La petite laine en question
Jour de pluie et température d’automne. Redécouverte des petites laines.
Dingue. J’ai réussi à récupérer une émission ratée en juillet ! L’anniversaire des dix ans de Mauvais Genres avec une heure et demie d’extraits d’œuvres littéraires japonaises ! Je ne sais pas comment ça a pu m’échapper. Qu’est-ce que je faisais le 6 juillet, lendemain de la diffusion ? En tout cas, si quelqu’un veut encore écouter ces belles lectures tant qu’elles sont en ligne, c’est par ici.
La longue série — c’est rare — de commentaires avec Vinteix s’est prolongée par une bonne surprise : qu’il serait du colloque où je dois aussi me rendre fin octobre à Fukuoka. J’y avais pensé puisque je sais qu’il y habite mais n’ayant pas encore la liste des participants, je ne m’étais pas avancé… Du coup, je lui laisse un message téléphonique et il me rappelle juste comme je m’installe dans la médiathèque de l’Institut. On tombe d’accord sur le danger des échanges par courriel ou commentaires, déjà signalé, et que même avec de vieux amis, le ton n’est pas toujours perceptible ou pas toujours perçu et qu’il arrive parfois que le malentendu se développe pour rien. Ça me rappelle des tirades sur la connivence — qui s’en souvient ? — il y a trois ou quatre ans, résumées finalement en juin 2006 en [vouloir & croire] × [produire & transmettre] >> de la nuance. Pour faire une équation complète, il faudrait intégrer les paramètres médiologiques et faire une boucle.
Soit A et B : A = ([1 VS combien ?] = [moi VS qui ?]) + ([vouloir & croire] × [produire & transmettre de la nuance]) et B = ([combien ? VS 1] = [qui ? VS moi]) + ([vouloir & croire] × [produire & transmettre de la nuance]).
Si A > 0 => B > 0, alors A’. Si A’ > 0 => B’ > 0, alors A ». Si A » > 0 => B » > 0, alors A »’, etc.
Si ce n’est pas clair, je reprends en langage normal…
A est donc un message produit et envoyé. B est la réponse d’un quidam ou plusieurs réponses d’un quidam ou de plusieurs quidams. La réponse de B entraîne une réponse possible sous la forme A’, et ainsi de suite. Or les conditions de production de A, B, A’, B’, etc., n’étant jamais les mêmes et aucun contact direct (visuel ou auditif) ne permettant de relier hors-texte A et B pour les rendre homogènes ou raccords, la nuance, matière fragile et volatile s’il en est, ne sera transmise que dans un faible nombre de cas, et dans tous les autres cas provoquera schématisme, simplification, frustration, malentendu, et autres oiseaux de malheur.
Ceci dit, même avec visu…
Nos voisins d’en face, à neuf ou dix mètres en contrebas d’un demi-étage, famille d’expatriés dans 200 mètres-carrés (à vue de nez) (avec trois enfants), ont inventé un nouveau truc, ce soir : deux phares disposés au sol sur leur balcon pour jouir de la vue de leurs plantes brillantes d’humidité. Belle idée pour une mentalité pavillonnaire avec jardin privatif. Sauf que ces phares de piste aérienne nous éclairent la façade autant qu’érables et yucas. Comment n’y ont-ils pas pensé ? À moins qu’ils ne voient nos fenêtres, et notre présence vivante de temps en temps, que comme un décor type fond d’écran.
Quand madame était au téléphone, j’ai donc sorti la lampe torche de secours et l’ai éclairée en retour. Réaction instantanée, le fauteuil tourne, elle ne peut pas me rater puisque ses phares m’éclairent. Surprise et gêne. Mais. Tout de suite cachée. Réfugiée dans la cuisine. On ne va pas ouvrir la fenêtre et communiquer avec un fond d’écran, même quand il vous affiche un message d’alerte. J’imagine quand même qu’elle a compris et je rentre avec ma lampe éteinte. Mais deux minutes après, je la retrouve dans son fauteuil en train de tapoter sur un portable wifi, les projos extérieurs toujours sur nous. Je ressors derechef et rallume sur elle et autour d’elle, dans son grand salon, histoire que le faisceau produise bien des variations de lumière inratables. Ça ne passe pas inaperçu mais elle fait celle qui ne voit rien, ou qui s’en fout. Je rentre mettre la petite laine en question et quand je reviens, je la vois tout au fond de son salon par terre avec son portable, près du canapé où vaguement quelqu’un d’autre est allongé. Son mari. Ça cause. — Oui quand même on ne peut même pas faire ce qu’on veut chez soi. — Ouais m’enfin tu vois bien que ça les dérange. Mets-toi à leur place. — Ah c’était pas comme ça à La Châtre. Quelle idée aussi j’ai eue de te suivre au Japon. Ne me demandez pas pourquoi La Châtre. J’imagine… J’aurai pu dire Issoudun ou Cambo-les-Bains. Mais je ne vais pas rester ma torche à la main. Je vais bricoler une installation bien focalisée, un faisceau chirurgical. Je la pose donc avec une petite cale de façon à ce qu’elle éclaire précisément, entre mes barreaux de balcon, l’angle où ils se sont réfugiés. Et je rentre préparer du thé.
Trois minutes après, T. qui passse par là me dit qu’ils ont éteint les phares, tiré les rideaux et les doubles rideaux. Elle dit un grand merci dans le noir. On éteint la torche, on range la cale. Fin des communications.
Publié dans le JLR
Vigoureux hochement de tête quant au danger des commentaires…
assorti d’un sourire en coin : au rayon « comédie du voisinage », la saynète est savoureuse.
Eh oui, pourquoi La Châtre ?
J’y étais cet après-midi. J’y ai vécu pendant quelques années.
On n’éclairait pas les voisins avec des projos extérieurs. Il faut dire que l’immeuble est rare, et n’excède pas cinq étages.
Quelle idée bizarre vous a traversé ? Peut-être avez-vous eu connaissance de la belle exposition parisienne consacrée à ce grand artiste qui vit justement à La Châtre ?
J’ai nommé Fred Deux (sans oublier sa compagne Cécile Reims).
On pouvait l’entendre sur France-Culture la semaine dernière (A voix nue).
L’occasion au moins de vous dire merci pour votre journal, que chaque jour je lis, de mes vieilles terres berrichonnes.
Robin, je note que vous aviez aussi Issoudun récemment sur une de vos cartes…
Sinon, je ne sais pas d’où La Châtre est sorti. Je pense y être passé mais n’en ai pas de souvenir précis. En revanche, j’ai bien vu les pages de France Culture mentionnant ces entretiens avec Fred Deux et me suis demandé s’il s’agissait des excellents entretiens réalisés il y a quatre ou cinq ans ou si ce sont de nouveaux entretiens… Il faut que j’écoute.
Alors peut-être subliminalement, La Châtre s’est inscrit(e) dans mon esprit…
Merci de votre compliment. Votre blog est aussi dans ma liste Bloglines depuis fort longtemps !
c’était pourtant bien cet échange, et plutôt courtois – juste un peu du japonais pour moi, un peu d’étrangeté qui a tenté de réveiller ce qui subsiste dans mon crâne
moi j’aurais bien une petite idée : au moment de nous narrer (fort joliment !) ce sauvage conflit de voisinage à coup de lampe torche laser (que la force soit avec toi !) l’angoisse de castration endormie en tout mâle a suggéré « la châtre » …
(sans rire, tout y est stade du miroir, torche à la main, corps allongé sur un canapé, etc.etc. : volontaire ou pas, ce grand retour de l’objet petit a ?)
Pourquoi pas ! J’ai chopé mon sabre-torche et je te les ai castrés ! Z’avaient qu’à pas m’allumer !
trop émue d’usurper le nom du grant’homme, j’ai oublié de signer de mon lien … mais j’assume la psychanalyse sauvage !
ah les commentaires…sur mon blog débutant, j’en ai peu et tous charmants, donc tout va bien. Je leur ai quand même consacré un billet, sidérée par ce que je lisais ailleurs.
Cela me rappelle les commentaires de lecteurs que je recevais quand je travaillais encore comme journaliste, il y a peu. Parfois intéressants, mais le plus souvent insultants (on se console en se disant que les gens contents n’écrivent pas i.d; ce sont les plus nombreux….)
@Martine S : vu ce « et maintenant » sur la page d’accueil du blog… moi qui avais bondi, ouah, Martine Silber sur Net (j’allais me contenter des initiales, mais il y aurait eu confusion…) – vous nous en direz plus ?
quant à La Châtre, très belle page de Michon sur traversée de la ville, c’est ce qui a dû te revenir, Berlol, à moins d’un souvenir du mois orléanais ?
initiales et confusion : with me perhaps ?
Of course, je crois…