Carrière déjà de marbre
Ce matin, Célia Houdart était notre invitée au cours d’explication de texte de l’Institut franco-japonais de Tokyo, qui porte ce semestre sur On n’est pas là pour disparaître d’Olivia Rosenthal. Elle a d’abord présenté son propre travail théâtral, puis littéraire, sa carrière déjà de marbre, en quelque sorte, ses liens avec le Japon, puis a commenté sa lecture du livre d’O. R., impression et vision détaillée d’une auteure de la même génération.
Elle insiste sur le décalage fictionnel, les voix, le montage, le work in progress – tout ce qui permet aussi de ne pas voir l’écriture ou le livre comme témoignage. Nous lui répondons par notre admiration pour sa précision poétique, par exemple dans Carrare, l’ellipse et le lapidaire des actions et des personnages, l’arrière-plan politique du judiciaire, l’estime du lecteur participant.
« Marco Ipranossian resta immobile. Il était un peu inquiet à l’idée de découvrir une part enfouie de lui-même. Il demanda :
– Tu te souviens de ce que j’ai dit ?
– C’était des bribes de phrases.
De la main, Filippo déplaça une mèche de cheveux qui le gênait. Il dit :
– À un moment, tu as prononcé les mots « petits fruits sauvages ».
Marco Ipranossian chercha un instant. Il voyait ces mots flotter devant lui. Mais ils ne lui évoquaient rien. Il était encore un peu endormi. Puis tout se passa comme un jeu de memory, quand, après avoir longtemps retourné des cartes sans liens entre elles, soudain on reconstitue coup sur coup plusieurs paires. Marco Ipranossian vit une rue en pente. Un grand rectangle de béton. Des baies rouge vif au creux d’une main d’enfant. Il sentit aussi un goût âcre dans la bouche. Il fit alors le rapprochement entre les trois mots et un souvenir d’enfance à Erevan.
Rue Spandarian, à proximité d’anciens réservoirs, entre deux maisons, s’étendait un terrain vague où poussaient toutes sortes de plantes. Un îlot de campagne au cœur de la ville. Son frère et lui y jouaient, enfants, pendant de longs après-midi. Un jour ils avaient cru s’empoisonner en avalant par défi des baies d’un rouge inhabituel pour des groseilles. Ils les avaient aussitôt recrachées à cause de leur saveur épouvantable, se précipitant tout de suite sur le tuyau d’arrosage du garage pour boire et se rincer la bouche abondamment. » (Célia Houdart, Carrare, Paris : P. O. L., 2011, p. 59-61)
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démonstration même que la « littérature » n’est pas et n’a jamais été dans les salons, fussent-ils nommés « littéraires », ni dans les écoles… ni même dans les « carrières de marbre »… ou plutôt si, mais dans le sens d’une littérature « in vitro », alors même que tout ce qui importe réellement à la vie est « in vivo », dans « l’oubli des enfantillages de la raison »…
le reste n’étant précisément « que littérature », idée pétrifiée et inerte de la « chose littéraire » (partout enseignée), séparée de la vie, sans rapport sérieux avec l’essentiel, cad la vie et la passion de l’infini qu’elle recèle ou devrait appeler, cette passion qu’on vit et qui PARFOIS s’écrit …
clivage essentiel à partir duquel on mesure l’inanité profonde des discours formels ou formalistes (à quoi se ramènent la majorité des analyses universitaires, tel un monde en cage, d’enfermement myope dans les textes) tels que : (« Elle insiste sur le décalage fictionnel, les voix, le montage, le work in progress – tout ce qui permet aussi de ne pas voir l’écriture ou le livre comme témoignage. Nous lui répondons par notre admiration pour sa précision poétique, par exemple dans Carrare, l’ellipse et le lapidaire des actions et des personnages, l’arrière-plan politique du judiciaire, l’estime du lecteur participant »)…
« Je n’aime pas les vers, j’aime la poésie » (Victor Hugo – qui écrivit en vers, svp ! mais bien « au-delà » – cf, s’il faut montrer ses papiers, comme il se doit qd on cite en milieu universitaire, « Le promontoire du songe »)
Je n’ai pas pour habitude de censurer qui que ce soit. Cependant, je ne validerai que ce seul commentaire de Vinteix, afin de montrer qu’il contient exactement les mêmes termes récriminatoires que les nombreux commentaires du même auteur dans les années précédentes. Cette systématicité du rejet d’auteurs contemporains est regrettable, et cette (même ?) systématicité du dénigrement de l’étude universitaire est, pour le moins, louche – surtout quand je ne cite aucune étude universitaire !…
Je n’ai pas la compétence pour qualifier le problème chronique de Vinteix. Qu’il vive sa « passion de l’infini » !
Tout ce que je peux faire, c’est couper le robinet pour éviter à mes lecteurs ses redites inopportunes et improductives.