Notre délice en binôme
C’est le jour où l’on sort de l’entonnoir. Avec 37°C annoncés dans nos rues. La réunion de 10 heures met fin, en 38 minutes, à une semaine de stress des correcteurs. Pour les 1ère et 2e année. La salve suivante viendra dans moins de deux semaines, avec les rapports des 3e année, sur le cinéma.
Déjeuner avec David, Florian et Jonathan au Downey. C’est incidemment, en parlant de séries télé que la différence de génération devient criante. David, plus jeune que moi, n’y est pas encore habitué. Nos deux vis-à-vis sont nés vers 84. Quand j’allais faire mon Service national, c’est dire. Quand ça existait encore. Je pourrais largement être leur père. Je revois très bien leur mère potentielle… Mais ils ne connaissent pas Amicalement Vôtre, ni Chapeau melon et Bottes de cuir ni Dallas (série que je n’aimais pas du tout), et à peine Ma Sorcière bien-aimée. Pfuuu…
Pendant que la chaleur se démène ici, T. me dit qu’il pleut très fort à Tokyo. Des employés de la voirie ont été emportés dans des canalisations. L’un est mort après avoir parcouru trois kilomètres, son corps repêché dans la rivière Kanda. Les alertes d’inondation se multiplient et le tonnerre gronde orange. D’où je suis, sous le soleil, c’est un peu difficile à croire, même si j’entends très bien les grondements dans le téléphone. Mais c’est pas ça qui va m’empêcher de partir la rejoindre !
Prévoyant, je mets quand même une bonne dose de thé chaud dans mon mug et je fais un énorme sandwich avec le saumon fumé qui reste. J’ai (toujours) une mini-torche électrique et un couteau de poche, le tout pour le cas où mon train resterait coincé des heures. Je m’imagine planqué sous un siège, dans le noir d’un wagon sans électricité, en train de grignoter mon sandwich au saumon… Quoiqu’a priori ça arriverait plutôt en France qu’au Japon, cette mésaventure-là, non ?
En fait, tout se passera très bien. Je finis le roman d’Hervé Claude, je sirote mon thé au caramel et je garde le sandwich pour la maison où il fera notre délice en binôme.
Quand j’arrive à la sortie d’Iidabashi, j’entends déjà gronder l’eau dans le déversoir. Je me penche et je vois passer tout un torrent de montagne, sa mousse blanchâtre dans le coude de béton. Soudain l’angoisse pour les tortues, de l’autre côté de la passerelle de Ramla. Dans le noir, en contrebas, impossible de rien voir. Ont-elles eu le temps de se protéger ? Ont-elles un sens qui les a alertées du danger ? Les reverra-t-on jamais ?
Tags : Claude Hervé
Publié dans le JLR