Quelqu’un saura-t-il lire dans mon marc de macha ?
Relâche ensoleillée. Grande promenade à pied jusqu’au parc Chinzanso de l’hôtel Four Seasons, bien changé depuis mon précédent passage. Je ne suis plus entouré de Laurent, Jean-Philippe, Alexandre et al., mais accompagné de la seule T. — qui les vaut tous.
Les cerisiers ont commencé leur cinéma, le même chaque année. Je me demande si ce sont aussi les mêmes pétales qui repoussent — je veux dire génétiquement…. Ils sont à 20 ou 30 % dans le barème national, et ça fait sortir les bâches bleues, aux emplacements déjà réservés de longue date, les glacières et quelques barbecues. Sur les étroites pelouses du sentier au bord du canal, dans les petits parcs que bordent les toilettes publiques, des dizaines de groupes s’affalent et baffrent proprement dans la bonne humeur et les relents. En accord avec le rose pâle des pétales, c’est exquis.
Heureusement, dans l’enceinte du parc de l’hôtel, rien de tout cela. Mais des mariages, un ou deux par heure, et pas des pauvres ! De belles toilettes, japonaises ou occidentales. Avancez, propose la guide au couple et aux familles, sur ce balcon pour des photos, près de la pagode, devant la cascade, voilà entrez là-dedans, patientez quelques minutes, et hop, direction votre banquet, dans ce salon. Les mêmes qu’on reconnaîtra trois heures plus tard à leur sac cadeau de remerciement des mariés, empourprés et hagards sur un quai de métro, la cravate de travers. Là-dedans, c’est aussi un large salon de thé traditionnel où nous sommes venus en prendre un.
Quelqu’un saura-t-il lire dans mon marc de macha ?
« C’est le reverdissage, un air de printemps, le début de résurrection. On hydrate, on enlève les poils, on attaque de chaux et d’orpin avant de rincer. La mise en confit au plus profond d’une soupe atroce transformera la charogne en pelure de luxe, bientôt brodée. Dans de grandes cuves, elles sont ainsi touillées au bâton, peu à peu dégraissées, lovées les unes contre les autres en ce concert puant. Rassérénées à nouveau par un mélange turbulent de farine, d’alun, de sel, de jaune d’œuf qui les nourrit et les assouplit. L’essoreuse dégoutte et une marée de Suize revient, d’un courant de Léthé, faire son travail d’oubli. On n’imagine pas ce qu’ont vécu les peaux qui crissent sur la fermeture d’un sac, qui glissent, doucement retirées. » (Laure Limongi, Le Travail de rivière, p. [19-20])
Moi qui adorais déjà le cuir ! (pas nécessairement des grandes marques.)
Ce soir, avec le pot-au-feu de T., on regarde Wanted (Choisis ton destin, Timur Bekmambetov, 2008) et on est beaucoup plus content qu’hier soir. Mise en scène et trucages virtuels superbes, quelques bonnes idées (même si on sait qu’elles viennent d’une BD) : le fusil à très longue distance, le tir courbe digne des grands gestes tennistiques, les rats porteurs de charges explosives. Etc.
Tags : Gefen Alexandre, Limongi Laure, Toussaint Jean-Philippe
Publié dans le JLR
belles photos, merci quand tu nous fais ainsi voyager…
(avec le syndrome du chapelier, celui annuel du cerisier!)
une fois encore envie de lire – tant pis, ça attendra – mais me semble me souvenir d’avoir accompagné un relieur pour choisir des peaux et qu’outre l’intérêt de la chose, la poésie de l’ensemble était très odorante