Mont Fuji perdu dans les brumes
À huit heures, je fais l’ouverture de la boulangerie Kayser rue Okubo, puis je passe chercher les deux amies à l’hôtel Agnès pour un petit déjeuner à la maison et leur faire connaître notre petit nid.
La baguette Monge descend sans que je la voie. Heureusement que j’ai pris des céréales.
Tout étant empaqueté, gaz stoppé, maison fermée, nous voici partis à quatre pour Nagoya. Passage ethnologique et alimentaire dans GranSta, le sous-sol de la gare de Tokyo, pour des bento à manger dans le shinkansen.
Tournons une rangée de deux fauteuils pour être à quatre (dans le shinkansen, les rangées de deux et de trois fauteuils se tournent avec une pédale) et profiter ensemble du panorama urbain, puis rural, puis déjeunatoire, nos plateaux-repas étant fort différents.
D’ailleurs, le Mont Fuji perdu dans les brumes, rien à voir de ce côté là.
Nagoya sous la pluie, c’est moche. Conducteur de taxi limite autiste. On est content de déposer nos bagages à l’arrivée. Des ouvriers doivent nous repeindre la porte d’entrée, T. reste pendant le séchage. Agence de location de voiture d’Irinaka, où je reçois une superbe Toyata Prius Hybrid, pour traversée amphibie de la ville à trois jusqu’à la capitainerie du port, celle qui m’offrit un si beau paysage en décembre, avec Dominique, et du haut de laquelle on ne voit, aujourd’hui… rien. D’ailleurs, il n’y a personne pour nous faire payer les tickets ou nous empêcher de monter tout en haut par l’ascenseur.
Retour par le Mitsukoshi de Sakae où, tour encyclopédique avec les deux amies, nous achetons de quoi dîner à la façon d’ici : des filets d’anguilles grillés à la sauce shoyu, des ailes de poulet aux graines de sésame, par exemple.
Voiture garée près de chez nous, dans une pente où le stationnement est gratuit et autorisé (rare). Tentatives infructueuses de retrait d’argent avec des cartes de crédit françaises qui ne sont ni « international » ni « plus » (mentions à vérifier pour toute personne qui voudrait voyager au Japon et retirer de l’argent dans des distributeurs). Échanges de cadeaux, dîner, vaisselle, séance internet pour courrier perso de chacune et coucher sans trop tarder dans différentes pièces de ce grand nid après vérification des bagages pour demain.
« Deux touristes rôdent sur le trottoir, aperçoivent ma silhouette à travers mes baies, la-haut, détournent aussitôt le regard. Nos touristes sont toujours polis. C’est, pour la culture, parfois tout un groupe qui se tourne en même temps vers mes fenêtres suivant l’index d’un guide expliquant qu’au sixième, pas seulement chez moi, sur toute la longueur du bâtiment, maintenant c’est coupé en deux, vivait un artiste dont nous venons de voir les toiles. L’ambiance de visite permanente n’offusque pas les lieux comme sur la place du Tertre ou sur le versant sud de la Butte. Par exemple, le petit train blanc qui part de Pigalle ne s’aventure pas jusque dans notre rue. » (Alain Sevestre, Manuel de l’innocent, p.18)
Tags : Sevestre Alain
Publié dans le JLR