Impartial (mon œil) et critique (pffuuu…) — l’intérêt
Enfin ! Les encombrants sont partis, très tôt. Vers sept heures, nous sommes descendus pour voir si tout était encore là, mettre quelques meubles plus près de la rue pour que le service de la mairie les trouve. Et vers 8h30, plus rien. Tout emporté. Sensation d’allègement, de dépossession joyeuse. Restent les deux mètres cubes de boîtes de livres. Je les range dans la grande penderie en attendant que les livreurs arrivent. Pendant que T. dépoussière les murs et cire les sols, je brique les carreaux de la cuisine, démonte, nettoie et remonte l’aérateur, savonne à fond l’évier. À 10h30, les livres partent, ils seront demain matin à Nagoya. L’appartement est vide, hormis quelques sacs plastiques, quelques petits paniers de produits divers, sake de cuisine, eau de Javel, boîte de gants en plastique, etc.
Encore une fois, si ça n’intéresse personne, je répète que ce journal a toujours eu une double fonction : pallier ma mauvaise mémoire du quotidien & accompagner mes lectures et cours. L’une et l’autre ne sont pas toujours à égalité ; le résultat n’est pas toujours hautement littéraire. C’est d’ailleurs précisément la variation permanente du dosage qui en fait, selon moi — un moi dédoublé qui devient observateur impartial (mon œil) et critique (pffuuu…) — l’intérêt.
Ça m’a énervé, ce billet chez Scheer sur Assouline ! C’est rien de le dire. Mais vaut mieux se calmer.
Florent G. (avec qui je devrais m’entendre) m’a répondu — « […] Ecrivez un livre sur votre propre expérience […] » — j’étais mort de rire — comme s’il répondait à une sorte d’hurluberlu qui débarque de la Lune, sans se renseigner ni rien, simplement pour défendre son point de vue dont le fondement est, peut-être sans qu’il le sache : tout vient du livre et y retourne, sous-entendu : le web n’est pour nous qu’un lieu de transit et une caisse de résonance. Sur le site d’un éditeur, c’est normal. Et donc normal qu’il(s) y défende(nt) et promeuve(nt) un autre journaliste tête de gondole.
Allez, sortons courir !
« Entrés en Moravie, les Allemands s’y établissent donc et occupent Ostrava, ville de charbon et d’acier près de laquelle Émile est né et où prospèrent des industries dont les plus importantes, Tatra et Bata, proposent toutes deux un moyen d’avancer : la voiture ou la chaussure. Tatra conçoit de très belles automobiles très coûteuses, Bata produit des souliers pas trop mal pas trop chers. On entre chez l’une ou l’autre quand on cherche du travail. Émile s’est retrouvé à l’usine Bata de Zlin, à cent kilomètres au sud d’Ostrava.
Il est interne à l’école professionnelle et petite main dans le département du caoutchouc, que tout le monde aime mieux éviter tant il pue. L’atelier où on l’a d’abord placé produit chaque jour deux mille deux cents paires de chaussures de tennis à semelles de crêpe, et le premier travail d’Émile a consisté à égaliser ces semelles avec une roue dentée. Mais les cadences étaient redoutables, l’air irrespirable, le rythme trop rapide, la moindre imperfection punie par une amende, le plus petit retard décompté sur son déjà maigre salaire, rapidement il n’y est plus arrivé. On l’a donc changé de poste pour l’affecter à la préparation des formes où ce n’est pas moins pénible mais ça sent moins mauvais, il tient le coup.
Tout cela dure un moment puis ça s’arrange un peu. À force d’étudier tant qu’il peut, Émile est affecté à l’Institut chimique et là c’est plutôt mieux. Même s’il ne s’agit que de préparer de la cellulose dans un hangar glacial bourré de bonbonnes d’acide, Émile trouve ça beaucoup mieux. Certes il préférerait, en laboratoire, participer à l’amélioration de la viscose ou au développement de la soie artificielle, mais il manifeste en attendant que ça lui plaît bien. Ça lui plaît tant que l’ingénieur en chef, content de lui, l’encourage à suivre les cours du soir de l’École supérieure. Une bonne petite carrière de chimiste tchèque se dessine lentement.» (Jean Echenoz, Courir, Paris : Minuit, 2008, p. 10-11)
Sortira le 9 octobre mais on peut déjà se délecter de cette fausse neutralité biographique…
Après notre première promenade libre depuis près d’un mois et un dîner tranquille, Vantage Point (P. Travis, 2008), juste ce qu’il nous fallait. Denis Quaid en dur à cuire — il court aussi pas mal — pour une scène de dix minutes vue et revue sous tous les angles — d’attaque. Le film était sorti le 19 mars alors que nous quittions la France le 14…
Tags : Assouline Pierre, Échenoz Jean, Georgesco Florent, Scheer Léo
Publié dans le JLR
on peut déjà se délecter – oui, merci, et voilà qui me réveille un peu
Oh, oui, attendre de Courir en octobre.
J’avais, ces temps-ci, beaucoup de difficultés à venir lire ce que tu écrivais. Beaucoup de ruptures, de pannes. Peut-on changer son signet dans les favoris ? La couleur également — est-on casanier ! — des environs de ton « journal » contrariait parfois.
Oui, je pense qu’on peut fixer le signet (j’espère !). Je voulais attaquer les couleurs des marges mais j’ai été rattrapé par les problèmes de base de données. Sans parler du rangement / déménagement…
Je vais m’y mettre. je verrais bien une sorte de pastel ton sur ton…
Attendre octobre pour courir, ça va être long.
On peut toujours courir en attendant, on sera déjà dans le rythme !
Echenoz ! Vite ! Ouaaais !
J’attendais. J’attendais.