Intérêt pour la flexion et la coupure
Antépénultième retour à Nagoya de l’année. Des copies à corriger. Ah, tiens ! il pleut. Je rouvre un livre déjà beaucoup trituré depuis que je l’ai… C’est-à-dire le milieu des années 80. Dedans, il y a un ticket de pizzeria de février 2000. En revoyant la photo du restaurant, en haut de Tokyu Bunkamura, je crois me souvenir de quatre personnes, T. et moi pour dîner avec un couple d’amis et fêter le poste que je venais de décrocher ici, avant le déménagement… Habitant encore en partie un petit studio dans le quartier d’Ochiai, à l’ouest de Waseda, j’avais dû sortir ce livre de la bibliothèque pour en relire quelques passages dans le métro. Mais je ne sais plus dans quelle intention. Alors qu’aujourd’hui, c’est clair.
« Tout le monde connaît Hong-Kong, sa rade, ses jonques, ses sampans, les buildings de Kowloon, et l’étroite robe à jupe entravée, fendue sur le côté jusqu’à la cuisse, dont sont vêtues les eurasiennes, longues filles flexibles, moulées dans leur fourreau de soie noire à petit col droit et sans manche, coupé net au ras des aisselles et au cou.»
Cette feinte assurance, cet intérêt pour la flexion et la coupure, ça dit quelque chose à quelqu’un ?
Après les cours, je regarde Président (Lionel Delplanque, 2006). Hagiographie du pouvoir personnel sans doute très en dessous de l’actuel autoritarisme sarkozien. Mais hagiographie quand même parce qu’au final, le film ne combat pas le principe du pouvoir concentré dans les mains d’un seul, il l’avalise (le précède ?) et le justifie par le besoin (désir ?) de continuité. Avalez la pillule, c’est pour votre bien, au fond, même si vous n’êtes pas d’accord. Semblant dévoiler cette fatalité centripète qu’incarne très bien Albert Dupontel, il ne fait que confirmer ce dont tout le monde se doute : fichage illégal de tous les contacts, manipulation des médias, souci de l’image très supérieur à celui de l’action en profondeur, engluement (stupeur et tremblements ?) de tous ceux qui approchent le foyer d’irradiation. Et comme le film glisse vers la bluette pour que la fille du président ouvre ses ailes, même ceux qui ne sauraient pas encore tout ça ne verront pas jusqu’où ça peut mener.
Tags : Delplanque Lionel, Dupontel Albert, Sarkozy Nicolas
Publié dans le JLR
je dirais Robbe-Grillet, la Maison de rendez-vous ? Souvenirs du Triangle d’Or ?
Wah ! trop forte ! C’est bien la Maison de rendez-vous.
Je viens de vérifier dans Google, il y avait un PDF Minuit… Mais je suis sûr que tu n’as pas eu besoin de ça…
ben moi bien entendu si – quelle merveille cette université libre des blogs ! (enfin quand machine veut bien)
même pas eu besoin de gogol pour une fois (!) car il se trouve que j’ai relu un peu de RG pas plus tard qu’il y a quelques jours pour rédiger un portrait-nécro (en 3 feuillets de 1800 signes, dur dur étant donné la complexité du personnage)
et ce magnifique incipit, que j’avais oublié :
« La chair des femmes a toujours occupé, sans doute, une grande place dans mes rêves. »
… surtout avec l’éclairage rétrospectif du Journal de Catherine
Eh oui, historiquement, notre position est assez spectaculaire.
Cela permettra-t-il à de nouveaux lecteurs de découvrir plus sereinement ces œuvres superbes ?