La constance marginale des teigneux
« Euh… Faudrait pas croire que je vais écrire tous les jours, non plus ! »
(Là, c’est juste pour dire qu’on va bien, pas secoués parce qu’assez loin des nombreux et terribles séismes de l’île de Kyushu. Mais bon, j’en profite pour ajouter quelques lignes…)
R. I. P., P. I. F. !
Car, oui, le temps des pionniers du blog est bien fini. Les nouveaux blogueurs – youtubeurs et facebookiers – ignorent déjà ce qui les a précédés ou méprisent ces vieux croutons du PIF*, et je les comprends. Ils jouent des coudes, prétendent en vivre, tombent déjà dans la recette (que des vidéos, ou que des recettes ou que des critiques de romans qui viennent de sortir, etc.) ; c’est qu’eux-mêmes ont peu de temps pour se faire remarquer, avant qu’une nouvelle appli n’engendre une nouvelle génération d’appliqués…
Par ailleurs, les come back façon Renaud & Polnareff, c’est pitoyable et déprimant. Ça console les babyboomeurs, qui viennent (ad)mirer leur retour d’âge dans les croulants regonflés par de cupides producteurs – pas ma tasse de thé. Sans hésitation, je préfère la constance marginale des teigneux Murat & Manset.
Dans mon précédent billet, je citais Bien connu des services de police de Dominique Manotti (2010). Depuis, j’ai lu avec le même plaisir et du même auteur Or noir (2015) et L’honorable société (2011, écrit avec DOA), vu le film de 2009 Une affaire d’état, adaptation de Nos fantastiques années fric (2001), avant d’entamer Larchmütz 5632 de Jean-Bernard Pouy (2001). Or noir, sans conteste, est le plus satisfaisant ; on y perçoit l’envers de ce qui s’est joué autour du commerce du pétrole dans les années 1970 et qui est, hélas, à la base d’une bonne partie des problèmes actuels. Le livre est arrivé à la médiathèque de l’Institut français de Tokyo alors que je commence un cours de dix semaines sur Au revoir la-haut et les arnaqueurs des années 1920.
Dans le Pouy, c’est précisément le come back lui-même qui pose problème : deux anciens militants gauchistes peuvent-ils réellement revenir dans le jeu quinze ans après leur mise en veille ? Et qu’est-ce que revenir ? Et dans quel jeu – ou dans le jeu de qui ?
Quinze ans – dernier rebond pour aujourd’hui – c’est aussi le temps d’une collaboration entre les auteurs du post-exotisme et Geneviève Brisac, à L’École des Loisirs. C’est un temps qui finit, et, hélas, qui finit mal, même si les livres et surtout les textes qu’ils contiennent, eux, ne finiront jamais.
* Prémices de l’Internet Francophone = le web des années 1990-2005.
Tags : Brisac Geneviève, Manotti Dominique, Manset Gérard, Murat Jean-Louis, Polnareff Michel, Post-exotisme, Pouy Jean-Bernard, Séchan Renaud
Publié dans le JLR