Farrère, prix Goncourt 1905, qui dépeint les coloniaux français comme des esclavagistes et des débauchés, sans morale ni avenir)
- Pages 57-73. Yersin est affecté sur le Volga, qui fait la ligne Saigon-Manille (auj. un vol de 2h30) :
- Saigon avant 1975, aujourd’hui Hô-Chi-Minh-Ville, capitale du Viêt Nam ; rue Catinat (p. 65, 79, etc., voir dans Kampuchéa, Seuil, 2011, p. 85-93), du nom du navire de guerre Catinat qui prit part à la conquête de la région en 1856 et 1859, du nom de Nicolas Catinat, homme militaire et Maréchal de France sous le règne de Louis XIV, en grande partie responsable de l’alliance de la France avec la Savoie en 1696.
- Différence entre Saigon la neuve et Manille, ville espagnole déjà ancienne (p. 59) ; Yersin va de l’une à l’autre avec son embarcation personnelle (p. 59-61) et y découvre (prolepse) le genre de vie qu’il voudrait mener (p. 61-62)
- Rencontre avec Albert Calmette (p. 64), le « C » du BCG, vaccin contre la tuberculose.
- Découverte de Nha Trang (où il s’installera par la suite…), à 480 km de Saigon, et où il y a toujours un Institut Pasteur.
- Pages 74-75. Un an plus tard, affectation sur le Saigon, petit bateau qui fait la ligne côtière Saigon-Haiphong… Deville souligne que sous l’administration de Jules Ferry, (dans les années 1870-1880), l’expansion coloniale dans cette région est principalement côtière (accès maritime facile, terre cultivables, montagnes inconnues et considérées comme inhabitées, ou par des populations sauvages…) ; limitation à la bande côtière qui permettra aux peuples vietnamiens de s’organiser à partir des territoires inconnus des armées coloniales du 20e siècle.
- Les bossoirs : potences à partir desquelles les embarcations de sauvetage sont montées ou descendues d’un bateau ; les périssoires : embarcations légères permettant d’aller à terre à partir d’un bateau à l’ancre ; les dames de nage : fixation sur le bord d’un canot permettant de fixer et de manœuvrer les rames. Patrick Deville, en Nazairien, intéressé par l’histoire de sa ville et de ses activités maritimes, nous fait profiter du lexique technique de la marine (même si nous devons parfois aller chercher les mots dans le dictionnaire). Le capitaine Flotte est Nazairien (p. 73, 77), Saint-Nazaire est signalée (p. 72)
- Présence des pasteuriens : Charles Chamberland (1851-1908) et son filtre à eau (p. 76), Adrien Loir (1862-1941) en route pour l’Australie (p. 77). Contre ceux-ci et la communauté scientifique qui souhaite s’attacher Yersin, ce dernier exprime sa volonté de « bouger », d’être tranquille (ou solitaire) et de devenir un explorateur ; Patrick Deville nous fait ressentir cette personnalité par quelques expressions familières et vulgaires qui – à la façon d’un homme d’aujourd’hui, assurément – révèlent (ou inventent) son fort caractère, comme « Yersin sent bien qu’on ne va pas lui lâcher la grappe » (p. 78), ou Yersin a gagné déjà qu’on ne vienne pas trop l’emmerder » (p. 83), ou « et maintenant photographier des négresses à poil. » (p. 92) – parfois en fin de chapitre pour une scansion franche.
- Pages 75-77. Exploration de Nha Trang et de ses environs. Destin : « l’exploration scientifique » (p. 79)… Suite :
- Pages 83-92. Fin des missions maritimes, après deux ans ; début de la carrière d’explorateur (1891-1894) :
- Titre ironique du chapitre « La longue marche », allusion anachronique au mouvement de l’Armée rouge chinoise en 1934-35, une retraite devenue symbole de résistance et durant laquelle Mao devient le leader de la révolution. Yersin, quoique seul, serait alors l’acteur d’une transformation historique et géographique, dans une aventure rétrograde (comme renoncer à sa carrière) qui durerait plus ou moins une année… C’est ce que le titre laisse entendre. La comparaison (ou parodie) a parfois des aspects comiques, comme d’initier les Moïs à « l’hilarant usage du couteau suisse multilames » (p. 84), ou de se laisser voler son porte-monnaie, un peu par distraction et un peu en compensation de l’exploitation que les Français sont venus faire en Indochine (et que les anticolonialistes considèrent comme du pillage).
- « Mis en congé », « dégagé », pouvant être accusé « d’inconstance » (p. 83), il arrive néanmoins à « la vraie vie libre et gratuite » ! (p. 86)
- Le titre est aussi indicatif d’une réelle « longue marche » de trois mois jusqu’à Phnom Penh (Cambodge), après le passage en haute montagne : il est le « premier voyageur à relier par voie de terre la côte de l’Annam au Kampuchéa » (p. 88).
- Il est reçu par les autorités françaises (en poste : Louis Huyn de Vernéville), ce qui ne l’amuse guère = exploration-science VS mondanité (p. 87-89), « c’est vite la barbe » ! (p. 88) parce qu’il n’apprécie pas / n’accepte pas d’être installé, en poste, assis, ni l’attitude hautaine ? bourgeoise ? dominatrice ? colonialiste ? des personnalités en poste de l’administration coloniale… Ici, par exemple, l’empathie de Deville pour Yersin (l’homme qui veut bouger) semble exprimer son propre sentiment en prêtant à Yersin un langage grossier qui n’est pas attesté : « Il suffit… de lever son cul » (p. 89)- pas attesté mais significatif pour le lecteur d’aujourd’hui ; connivence extra-diégétique obtenue par un discours indirect libre à double attribution, Yersin & Deville se confondant dans l’expression d’un sentiment qu’ils partagent. Ce sentiment se retrouve aussi avec la parution de Sic transit (réédition groupée de Pura vida, Équatoria et Kampuchéa) du fait que l’expression latine exprime la vanité des honneurs mondains et la nécessité de s’occuper de ce qui est vraiment important…
- Pages 89-91. Puis Yersin retourne à Saigon, à Nha Trang, avant d’aller séjourner trois mois à Paris.
- conférences, rencontres (dont sans doute Auguste Pavie), etc.
- allusion (et hommage) à Paul Gégauff (1922-1983) qui « réunira les petites bandes de la Nouvelle Vague et du Nouveau Roman » (p. 90-91) : sautant tout à fait en dehors du cadre yersinien, cette allusion exprime un véritable attachement de Deville à Gégauff et aux personnalités qui sortent de leur groupe et aiment reprendre leur liberté…
- Pages 100-105. Le « fantôme du futur » et Deville : pause avant l’épisode central la peste, survol d’époques et développement du parallèle Rimbaud-Yersin. Vouloir bouger, leur goût de la solitude, leurs connaissances et idées, leur enfance sans père, leur signature nominale… Le chapitre se réfère aux genres littéraires « vie » et « tombeau« , ce dernier étant un discours poétique à la mémoire d’un défunt, plus court qu’une « vie » et que Deville réalise en prose.
- Pages 105-106 : d’un chapitre l’autre sur le thème de la piqûre au doigt ; réf. La Belle au bois dormant et la blessure de Rimbaud selon son ami (p. 104).
- Pages 106-109. Piqûre et blessure de lance sont encore en prolepse, en accroche pour le chapitre qui vient. Chez les Sedangs en 1893, peuple dont le territoire était à cheval sur les actuels Viet Nam, Laos et Cambodge, une expédition qui tourne court : attaque d’un village, poursuite des brigands dirigés par Thouk, blessures graves voire mortelles mais soins magiques, etc., origine du pouce fendu (p. 9) + apprentissage du télégraphe, convalescence et retour (plusieurs mois).
- Page 108 : nouvelle évocation de la rue Catinat à Saigon (voir p. 65 et dans Kampuchéa, p. 85-93).
- Page 110 : exécution de Thouk… / Année de commémoration de la Terreur = 1893. Blocus de Bangkok dans le cadre de la guerre franco-siamoise pour constituer l’Indochine française. Pour Yersin : « cette saleté de la politique » (selon Deville, voir aussi p. 96 et passim).
- Page 111 : comique involontaire, les explorateurs amusent les autochtones (passent à leur tour pour des sauvages / l’envers du discours colonialiste).
- Pages 109-112 : la plus longue exploration, entre Tonkin et Laos, mais aussi la dernière. Sans raconter le cheminement, Deville détaille les activités répétitives qui constituent l’exploration scientifique
- Pages 113-117. Retour à « l’été quarante », à lire et relier aux pages 69-73.
- Page 113 : télégramme de Calmette, sur la peste à Hong Kong… || Paul Vidal de La Blache (1845-1918), géographe voyageur qui relie différentes disciplines et renouvelle la géographie… || Dernière période de Yersin, il relit ses carnets, revoit sa vie…
- Page 114 : Jean Decoux, gouv. gén. de l’Indochine de 1940 à 1945, loyal à Pétain, lutte plus contre la résistance française ou les Juifs que contre l’occupant japonais !
- Page 115 : le lien entre Rimbaud et Hitler, c’est que le premier avait prédit l’écrasement du second !
- Page 116 : les Allemands à l’Institut Pasteur et au Lutetia…
- Page 117 : le 21/08/1940, assassinat de Léon Trotski (en avance sur Viva…) et invasion du Japon en Indochine… Kampetaï, ou Kenpeitai, Kempeitai, 憲兵隊, police militaire de l’armée impériale japonaise de 1881 à 1947. || « vieilles querelles », fait le lien entre l’occupation japonaise (de l’occupation française) en Indochine en 1940 et le passé de Yersin relatif à l’identification du bacille de la peste en 1894, sujet du chapitre suivant.
6. Le 13 novembre : de la page 118 à la page 145.
- Page 118 : contraste temporel yersinien…
- Page 119 : topo sur la peste (voir aussi ses représentations culturelles et artistiques).
- Page 121 : Kitasato Shibasaburo (1853-1931), médecin et bactériologiste.
- Pages 123-124 : mauvaises conditions, hasard et sérendipité de la découverte du bacille…
- Page 126 : citation de Molière (1668), tirée de L’avare, acte 1, scène III. La Flêche parle d’avarice à Harpagon qui ne se sent pas visé…
7. Le 20 novembre : de la page 146 à la page 174.
- Bouger ou ne pas bouger, telle est la question… On constate, dans le comportement de Yersin, tel qu’il nous est rapporté par Patrick Deville, une alternance de périodes d’engagement au service de l’humanité et de dégagement pour développer ses propres projets… 127, ne plus bouger, 131, bouger, 155, ne plus bouger
- Page 132 : « Fix et Phileas Fogg » = personnages de Jules Verne dans Le tour du monde en quatre-vingts jours (paru en 1872-73, texte Wikisource)… (L’inspecteur Fix poursuivant sans relâche l’explorateur Fogg, c’est le même schéma moteur que, chez Hugo, Javert poursuivant Jean Valjean, et cela deviendra un topos de genre.)
- Page 133 : son premier hévéa (à suivre, 182-186)
- voitures : 181
- Pages 127, 155-162 : la colonie, façon Yersin, autre modèle de développement humain… VS l’autre (134)
- Page 135 : après le bacille, c’est la préparation du vaccin.
- Page 136 : Le cirque des immunisation et article : « La peste bubonique, deuxième note », Annales de l’Institut Pasteur, 1895.
- Page 140 : En 1896, relations entre (l’Angleterre) la France et la Chine au XIXe siècle… Malgré le mauvais souvenir de la Seconde guerre de l’opium et le « le sac du Palais d’été », le 18 octobre 1860 (page Herodote.net), nécessité de faire des essais de vaccin VS mauvaises relations avec la Chine.
- Page 141-144 : résultats étonnants et presque incroyables, donc renforcement du contrôle ; Deville propose « trois témoignages concordants et indépendants »… (VS foi aveugle, imagination ou mensonge).
- Page 146 : article de Yersin dans le Bulletin de l’Académie de médecine, 1896 (Gallica).
- Page 147 : Jules Verne sur Livingstone, dans Un capitaine de quinze ans, chapitre II / 14.
- Page 148 : référence à Arthur Conolly (1807-1842), officier anglais de l’armée des Indes, a proposé le premier l’expression « great game » ou « grand game » pour décrire la lutte géostratégique des Anglais et des Russes pour la domination de l’Asie centrale (parfois écrit à tort Connolly). || la crise de Fachoda, incident diplomatique grave entre Anglais et Français au Soudan en 1898 (le 18 septembre). || Pierre Loti, L’Inde sans les Anglais, 1903.
- Page 150 : Rudyard Kipling, Le livre de la jungle (recueil de nouvelles en deux volumes, 1894).
- Pages 152-154 : survol des années 1941 et 1942 dans le monde et pour Yersin à Nha Trang… le « dernier survivant de la bande à Pasteur » ! || Ses récits publiés dans la revue Indochine en 1942 et 1943, compilés ici en pdf !
- Pages 155-162 : la « vraie vie », pour Yersin, c’est de développer une forme de colonie de progrès humain, scientifique et technique, en étant utile aux populations locales et au monde, sans vouloir dominer ou s’accaparer les richesses…
- Pages 163-168 : Doumer l’envoie à Hanoi pour fonder un institut Pasteur. Et autres aventures, jusqu’à l’âge de 40 ans…
- Page 164 : la voiture Serpollet 5-cv !
Nouvelles expressions familières ou grossières (en plus de toutes celles déjà relevées aux chapitres précédents) : en deux coups de cuiller à pot (126) = vite fait ; être au four et au moulin (147) = tout faire en même temps, parer à tout ; courir sur le haricot (155) = énerver ; autant pisser dans un violon (170) = inutilité.
8. Le 27 novembre 2015 : de la page 175 à la page 198.
- Étude stylistique des pages 170-174 : « La controverse des poulets », sans doute l’un des chapitres les plus comiques du livre, quand les Yersin, frère et sœur, se passionnent scientifiquement pour les poules (déjà p. 136-137, la « poule mouillée… se guérit toute seule » avec double sens : « poule » effectivement mise dans l’eau froide pour faire descendre sa température corporelle + l’expression « poule mouillée » qui signifie « peureux » ou « froussard », voir dico des synonymes)
- Pages 178-183 : « On commence à l’accuser de dispersion. », « Il devrait être […] à la tête d’un laboratoire ou d’un hôpital », « Les journalistes qu’il refuse de recevoir sont bien obligés d’inventer […] », « On le décrit comme le roi fou […] », etc. VS « Contrairement à la fable du savant fou […] » (p. 179) – à mettre en regard de la réhabilitation proposée dès 1942-43 et surtout 1956 avec le rassemblement des articles écrits pour Indochine en 42-43 (tapuscrit en PDF aux archives de l’Institut Pasteur).
Ce chapitre, « Un avant-poste du progrès », rassemble les idées qui motivent Patrick Deville dans son projet romanesque : 1. il existe un personnage remarquable (héros scientifique, voyageur, désintéressé, aimant peu les honneurs et les responsabilités institutionnelles, anticolonialiste, etc.), 2. l’histoire a laissé de lui une image négative ou déjà disparue (au moins pour le grand public), 3. est disponible un matériau textuel insuffisamment exploité (les archives et la correspondance, les articles de Yersin, scientifiques ou non jusqu’en 1943) à partir duquel un écrivain peut créer une œuvre polyphonique (voix du fantôme du futur ou de Deville produisant aussi de nombreux discours indirects libres, citations de Yersin, citations ou références d’autres auteurs comme ici Conrad qui est l’auteur en 1897 de la nouvelle intitulée Un avant poste du progrès), 4. cette entreprise permettra à la fois de créer un roman contemporain ET de faire revivre (important choix verbal du présent) et connaître ce personnage injustement négligé.- Page 181 : Compter les années « en négatif » jusqu’à 1914 : accélération dans la biographie (développement local de Yersin, indépendance, régularité de ses déplacements) = pendant qu’il crée son propre monde, d’autres événements scientifiques et politiques précipitent le reste du monde dans la catastrophe… (l’autre sens du « négatif ») ce qui se prolongera pendant la guerre (cf. p. 186-187 par exemple, ou le décalage avec la vie de Roux, p. 189 : la guerre VS les fleurs !).
- Pages 184-191 : Pendant la 1ère Guerre mondiale et après, le développement de la production et du commerce du caoutchouc = génie scientifique, anticipation sociétale et commerciale, enrichissement au profit des activités médicales et humanitaires.
- Page 184 : Charles Marie de La Condamine (1701-1774), scientifique, explorateur et encyclopédiste, mène une expédition en Équateur de 1735 à 1743 pour mesurer précisément (géodésie) la forme non-sphérique de la Terre, comme une mandarine, selon Newton, contre la thèse de Descartes, comme un citron… Pendant son expédition sur le fleuve Amazone, La Condamine rencontre aussi le quinquina, le caotchu (en quetchua), le curare et de nombreux animaux encore inconnus en Europe. À noter : Voltaire publie Candide ou l’Optimisme en 1759.
- Page 186 : « un entêtement de mule du pape », voir Daudet (1868), Lettres de mon moulin…
- Page 187 : « jungle froide », un oxymore malgré la réalité… || Référence à la chanson Cadet Rousselle…
- Page 190 : « il a fait le tour du monde et de la question » : c’est toujours rare et amusant, un zeugma (ici zeugma sémantique, ou attelage, associant « le tour de » à deux compléments, l’un concret, « du monde », l’autre abstrait, « de la question ») || Citation : « la même magie bourgeoise à tous les points où la malle nous déposera », Rimbaud dans « Soir historique », Les illuminations (1873-1875) : prévision de l’uniformisation des mœurs et des cultures du fait du développement des moyens de transports et de communication, ainsi que d’une forme d’impérialisme bourgeois qui étend son modèle de mondialisation…
- Pages 190-191 : discours supposé (DIL et vraisemblable) sur la vie, la reproduction (sexualité) et l’amour, citant Pasteur et Rimbaud (maîtres respectifs de Yersin et de Deville), opposant la stupide rumeur d’amours ancillaires à la hauteur de vue désabusée d’un philosophe de la vie biologique…
- Page 191 : (habituel) trait ironique en fin de chapitre : « broyer (un peu) du noir », pendant l’autodestruction des deux peuples… parce que quatre ans, c’est long aussi quand on n’y est pas.
4 décembre : de la page 199 à la page 228
- Titre p. 192 : adresse « À la postérité » ; le texte qui suit est donc d’abord une sorte d’épitaphe… de Pasteur, pour le montrer comme l’origine, ou le producteur de Yersin. Mais aussi un parallèle sur l’attitude des deux hommes à l’approche de la mort.
- Page 192-194 : anaphore de réinterprétation historique, « comme si… » + Yersin en jeune clone de Pasteur pour continuer le travail = filiation scientifique. Avec la répétition aussi de l’adjectif « jeune », effet lyrique et rythmique proche de la phrase de Claude Simon, cherchant une vérité, ou tout au moins une compréhension au-delà des apparences et des faits.
- citations de Pasteur, recherche sur cet « acide racémique » qui le motivait. Voir le TLF qui cite justement Pasteur.
- goût de Pasteur pour l’exploration, d’où l’aide qu’il fournit à Yersin ; explication de la « dent d’éléphant sculptée » (p. 194).
- l’ensemble de ces trois pages paraît être comme une pensée ou rêverie de Yersin, la nuit, pendant la guerre européenne.
- Page 195 : une autre similitude Pasteur-Yersin, l’absence de « volonté de succès populaire » = la passion exploratrice suffit (et la reconnaissance et les honneurs gênent… sauf quand ils donnent les moyens de continuer).
- Jean-Baptiste Biot (1774-1862), scientifique et professeur qui forma en partie Pasteur ; Deville remonte la filiation. D’une génération l’autre : citation des discours de réception à l’académie.
- Émile Littré (1801-1881), auteur du célèbre Dictionnaire de la langue française (autre site) (1863-1872) ; les mots « microbe » et « microbie » ne s’y trouvent pas… Le TLF indique que le mot aurait été formé par Charles Sédillot (1804-1883) en 1878 (information reprise par Wikipédia). Littré aurait peut-être confirmé l’intérêt du mot proposé, qu’il intègre dans son Dictionnaire de médecine en 1886.
- Pages 196-197 : Discours de Pasteur : chez les scientifiques, modestie (personnelle) VS devoir (collectif) ? Ou bien, derrière, « orgueil immense » ? (p. 196). Liste des actions de Pasteur relatives à sa gloire.
- à côté de lui, Yersin est « un nain »…
- pour se faire un nom, il faut le transformer en marque, créer un produit… (Liebig, Dunlop, etc.)
- Page 198 : « ocelles de lumière », autre signe simonien ? Parallélisme Pasteur-Yersin de l’attente de la mort (funérailles déjà préparées).
- Fin du chapitre, citation d’un « vieux philosophe », qui n’est pas nommé parce que trop évident : « Agis de telle manière que », etc. Il s’agit de l’impératif catégorique d’Emmanuel Kant, formulé vers 1785 et diversement repris dans ses essais et ailleurs et qui définit l’engagement moral dans la société. C’est un des chapitres essentiels des cours de philosophie en France encore aujourd’hui et l’un des principaux éléments de la morale kantienne.
11 décembre : de la page 229 à la fin
- La Première Guerre Mondiale est repérée par quelques grandes dates : ainsi Sarajevo (182), Verdun (189), « l’hécatombe au Chemin des Dames » du 16/04/1917 (p. 199), « l’offensive des Dardanelles » (p. 202), le 11 novembre et l’Armistice (203) || Vécue à distance par Yersin : écoute de la radio par ondes courtes, courriers postaux et colis qui n’arrivent pas = isolement et occupations autres : météorologie (186), orchidées (187), photographie (188), ornithologie et botanique (189), relecture de Pasteur et Biot (191-196), carnets, idées, plantes (p. 201)
- Personnification du XXe siècle : d’abord un bébé « mignon » (163), un jeune « vaurien » (168), « un sérieux voyou » de 17 ans (203), trente ans (219), trente-trois ans (229).
- Page 204 : Reprise des correspondances et des activités conjointes (avec Roux et Calmette, France – Nha Trang), recrutement de nouveaux collaborateurs et délégation de responsabilités, cession pour 1 franc symbolique de la Société Yersin, Roux & Calmette à l’Institut Pasteur, ce qui donne un financement certain à l’institution (206) du fait des revenus du caoutchouc et de la quinine.
- Page 208 : la cession de la société n’empêche pas Yersin d’être financièrement très à l’aise : hôtel Lutetia, nombreux achats de matériel et de produits pour expériences et plantations…
- Pages 209-211 : « au milieu de ces années vingt », Yersin prend le métro, constate les changement de Paris, est contemporain de nouvelles petites bandes, celle « de la rue Blomet » (Masson, Leiris, Desnos, Miro ?) et celle qui rassemble « Artaud, Bataille ou Breton », les Surréalistes || Le fantôme du futur fait le lien entre ces différents groupes et personnages.
- Pages 214-215 : retour et nouvelle diversification des activités de Yersin : météorologie, astronomie, mathématiques…
- Pages 216-217 : télégraphie sans fil… Le fantôme / Deville imagine une auto-proclamation de chef d’état pour, paradoxalement, montrer le calme d’Yersin et ses pratiques durables et écologiques avant l’heure !
- Page 219 : en 1930, Yersin à 67 ans.
- Le « cinchona » ou « quinquina », arbre d’Amérique du Sud dont l’écorce avait des propriétés médicinales réputées, mystérieux jusqu’au milieu du XXe siècle et dont on produit la quinine depuis 1820… notamment pour soigner le paludisme (Louis Destouches, alias Céline, a publié en 1925, peu après sa thèse de médecine, un essai sur la quinine).
- Mention d’un jeune « révolutionnaire inconnu », Hô Chi Minh (1890-1969) qui évoque, pour les lecteurs, le futur du Vietnam.
- Page 220 : l’Exposition coloniale à Paris en 1931.
- Pages 222 : Paul Doumer (né en 1857), ami d’Yersin, élu président en 1931 et assassiné en 1932, le 6 mai, dans une exposition de livres, alors qu’il discutait avec Claude Farrère (1876-1957, auteur du prix Goncourt de 1905, Les civilisés), blessé – « un pruneau dans le buffet » – alors qu’il voulait détourner l’arme de Gorgulov.
- Pages 223-228 : parallèle Yersin / Céline (1894-1961), avec citations rapprochées…
- Page 227-228 : fin de Joseph Meister, le cobaye-résistant…
- Page 229 : dwem, acronyme de dead white men (reprise de la page 17), personnalité académique qui abuse de son autorité ou dont on se réclame abusivement (à rapprocher de mandarin, dans l’université française).
- Dernières pages : traduction d’auteurs latins et observation des marées, les dernières activités ; même impotent, il continue d’étudier ! || Opposition entre l’histoire de la bande (liste des noms et de leur enchaînement scientifique) et la fin solitaire d’Alexandre Yersin.
- Double métaphore de la mort : la montée des « eaux noires » (face à la mer) et le court-circuit électrique dans le cerveau (peut-être provoqué par l’eau…).