La position indûment acquise
Tête vide, le soir
comme si parler aux étudiants
les nourrir ?
m’avait vidé
nous sommes comme
vases d’énergie communicants
et c’est mon tour d’attendre
l’aliment et le repos
Reçu par ma sœur — merci ! — , via ma liste de cadeaux Amazon, un superbe coffret Fritz Lang. De quoi passer l’hiver. Ou de quoi continuer la thématique du séminaire de cinéma aujourd’hui qui était de voir comment un film met en scène un événement historique alors même qu’on ne sait pas tout de lui et qu’il advient dans un cadre fictionnel (rencontre de Lady Oscar avec Robespierre dans une taverne plusieurs années avant la Révolution, dans le film de Jacques Demy, première arrivée de Marie-Antoinette à Versailles, sa découverte de la beauté des lieux et de la lourdeur protocolaire, dans le film de Sofia Coppola). Pour des étudiants à peine formés au discernement et à la réflexion personnelle, la chose écrite par une autorité vaut pour vérité ; ils sont donc par nature (de leur culture) hautement manipulables et même revêches à l’idée qu’il pourrait en aller autrement.
L’autorité, c’est d’ailleurs le thème de Ce soir ou Jamais de mardi soir. Quand on a pu dépasser la stérile opposition entre deux intervenants sur l’âge de la pénalisation des mineurs, on accède enfin aux très beaux et très clairs propos de Daniel Sibony sur l’essence de l’autorité.
En substance de ce qui était déjà ma conviction profonde sur ce sujet, l’autorité émane en quelque sorte naturellement (même si c’est aussi un fait de culture) de celui qui a compétence et attitude. Or l’enfant ou l’apprenant, ou le citoyen, d’aujourd’hui a l’intelligence de tester s’il y a réelle compétence derrière l’attitude, ce qui est une bonne chose. Le cas échéant, il lui sera possible de reconnaître et d’accepter cette autorité, qui alors fait autorité, mais dans le cas contraire, il va pousser la fausse autorité dans sa contradiction interne, provoquer une réaction autoritaire de ladite autorité qui ne sera qu’une crispation dûe à l’incompétence qu’abrite l’attitude ou pire : la position indûment acquise. De sorte que l’autorité qui s’y croit mais ne fait pas autorité doit recourir à un arsenal répressif et dominateur pour conserver les apparences de sa situation (oripeaux) alors qu’elle est aux yeux de tous devenue illégitime. Ainsi du prof d’Entre les murs (extrait non coupé durant l’émission) qui ne comprend pas (mauvaise foi) que son « pétasse » peut être mal reçu par ses élèves alors que la compétence de son autorité aurait dû lui faire savoir que dire le mot était déjà une erreur s’il ne construisait pas préalablement par son discours un socle pédagogique permettant de l’amener avec des pincettes. Ainsi du chef d’un état qui accumulerait mesures sécuritaires et discours musclés en s’éloignant chaque jour un peu plus de la possibilité de retisser les liens d’amour, d’amitié, d’estime réciproque et de solidarité humaine ou sociale qui permettraient un vrai retour à la cohésion en elle-même de sa nation (en fait, c’est confondre cohésion et coercition).
À propos d’amitié, j’ai vu (en fin d’après-midi) Cravate Club (Frédéric Jardin, 2002), huis clos amical entre Édouard Baer et Charles Berling qui, au lieu de me détendre, m’a foutu les jetons…
Tags : Baer Édouard, Bégaudeau François, Berling Charles, Coppola Sofia, Demy Jacques, Jardin Frédéric, Lang Fritz, Marie-Antoinette, Robespierre Maximilien, Sibony Daniel
Publié dans le JLR
oui, très justes les propos de sibony, souvent vérifiés dans ma pratique de prof… juste un regret : que le choix de l’écrivain-prof n’ait pas été plus inspiré mais bon ceux que j’admire ne courent pas les plateaux-télé et c’est tant mieux, ils écrivent !
Ouais, avec son pamphlet à deux balles pour ses amis de droite qui kiffent pas la France de Diam’s, il sonnait assez creux…
Je suis passé chez vous.
j’aime « confondre cohésion et coercition » –
Cette nécessité d’avoir une vraie autorité pour l’exercer on peut l’étendre à être respectable pour être respecté – être digne d’amour pour être aimé. Et quand on n’obtient ni respect ni amour ni etc… faire un retour sur soi plutôt que s’indigner. Ouai, et pas confortable
merci pour votre passage, en réponse je vous ai laissé qq infos concernant le spectacle d’hélène cathala « slogans »…
Merci, j’ai vu. Je vais me renseigner sur ces spectacles…