l’œuvre post-anthume du sycophante
Et si j’étais déjà mort, hein ?… Par cette chaleur.
(Et ce billet aurait / a été préparé à l’avance pour être publié ce soir même à 23 heures 59. De même que ceux qui suivraient / suivront…
On pourrait ainsi imaginer une œuvre entièrement programmée pour paraître, en une fois ou par épisodes, après la mort réelle de son auteur, via la fonction « planifier » de WordPress par exemple. À la fois anthume et posthume, l’œuvre post-anthume du sycophante pourrait aussi avoir des effets sur ses lecteurs, illocutoires et perlocutoires, par exemple si des secrets étaient révélés, dont le contenu déclencherait des drames ou des bonheurs, entraînerait des actes de certains des lecteurs qui ne seraient dûs qu’au statut totalement paradoxal de la parution. Les épisodes pourraient aussi promettre des révélations concernant des personnalités en vue, par exemple sur des crimes, des malversations, des corruptions, des secrets de famille, des comptes offshore, etc., tous secrets dont des bribes passeraient déjà dans les premiers messages, attirant chaque jour un lectorat plus large, et l’on verrait alors les personnes supposément ou réellement concernées par ces délits sortir du bois, qui se suicidant pour échapper à l’opprobre, qui voulant faire pression sur l’hébergeur pour interrompre la publication que le mort aurait cependant verrouillée en choisissant un hébergeur inaccessible et en payant son abonnement d’avance pour dix ans…
Des mémorialistes comme Brantôme, Tallemant des Réaux, Saint-Simon, Casanova, des diaristes comme les frères Goncourt, Jules Renard, Claude Mauriac ou Hervé Guibert, d’où ils sont, me comprendront. (Car il faudra quand même que ça ait de la tenue, de la gueule, du panache, de l’esprit, du style. Pas juste un alignement de ragots ou de chiffres et de numéros de compte — au moins si l’on veut que ce soit de la littérature…)
Quant aux vivants, ils n’ont plus qu’à essayer de se conformer à ce projet, sans pour autant — hélas ! trois fois hélas ! — avoir la garantie que la publication de leur mort aura du succès…)
Bientôt, vous saurez tout sur…
[Note de T., le 22 août : Berlol vient de rendre son dernier souffle. Il y a 49 billets préparés d’avance… Je les efface ou je les laisse s’auto-publier ?]
Publié dans le JLR
Étrange écho à la lecture du moment.
Et on réalise qu’il y a un petit plus, quelque chose de rare et très émouvant, à lire les livres de Michon, Modiano, ou Echenoz, en sachant leur auteur vivant au moment où nous lisons, contemporains de notre lecture (la recherche universitaire regroupe d’ailleurs ces auteurs vivants sous le terme d’HYPER-contemporains)…
Réjouissant, votre billet, bien qu’effrayant.
haaha! J’aime bien la fin du billet, ça nous ramène aux limites de tout projet de contrôle du futur, dont le corps du billet était un bel exemple. On pourrait contester que ce mechanisme on peut l’agencer sans ordinateurs, rien qu’avec un éditeur, mais votre fiction souligne les aspects les plus, dirais-je Valdemar, de toute publication posthume. D’ailleurs, dans ce rêve d’une activité posthume du mort, par voie d’un mechanisme qui le fait prendre la parole, ne retrouve-t’on pas un peu l’essence de toute littérature?
Oui, JoseAngel, ce qui s’appelle « littérature » contient naturellement ce mécanisme qui se déclenche après la mort de l’auteur chaque fois qu’un lecteur lit le texte !
Dans ma « fiction », il s’agissait surtout, comme tu l’avais bien vu, du mécanisme de publication, de son automatisme programmé et indépendant du bon vouloir d’un éditeur.